Pour sa première visite en France depuis le départ de Chirac, le Chef de l’Etat sénégalais a introduit Karim Wade chez le nouveau maître de l’Elysée, dans une opacité totale.
Pour une visite mystérieuse, c’en était une. L’audience qui a été accordée, hier, au président Abdoulaye Wade par le président de la République française, Nicolas Sarkozy, a été celle de tous les verrouillages. Les précautions inhabituelles arrêtées et mises en œuvre, sans doute d’un commun accord, entre les deux protocoles présidentiels, ont paru cacher quelque événement jugé inédit, en particulier du côté sénégalais. De sources diplomatiques diversifiées établies aussi bien à Dakar qu’à Paris, dont une provenant d’un patron d’un grand magazine panafricain basé dans la capitale française, il ressort que M. Karim Wade, président du Conseil de surveillance de l’Agence nationale pour l’organisation de la conférence islamique (Anoci), conseiller spécial et fils du Chef de l’Etat sénégalais, a rencontré Nicolas Sarkozy en marge de l’audience du président Wade. Le tête-à-tête entre les deux hommes ne pouvait qu’être de nature informelle, conséquence directe d’une double fiche d’audience, l’une officielle, l’autre non officielle. Selon nos informations recueillies d’abord à Dakar et confirmées en début de soirée à Paris, le nom du fils du président de la République ne figurait pas sur la feuille d’audience officielle arrêtée par les autorités sénégalaises, d’où le caractère informel de l’entretien avec le locataire de l’Elysée.
En amont de cette rencontre, des mesures exceptionnelles avaient été prises pour organiser le black-out absolu. D’abord, à l’Ambassade du Sénégal, il était, totalement, impossible à la presse d’obtenir les accréditations nécessaires à la couverture du déplacement du président Abdoulaye Wade à l’Elysée. Moustapha Barry, le correspondant du quotidien Walfadjri dans la capitale française, nous certifie avoir tout fait pour entrer en contact avec le responsable presse de la représentation diplomatique sénégalaise. En pure perte. Aucun service de l’ambassade n’a daigné agir dans le sens de la satisfaction d’une doléance toute banale en d’autres temps. Et si c’étaient les seuls journalistes sénégalais qui étaient ostracisés ! En réalité, et selon nos informations, la mesure était valable pour toute la presse panafricaine établie à Paris, interdite d’accès, elle aussi, à l’Elysée. Au siège de la présidence française, ensuite, tout a été fait pour qu’aucun journaliste n’accède aux lieux. Un confrère que nous avons joint par téléphone nous a expliqué qu’arrivé devant l’Elysée, le service de sécurité lui a, fermement, signifié que seule l’ambassade du Sénégal était en mesure de fournir les accréditations. Des consignes hyper strictes venues, cette fois, de l’Elysée, étaient passées par là.
En outre, et comme c’était jour de pratiques nouvelles, l’escorte du président de la République avait changé de nature. Mise à part le véhicule personnalisé de Me Wade, les trois autres voitures qui l’accompagnaient, étaient toutes banalisées, selon des sources diplomatiques franco-sénégalaises présentes à Paris.
Cherchant un peu plus de lumière dans cette affaire d’audience informelle, nous avons accroché Cheikh Diallo, proche collaborateur de Karim Wade. C’est une réponse à la fois sèche et ironique, comme ce n’est pas dans ses habitudes, qu’il nous a servie. «Je suis en stage actuellement au Quai d’Orsay. Je ne sais rien de ce que vous dites, mais j’estime que Karim Wade a le droit d’être où il veut. Voilà.»
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