« Ñu lay tam dëmm, fekk la ngay soccoo yaxu liir. » Ce dicton wolof qu’il m’est impossible de traduire aussi succulemment en français, je le soumets aux suggestions des lecteurs non sans en laisser flotter la substance…: « il n’est guère prudent de fournir le bâton qui peut servir à se faire battre. »
Disons le tout net : les Sénégalais ont mal de leur police et de leur magistrature. Tout citoyen honnête admettra avoir été témoin, au moins une fois dans sa vie, d’une de ces scènes lamentables de « main à main » entre agents de l’ordre et usagers de la route.
La peine infligée à tel journaliste pour diffusion de « fausses nouvelles » ou « outrage au Chef de l’Etat » semble si disproportionnée par rapport aux faits que l’on se demande, raisonnablement, si le verdict ne traduit pas un acte par trop zélé de subordination à l’offensé plutôt qu’un rendu de justice équitable.
Quand la presse rapporta que le président prodigue allait faire attribuer des parcelles de terrains aux magistrats sénégalais, j’ai instinctivement soupçonné Gorgui d’une offensive de charme, comme il en a le talent, mais cette fois, vers les vigiles de nos libertés, à moins qu’il ne se fût agi d’un simple canular présidentiel pour tester la souplesse du troisième pouvoir.
-Pourvu qu’ils ne mordent pas à l’appât! Me surpris-je à murmurer, tout en pinçant le chapelet de mes ressentiments. Le lendemain, je me rue sur les journaux espérant un démenti assorti du refus outré des magistrats… Je présumais, que dans un froufrou indigné de robes, l’Union s’écrierait:- Allons donc ! Pour qui nous prend-on ? Pour moi, nul doute que la noble corporation allait, d’un mouvement de toques unanimes, entamer derechef des procédures légales de destitution du Chef de l’Etat pour outrage à la dignité de la corporation. Non seulement la barre de mes illusions avait été trop haut placée par rapport à l’aune des magistrats mais la voix de leur président accusait du peu : 70 parcelles Rek pour en exiger presque le triple... « Ñu lay tam dëmm… » Dieu!
Le coup de grâce me fut asséné par cette même presse qui m’apprit la confession anonyme de quelques téméraires d’entre ces braves serviteurs, chuchotant sous le jabot, -« Ce don (les) met mal à l’aise aux yeux de l’opinion… » soccoo yaxu liir. » Diable! Refus et démission eussent été dignement héroïques. Dire que j’étais prêt à parier ma pension de retraite (confisquée) que le pouvoir judiciaire allait rassurer les justiciables que tout ce tintamarre avait été vicieusement orchestré par des enseignants jaloux, histoire d’attirer l’attention sur leur misérable condition.
Erreurs humaines ou motivations diaboliques ?
En aucune de ces républiques que l’on singe sans en avoir ni les moyens ni l’esprit, le Premier magistrat n’oserait « instruire » son ministre de la justice d’offrir le moindre lopin de terre à un corps de l’Etat. A moins qu’il ne fasse aucune différence entre vaguemestre et ministre ou que ce dernier ne se plaise à jouer au pitre fou du roi.
Au delà de cette attribution de parcelles qui n’est que ruse et manœuvre de division, se pose une épineuse question : gouverner qui et comment ? Plus de 50% de la population sénégalaise n’appréhendent pas les interstices du canevas judiciaire qui les régit. Combien de citoyens comprennent les subtilités juridico-politiques d’une constitution ? L’Etat, fort de cette réalité, ruse en tout et avec tout le monde en misant sur l’ignorance des uns, la veulerie des autres. L’Alternance, convaincue que l’occasion fait le larron, ne rate jamais l’opportunité de créer, au gré de ses intérêts, des fabriques de larrons, genre Senat, Conseil économique et social et autres agences râteliers dont l’unique critère de recrutement est d’être« prêt à ne pas penser pour mieux servir». Pendant que Gorgui, disciple auto proclamé, offre des terrains aux marabouts curateurs de nos âmes, le fils œcuménique s’ingénie à faire couler des eaux bénites et retaper du cimetière catholique. La grande masse de croyants applaudit ; le mécréant hausse les épaules tandis que les intellectuels (de langue française) protestent au nom de cette laïcité, bouillon de toutes les cultures de tolérances et intolérances. Laïcité ? Bah oui ! C’est garanti par la Constitution. La preuve est qu’il soit permis à chaque conviction d’afficher son slogan: ---Oui et non aux maçons!
-Homosexuels, « don’t tell, don’t ask! » Mais lynchons les d’abord. Puis crachons sur leurs tombes
-Prostituées, Haram! Sauf inscrites au fichier
Hypocrisie sociale quand tu nous tiens…
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