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Politique

Djibo Leyti Kâ (Secrétaire général de l’Urd) : «Je ne peux pas m’expliquer la violence en démocratie»

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Djibo Leyti Kâ (Secrétaire général de l’Urd) : «Je ne peux pas m’expliquer la violence en démocratie»
Le secrétaire général de l’Union pour le renouveau démocratique dont la candidature en 2012 est réclamée par une frange importante de son parti, a décidé de se sacrifier pour soutenir celle de Me Abdoulaye Wade en quête d’un troisième mandat.‘Le président Wade est naturellement notre candidat en 2012’, répond-il.Pour autant, le rénovateur en chef ne renonce pas à ses ambitions présidentielles comme il le laisse entendre dans cet entretien qu’il nous a accordé. Le secrétaire général de l’Urd se prononce également sur l’alliance future entre son parti et le Pdsl ainsi que sur les questions politiques de l’heure.

Wal Fadjri : Comment vivez-vous le regain de violence dans le champ politique ?

Djibo Kâ : C’est inacceptable. Je ne peux pas m’expliquer la violence en démocratie. Je condamne fermement la violence en politique. Rien ne justifie la violence dans un pays démocratique, surtout dans le domaine politique. C’est pourquoi, il faut qu’on se mobilise pour dire non. Mais, il faut surtout éduquer nos militants à avoir une culture politique. J’ai l’habitude de dire que la violence est l’arme des faibles. C’est pourquoi, j’espère que cela va s’arrêter là. Je suis désolé d’entendre par-ci par-là des appels à œil pour œil, dent pour dent. C’est une escalade qu’il faut arrêter parce qu’elle est dangereuse. Cette escalade de la violence politique peut déboucher sur tous les drames. Je pense que ceux qui parlent ainsi, n’ont jamais géré de crise politique.

En tout cas, moi qui ai eu à gérer des crises politiques, c’est une expérience que je n’oublierai jamais. Une violence quand elle se déclenche, personne ne peut dire où elle va s’arrêter et comment. S’il n’y a pas la main de Dieu, il peut y avoir des centaines, voire des milliers de victimes. C’est la raison pour laquelle, il faut bannir absolument la violence politique. Et un petit pas peut déboucher sur de grands désastres. Donc, il faut arrêter pendant qu’il est encore temps. Il faut laisser l’Etat faire son devoir, et tout son devoir pour assurer la loi qui est égale pour tout le monde. Parce que c’est une loi républicaine votée par le parlement au nom du peuple souverain. Donc, si nous sommes démocrates, nous devons être attachés à l’application de la force de la loi. C’est pourquoi, je suis désolé de voir certaines choses se passer dans notre pays qui ne mérite pas cela.

Notre démocratie est devenue majeure. La classe politique sénégalaise est très responsable. Certains sont des hommes d’Etat. Mais être homme d’Etat n’est pas être un politicien au petit pied, mais c’est se mettre au niveau des enjeux démocratiques et républicains. Je le crois fermement et j’en appelle très fraternellement aux hommes politiques pour que les partis politiques soient assis sur des convictions fortes, sur des débats d’idées. C’est cela qui est normal pour une démocratie comme la nôtre. J’espère que cela ne se renouvellera pas. C’est en tout cas mon vœu le plus cher. Et mon parti a condamné les deux actes de violences qui se sont produits à Thiès et à Dakar au siège du Pds. Ce n’est pas acceptable et c’est incompréhensible. Cela n’a aucun sens, sinon on va vers des dérapages qu’on ne pourra pas contrôler.

Ceci étant dit, il faut commencer par la jeunesse scolaire et la jeunesse des partis, en les appelant au dialogue et au débat démocratique sain. Ne serait-ce qu’en les formant à l’esprit de la citoyenneté.

Wal Fadjri : Comprenez que, dans la majorité des cas, les auteurs de violence politique restent impunis ?

Djibo Kâ : Laissons la justice faire son travail. C’est mieux. Je fais confiance à la justice sénégalaise parce qu’elle est composée de femmes et d’hommes compétents. Cela ne fait aucun doute. Mais elle a son mode de fonctionnement. Souvent, ce ne sont pas les modes de fonctionnement, mais les procédures. Donc, laissons-la faire son travail sans ingérence.

Wal Fadjri : Avec la réorganisation du Pds qui va se muer en Pdsl, quels seront les rapports avec votre parti, l’Urd ?

