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Politique

Cheikh Bamba Dièye sur la présidentielle de 2012 : 'Je ne suis pas prêt à répéter l'erreur de 2000'

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Cheikh Bamba Dièye sur la présidentielle de 2012 : 'Je ne suis pas prêt à répéter l'erreur de 2000'
Dans le cadre de la coopération décentralisée, du renforcement des relations de partenariat entre Saint-Louis et les villes du monde, Cheikh Bamba Dièye, le maire nouvellement élu de la vieille cité de Saint-Louis était à Genève. Il avait auparavant participé à Paris à la réunion des maires francophones. A Marseille, Paris, Toulon, Genève, le maire a rencontré ses collègues et les autorités locales mais aussi les Sénégalais de la Diaspora pour pouvoir discuter, surtout avec les Saint-Louisiens localement installés, sur l’urgence d’intervenir pour la ville.

Wal Fadjri : M. le Maire, pouvez-nous parler de l’intérêt de votre visite en Europe ?

Cheikh Bamba DIEYE : En France, j’ai rencontré le maire de Paris, Bertrand Delanoé. A Genève, je me suis entretenu avec le conseiller administratif Manuel Tornaré etc. Avec tous ces maires et autorités, il a été convenu de voir ce qui est possible d’être fait concrètement pour la valorisation et la rénovation du patrimoine saint-louisien. Saint-Louis fêtera l’année prochaine ses 350 ans d’histoire. Cette visite me permet ainsi de dévoiler tous les atouts de Saint-Louis, cette ville tricentenaire, et de trouver les appuis nécessaires pour véritablement amorcer le développement que Saint-Louis attend depuis très longtemps. C’est dans la coopération décentralisée qu’il y a fortement à chercher et d’après ce que nous recevons comme retour, je pense que nous ne sous sommes pas trompés. Par ailleurs, au-delà des questions purement saint-louisiennes, nous nous sommes préoccupés énormément des questions sénégalaises qui sont centrales car elles interpellent le vécu de chaque Sénégalais. L’année prochaine, nous allons entrer dans le cinquantenaire de l’indépendance du Sénégal. Il était donc important que les Sénégalais, surtout ceux de la Diaspora s’asseyent pour que nous n’ayons plus jamais dans les 50 années à venir le vécu et la manière de faire la politique au Sénégal. Surtout en termes de dérives du point de vue des libertés, du développement, et du droit élémentaire de chacun d’entre nous d’accéder à un mieux-être et à des conditions de vie décentes.

Wal Fadjri : Est-ce donc la raison pour laquelle vous avez donné une conférence destinée aux Sénégalais de Genève ?

Cheikh Bamba DIEYE : Cette rencontre tournait autour de la diaspora et de son impact pour le développement politico-économico-social du Sénégal. Avec une contribution de plus de 400 milliards de dollars par an, aucune autre contribution n’égale celle de cette diaspora. C’est donc la diaspora qui maintient la soupape au Sénégal. Sans leur contribution, notre pays connaîtrait des lendemains très difficiles. On se demande comment de nombreuses familles pourraient payer l’électricité, le téléphone, nourrir leurs enfants, protéger les parents, les femmes, les voisins, de manière générale la grande famille sénégalaise? Les Sénégalais de la diaspora sont bien conscients de leur rôle, mais faudrait-il qu’ils continuent à financer des activités dans un pays où tout va à vau-l’eau, tout périclite. Le danger, c’est qu’après 10 à 15 ans d’émigration, nos compatriotes rentrés au pays se rendent compte que tout ce qu’ils ont envoyé comme argent n’a servi qu’à satisfaire des besoins ménagers. Les émigrés consentent d’énormes sacrifices dans leur pays d’accueil. Je pense dès lors que nous devons tous travailler ensemble pour que leurs efforts puissent servir au développement du pays.

Les Sénégalais de la diaspora doivent aussi peser sur la balance car si l’Amérique a pu réussir à faire promouvoir un homme hors du sérail, soutenu parce qu’il était crédible et porteur de valeurs et d’innovations, ils ont donc aussi la responsabilité, comme ils me l’ont montré lors des élections du 22 mars denier de porter une candidature comme la mienne, pour qu’ensemble nous puissions asseoir un Sénégal crédible, plus juste et non corrompu parce que plus transparent.

Wal Fadjri : Au Sénégal, l’actualité, c’est aussi le dialogue politique entre le pouvoir et l’opposition. Pensez-vous que ce dialogue aboutira ?

