Affaire du « Complot d'Etat» : Cheikh Tidiane Sy indispose la Majorité

Après le revers qu’a constitué pour lui le démenti du gouvernement, le ministre de la Justice est sur le point de perdre ses appuis dans la majorité politique qui appuie le gouvernement. Sous le couvert de l’anonymat, certains réclament sa destitution.

S’il quitte le gouvernement, ce sera la seconde sortie de piste pour Cheikh Tidiane Sy. Le Garde de Sceaux, qui a commis l’indélicatesse de réveiller les Sénégalais, le 18 mars, ‘pour si peu’ serait, en effet, sur une corde raide. Fait rarissime depuis la naissance de la troisième République, un ministre d’Etat, titulaire d’un portefeuille de souveraineté, s’est vu recadrer comme un débutant. La Présidence de la République et le gouvernement s’y sont mis à deux pour lui servir un démenti aux antipodes de ce que le protocole tolère.

Aussi, ils sont nombreux dans l’entourage du président de la République à demander un lâchage de Cheikh Tidiane Sy. Ce, pour deux raisons. L’une, de principe, tient au coup porté à la cohésion gouvernementale. Pour mémoire, c’est 24 heures seulement après le communiqué de Me Ousmane Ngom informant de l’autorisation de toutes les marches déclarées que le Garde des Sceaux s’est fendu de son adresse télévisée de minuit pour, on ne sait comment, mettre à l’index des fauteurs de troubles identifiés comme porteurs d’un projet de coup d’Etat. La suite, on la connaît : après cinq jours de ‘cuisine’ infructueuse, les limiers de la Dic étaient dans l’obligation de libérer les ‘otages’. Le Parquet et les services de police n’ayant, en effet, aucun élément de nature à les maintenir dans les liens de la prévention, leur élargissement s’imposait. Et le pouvoir, pour ne pas perdre la face, a senti la nécessité, quelques heures plus tard, de remettre les choses à l’endroit. ‘Aucun élément de l’enquête ne permet, aujourd’hui, de dire avec certitude qu’il s’est agi d’un complot ou d’une quelconque tentative de coup d’Etat’, sérine Serigne Mbacké Ndiaye, le porte-parole de la Présidence de la République. Ce qui est repris, mot pour mot, par le porte-parole du gouvernement.

La deuxième raison tient à l’image du gouvernement. Une image qui a été balafrée par cette malencontreuse sortie de Cheikh Tidiane Sy. D’autant que toutes les dispositions avaient été prises pour permettre à tous ceux qui le voulaient de s’exprimer. A un an de la présidentielle, le challenge en valait le coup. Pour le marketing présidentiel, l’occasion était d’or. A l’arrivée, à quoi a-t-on assisté ? Le 19 mars, Sidy Lamine Niasse a tenu son sit-in. Sans heurts ni couacs. L’opposition et la majorité ont marché sans porter atteinte à l’ordre public. Aussi, ils ne sont pas rares, aujourd’hui, à réclamer la tête du ministre de la Justice. Au sein même de la mouvance présidentielle, le malaise est perceptible. ‘La question n'est même pas de savoir s'il faut ou pas qu'il démissionne du gouvernement, mais que fait-il encore au gouvernement à ce moment-ci ?’, lâche, sous le couvert de l’anonymat, un membre influent de ladite mouvance. Un autre, plus indulgent, pense qu’’il vaudrait mieux pour Cheikh Tidiane Sy de changer de poste’. Parce que, avec lui à la Justice, les sceaux ne sont pas bien gardés ? C’est tout comme.

Evidemment, l’opposition n’est pas en reste dans cette campagne pour la démission du Garde des Sceaux. Bille en tête, certaines de ses franges vont même jusqu’à réclamer sa traduction devant la Haute Cour de justice.

Reste à savoir si Me Wade qui n’est pas un enfant de chœur, va céder à la pression de son propre camp, aux récriminations de l’opposition et de la vox populi pour larguer son ministre de la Justice et vieux compagnon en rase campagne.