Djibo Kâ : En tout cas, j’ai entendu le président Wade dire récemment que la réorganisation du Pds ne concerne que les militants du Pds. Et comme moi, je ne suis pas du Pds…

Nous sommes en alliance avec le Pds. Avec la structure qui va remplacer le Pds, ce sera la continuité. L’alliance restera telle qu’elle était en s’adaptant, en s’ajustant. N’oubliez pas qu’on a récemment mis en place l’Alliance Sopi pour toujours qui regroupe tous les partis de la mouvance présidentielle, ceux qui siègent et ceux ne siègent pas au gouvernement. Cette alliance s’agrandit à ma grande satisfaction.

‘Je suis persuadé qu’on va gagner en 2012, même si une élection n’est jamais gagnée d’avance. Si les bilans permettent de gagner, il ne fait aucun doute que le président Wade va gagner largement’

Wal Fadjri : Serez-vous candidat en 2012 comme vous y appellent certains de vos militants ?

Djibo Kâ : Je le sais bien. Et je l’ai compris. J’ai dit ce que j’avais à dire sur cette question. Mon vœu actuellement est que notre alliance gagne largement en 2012. Le président Wade est naturellement notre candidat en 2012. Nous allons tous nous y investir. Mais, je voudrais simplement dire que la patience est la mère du bonheur. Et Dieu est avec les patients.

Wal Fadjri : Le soutien que vous apportez au président Wade ne se fait-il pas au détriment de votre parti ?

Djibo Kâ : Je ne pense pas. L’Urd est un parti majeur qui réfléchit beaucoup. Nous sommes avec le président Wade depuis six ans. Cette alliance se porte bien. Elle a des résultats positifs. Pour autant, dans l’intérêt de notre pays, nous avons décidé de poursuivre l’expérience pour le moins concluante. Ce serait injustifiable et incompréhensible qu’on la quitte maintenant. Surtout pas maintenant.

Wal Fadjri : Etes-vous sûr de gagner en 2012, en dépit de l’acuité de la demande sociale ?

Djibo Kâ : Absolument, mais il faut travailler comme on est en train de le faire. L’élection présidentielle est spécifique. C’est la rencontre d’un homme avec son peuple à qui il sollicite son suffrage sur la base d’un projet. S’il adhère à ce projet, il vote pour lui.

On parle du 22 mars 2009. Or ce qui est curieux, c’est que ce sont ceux qui crient victoire qui contestent le fichier qui leur a permis de gagner certaines grandes villes même si, dès qu’on parle de suffrages globaux, ils sont loin derrière.

Je suis persuadé qu’on va gagner en 2012, même si une élection n’est jamais gagnée d’avance. Si les bilans permettent de gagner, il ne fait aucun doute que le président Wade va gagner largement en 2012. Vous pouvez croire qu’on va surprendre beaucoup de personnes. J’ai l’habitude de dire qu’un bilan peut aider à gagner, mais il permet souvent de perdre. D’ailleurs paradoxalement, quand un bilan est positif et que les conditions de vie des populations n’ont pas changé, alors, c’est en ce moment qu’il y a danger ! C’est par expérience que je le dis. C’est la même chose dans le domaine de la diplomatie. A chaque fois qu’un pays flambe sur le plan international, les problèmes domestiques des populations sont négligés. Il suffit de prendre l’exemple de George Bush père. Il avait une diplomatie flamboyante, mais les problèmes domestiques n’étaient pas pris en charge comme il fallait. Clinton est venu et il l’a battu. Il y a beaucoup de cas à travers le monde. Donc, il faut faire très attention. Il faut savoir comment concilier les bilans positifs et une communication réussie.

Wal Fadjri : Comprenez-vous cette agitation politique à deux ans de la présidentielle ?

Djibo Kâ : C’est naturel. N’oubliez pas que nous sommes au Sénégal. Les Sénégalais adorent la politique. C’est normal qu’ils bougent de façon frénétique, mais pourvu que cela se fasse dans le calme et un dialogue constructif. C’est ma forte conviction. Ainsi le pays marchera.

‘Si je devais faire un bilan exhaustif des cinquante d’indépendance de notre pays, je dirais qu’il est largement positif dans tous les domaines. Mais, il reste beaucoup à faire’

Wal Fadjri : Quel bilan faites-vous des cinquante ans d’indépendance du Sénégal ?