Cheikh Bamba DIEYE : Il faut que l’on soit plus sérieux. Il ne faut pas que l’on essaie de tromper les Sénégalais. Nous sommes tous bien informés de ce qui se passe et de la réalité de l’action politique au Sénégal. Il ne faut pas servir du dilatoire qui ne nous sert à rien. Nous avons un président de la République qui a été élu non pas pour amorcer un dialogue politique mais pour régler le vécu quotidien des Sénégalais. Qu’est-ce qui a été fait sur ce sujet ? Rien du tout sur ce sujet ! Aujourd’hui, le véritable dialogue politique, c’est d’établir l’équilibre entre les différentes institutions de la République ; entre le Judiciaire, l’Exécutif et le Législatif. Rétablir les bases d’un dialogue politique crédible, c’est assurer une bonne redistribution des ressources de l’Etat aux ayant droits et aux secteurs qui en ont le plus besoin. Rétablir les bases d’un dialogue politique, c’est construire un Sénégal démocratique de développement, c’est renforcer l’agriculture et, arrêter ce que l’on est en train de faire dans le secteur éducatif où on a laissé des enfants passer avec des moyennes de 6. Ces enfants seront concentrés massivement dans les écoles primaires qui seront en même temps des écoles secondaires. C’est sur ces questions-là que nous attendons le président de la République. Si vous voulez, un président de la République qui fait son boulot, installe de fait le dialogue politique. Mais ici le dialogue politique devient un alibi car c’est quand le président de la République perd le sens du Nord, la proximité avec les populations qu’il pense que les autres acteurs politiques peuvent lui faire servir de faire-valoir et surtout de moyens pour pouvoir recoller le fil du dialogue. Ce qui n’est pas la bonne méthode.

Wal Fadjri : Est-ce que vous allez répondre personnellement vous et votre parti à ce dialogue ?

Cheikh Bamba DIEYE : Nous, en ce qui nous concerne au Fsd-Bj, nous ne nous faisons pas d’illusion. Sur le principe quand quelqu’un vous dit nous allons discuter vous n’allez pas le refuser mais je ne suis pas du tout à faire rentrer tout et croire qu’avec ça, on va régler tous les problèmes. J’en suis persuadé : c’est juste un alibi et un moyen, un instrument d’un moment pour diluer un problème. Dans le fond et dans la forme, je ne vois pas ce qui pourrait crédibiliser ce dialogue.

Wal Fadjri : Autant beaucoup de Sénégalais souhaitent le changement, autant il semble difficile de trouver une entente au sein de l’opposition. Comment allez-vous prendre en charge cette situation ?

Cheikh Bamba DIEYE : Sur ce débat, je suis assez tranché car il ne faudrait pas que certains pensent qu’ils sont plus intelligents que les autres. Le Sénégal a besoin d’avoir des hommes crédibles, un système électoral hors de tout soupçon. Pour ce faire, l’objectif principal est de veiller à ce que le deuxième tour pour l’élection présidentielle continue d’exister même si du côté du pouvoir on veut nous faire revenir à une élection à un seul tour. Ceci est une première urgence. Deuxièmement nous devons mutualiser nos efforts pour assurer la régularité et la transparence du système électoral. Concernant la question de la candidature unique, ou de la candidature multiple, cela ne sert strictement à rien. Il faut que les Sénégalais sachent ce qui va exactement se passer. Nous le savons tous, il y a des partis de l’opposition qui présenteront vaille que vaille leur candidat, donc il ne faut pas tromper les gens ou nous amener à des histoires qui ne nous mènent nulle part. Alors, constatons que certains ont déjà l’ambition d’aller à cette élection présidentielle. La candidature unique n’est pas la solution inéluctable pour régler les problèmes du Sénégal. On peut avoir plusieurs candidatures ou une candidature unique mais le plus important c’est que cette candidature se base sur des critères objectifs. Car il s’agit d’une élection présidentielle, donc d’un homme. En ce qui me concerne, je ne suis pas prêt à répéter l’erreur de 2000. Cette erreur-là, je ne suis pas prêt à le réitérer. C'est-à-dire donner ma voix à quelqu’un et demain, en rester à courir derrière lui et à regretter d’avoir fait ceci et d’avoir fait cela.

Ce que je peux dire, c’est que je suis configuré à présenter la candidature du Fsd-Bj en 2012. Nous avons déjà été candidat. C’est donc une des options que nous avons.

Wal Fadjri : Vous voulez dire que vous allez être candidat en 2012 ?

Cheikh Bamba DIEYE : Nous n’en sommes pas encore là, mais nous l’avons déjà fait et nous en avons les aptitudes et cela fait partie de nos options aussi. Je voudrais simplement dire que pour surseoir à notre candidature, il faudra que la personne qu’on me présentera et qui devra être mon candidat que quand je le regarde je me dise : ‘celui-là, il est plus honnête que moi, plus crédible que moi, et quand je regarde son passé, que je n’ai rien à lui reprocher pour que demain, je ne puisse pas être dans la situation à devoir justifier l’injustifiable ou à avaler l’inacceptable.’

