Invité de l’émission Le Jury du Dimanche sur Iradio, Bakary Sega Bathily, Directeur général de l’Agence pour la Promotion des Investissements et des Grands Travaux (APIX SA), s’est exprimé longuement sur le Train Express Régional (TER). Il a qualifié ce projet phare du précédent régime de “pertinent et ambitieux”, tout en soulignant qu’il est déconnecté des réalités économiques du Sénégal. Malgré ces critiques, il défend la nécessité d’une continuité de l’État et pose les bases d’une gouvernance publique plus rigoureuse et responsable.
Le TER, une réponse à un besoin réel de mobilité
Dès le départ, Bathily a tenu à préciser que le TER n’est pas un projet à rejeter. “Il répond à un véritable besoin de mobilité dans un contexte où le triangle Dakar-Thiès-Touba concentre l’essentiel de l’activité économique du pays. Chaque année, la congestion coûtait près de 100 milliards de francs CFA au Sénégal. Une réponse forte s’imposait”, a-t-il déclaré. Cependant, il nuance : “C’est un projet surdimensionné pour un pays sous pression budgétaire. Si son utilité n’est pas contestable, sa conception et son dimensionnement posent problème.” Selon le DG de l’APIX, le TER a été pensé avec une ambition excessive au regard des ressources du Sénégal. “C’est comme installer un climatiseur dans une maison en paille. On a conçu un projet lourd et coûteux alors que le pays peine à répondre à des besoins essentiels comme l’alimentation ou l’accès aux soins. Avec un coût dépassant les 1 200 milliards de francs CFA, hors TVA et frais annexes, il aurait fallu l’adapter aux capacités financières réelles du Sénégal”, estime-t-il.
Devoir de continuité de l’État
À la question de savoir pourquoi poursuivre un projet qu’il juge imparfait, Bathily invoque la continuité de l’État. “Le TER est déjà engagé, et son arrêt entraînerait des conséquences lourdes. Nous ne sommes pas des nihilistes. Un impact positif est attendu, notamment une fois le tronçon jusqu’à l’aéroport Blaise Diagne achevé, ce qui rendra le projet rentable”, explique-t-il. Il ajoute : “Le défi aujourd’hui est de poursuivre le chantier sans dépassement budgétaire. Nous garantissons que chaque franc dépensé sera justifié, sans un centime de plus que le budget initial.” Ayant travaillé sur le projet au sein de l’APIX, Bathily assume sa position de l’époque, guidée par un devoir de loyauté envers son institution. “À l’époque, il ne m’appartenait pas de m’exprimer publiquement. Mais en interne, j’ai toujours fait part de mes réserves techniques. Il faut distinguer la posture républicaine de la posture politique”, précise-t-il.
Une nouvelle vision pour l’APIX
À la tête de l’APIX, Bakary Sega Bathily souhaite tourner la page d’une décennie marquée par une focalisation excessive sur le TER. “Pendant dix ans, l’APIX s’est presque exclusivement concentrée sur ce projet, ce qui est réducteur. Nous allons repositionner l’agence sur l’ensemble de ses cinq missions stratégiques”, promet-il. Sous sa direction, il ambitionne une APIX rigoureuse, transparente et tournée vers l’excellence au service de l’investissement et du développement national. Selon lui, le TER, lancé en 2014 en pleine préparation du groupe consultatif, répondait à un besoin politique de “réalisation emblématique” pour rassurer les partenaires techniques et financiers. “Le projet a été conçu pour relancer l’activité de plusieurs entreprises, principalement françaises, en échange d’un soutien financier. Cela relevait davantage d’une logique d’image que de pertinence économique”, conclut-il.
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