Djibo Kâ : Ce serait prétentieux de faire le bilan de notre pays. Si je suis acteur de quelque chose, ou témoin de quelques étapes, je peux dire que si le Sénégal était un livre sans titre qu’on a fini de lire. Après lecture, si on me demande de lui donner un titre, comme l’on faisait à l’époque en rédaction française, je dirai ceci : ‘Le Sénégal, un Etat’. Ne serait-ce que pour cela, nous devons rendre grâce à Dieu. Parce qu’un Etat, c’est le garant de tout : de l’indépendance nationale, de la stabilité, de la justice, de la cohésion sociale… Sans l’Etat, on ne peut rien faire de durable. C’est pourquoi, je tiens beaucoup à la citoyenneté et au sens républicain des acteurs politiques. Sans cet esprit républicain, l’Etat ne peut tenir debout longtemps. Heureusement pour nous. L’armée et les grands corps de l’administration ont fait un excellent travail qui ont permis à l’Etat d’être debout.

Je me souviens des propos de Senghor qui nous disais toujours : ‘Il est bon d’avoir des militants actifs et dynamiques dans un pays, des centrales syndicales fortes, mais il est fondamental et essentiel d’avoir un Etat assis sur des corps d’élite armés d’un esprit républicain’. C'est-à-dire qui sont des militants de l’Etat. Par conséquent, sans eux, rien n’aurait été possible. Sur le plan économique et social, il faut reconnaître que nous sommes partis de loin. En 1960, on n’avait pas un revenu par tête d’habitant qui dépasse les 200 dollars. En matière d’éducation, je ne pense pas qu’on avait un taux de scolarisation avec un chiffre significatif de plus de 30 %. Aujourd’hui, on approche de la scolarisation universelle. Dans ce domaine, notre pays a fait des pas de géant. On a même atteint la parité entre les filles et les garçons. Dans l’enseignement supérieur, on avait une seule université : celle de Dakar. Aujourd’hui, il y a une université à Saint Louis, Ziguinchor, Thiès et Bambey sans compter les autres qui vont venir. Donc, si je devais faire un bilan exhaustif des cinquante d’indépendance de notre pays, je dirais qu’il est largement positif dans tous les domaines. Mais, il reste beaucoup à faire.

Wal Fadjri : Le président Wade vient de proposer d’accueillir au Sénégal des Haïtiens, rescapés du tremblement de terre ; l’opposition crie à la récupération politique. Quel est votre avis ?

Djibo Kâ : N’oubliez pas que nous sommes avant tout membre de la communauté de l’humanité. Et comme ce qui se passe dans un autre coin du monde, ne nous laisse pas indifférent, il ne faut pas se boucher les oreilles et fermer les yeux. Il faut voir la réalité en face. On ne peut pas rester insensible à ce qui a frappé Haïti. Lisez attentivement le Cahier d’un retour au pays natal de Aimé Césaire. C’est comme si c’était le début de son vœu, de son hymne au retour à la terre natale d’Afrique. Je ne suis pas historien, mais je sais que sociologiquement, culturellement et humainement, nous sommes tous des frères avec les Haïtiens. Donc, je suis surpris que certains dans l’opposition réagissent comme ils l’ont fait. Je me demande si ce n’est pas seulement de la politique politicienne Et ce serait dommage qu’on joue avec le drame du peuple haïtien. Je n’en dirai pas plus. Dans tous les cas, je suis d’avis que le président de la République a raison. Non seulement, il a raison, mais aussi, il est audacieux. Pour une fois, on ne dira pas que l’Afrique s’est mise à pleurnicher. Mais l’Afrique a joint l’acte à la parole. J’ai vu dans la presse qu’une cinquantaine de Haïtiens ont exprimé le souhait de venir chez nous. Déjà, nous avons décidé de contribuer pour un million de dollars sur nos maigres ressources comme acte de solidarité. Je pense que tous les partis politiques doivent se mobiliser autour de cette question haïtienne pour en faire une cause nationale. J’ai compris pourquoi le président de la République a saisi l’Union africaine d’une résolution lors de son prochain sommet. Il serait bon que l’Union africaine assume ses responsabilités. C’est l’occasion d’assumer. Je ne dis pas qu’elle n’a jamais assumé, mais en l’occurrence, c’est un problème immédiat et concret. Il faut définir une démarche africaine et définir les modalités de mettre en œuvre cette mesure. Je pense qu’aucun pays africain ne se mettra à l’écart du mouvement d’ensemble de solidarité pour Haïti. (A suivre)



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