Wal Fadjri : De tels hommes existent-ils aujourd’hui au sein de l’opposition ?

Cheikh Bamba DIEYE : Pourquoi uniquement au sein de l’opposition ? On parle, je crois, du Sénégal. La solution aux problèmes du Sénégal, ce n’est pas uniquement entre les mains de l’opposition, ni encore moins dans celles du pouvoir. Je parle de Sénégalais, je parle de valeurs, de crédibilité et des cinquante années à venir. Je n’accepterai que sous le prétexte que parce que c’est X ou Y, que certains ont duré X années au sommet de l’Etat qu’ils sont crédibles. Jusqu’à présent, personne parmi eux ne nous a sorti du sous-développement ou ne nous a aidé à régler la question de l’autosuffisance alimentaire encore moins les questions liées à l’éducation ou à la santé. En termes de crédibilité, ils ne sont pas plus loin que qui que ce soit.

Wal Fadjri : Justement en parlant de crédibilité, et sur un autre sujet, que vous inspire l’histoire de corruption présumée d’Alex Segura du Fonds monétaire international (Fmi) par de ‘hautes personnalités de l’Etat’ ?

Cheikh Bamba DIEYE : Vous savez, c’est uniquement quand on a une vision individualiste du pouvoir que ce qui s’est passé avec le Fmi se justifie. Quelle est aujourd’hui la crédibilité du Sénégal ? Non contents d’installer la corruption à l’intérieur de notre système, d’avoir complètement pourri notre administration, rendu les gens complètement méfiants et de faire perdre l’espoir aux Sénégalais, nous nous sommes aujourd’hui amusés à nous laisser entraîner dans un jeu international où chaque citoyen du monde et toutes les organisations internationales vont définitivement et délibérément indexer le Sénégal. Et Dieu m’est témoin, ce c’est ni votre faute, ni la mienne. Ce ne sont que nos dirigeants qui sont corrompus et qui se laissent aller à des facilités. Ce qui s’est passé est inacceptable. Cela doit être aussi l’enjeu des élections à venir. On ne peut plus accepter de déléguer sa souveraineté, son identité, sa respectabilité, sa crédibilité entre les mains de gens qui ne sont absolument pas respectables, ni crédibles, et qui ne pensent qu’à eux. Et qui demain vont te faire ravaler au dernier rang de la classe des sociétés humaines. Il est donc nécessaire que les Sénégalais, surtout ceux de la diaspora, établissent les réseaux nécessaires pour que nous n’ayons plus à vivre ce que nous avons vécu ces cinquante dernières années, car trop c’est trop.

Wal Fadjri : Vous avez parlé des libertés qui sont menacées aujourd’hui au Sénégal. Quel commentaire faites-vous de l’attaque ou du saccage du siège du Groupe de presse Wal fadjri, à Dakar ?

Cheikh Bamba DIEYE : Quand l’Etat disparaît ; quand ce qui devait nous couvrir tous n’a plus de crédibilité ; lorsqu’on a construit dans l’idée des gens qu’on pouvait parfaitement être au dessus de la Loi, qu’on pouvait avoir une couverture supérieure qui permet de faire ce que l’on veut, comme on le veut, vous pouvez comprendre, qu’on ne peut être loin de ce schéma. Lorsque l’Etat disparaît, les gens vont se retrouver en guide, en communauté. Et ceux qui ont été agressés, vont se préparer pour ne plus l’être demain parce que ceux qui les ont agressés n’ont pas été inquiétés. Par ailleurs, tous ceux qui regardent ce qui s’est passé et qui ont la capacité de générer autant de groupes vont aussi s’organiser en conséquences. Vous l’avez vu avec l’affaire de Kaolack (affrontements entre groupes se réclamant de deux confréries, Ndlr). Est-ce que c’est cela l’histoire du Sénégal ? Il ne faudrait pas que cet esprit mercantiliste, de politicien,rasoir et archaïque, détruise dans ce pays ce que l’esprit de sacrifice, de travail, d’efforts et de crédibilité ont construit au Sénégal.

Pour notre part, au Fsd-Bj, nous sommes déterminés à nous lever et nous mettre devant n’importe qui, quelle que soit sa stature. Sur cette question, il ne faudra pas compter sur un messie. Nous sommes tous actionnaires dans notre propre pays et nous allons nous engager sur les choix qui engagent l’avenir de notre pays. Et s’il faut pour cela, aller à l’élection présidentielle, je le ferai. J’en ai les moyens et j’ai autant de crédibilité à faire prévaloir.

Propos recueillis à Genève par El Hadji Gorgui Wade NDOYE (ContinentPremier.Com)

 



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