ELECTRICITE - Coupures intempestives : Wade déclare «Je ne suis pas au courant des coupures….

Le Sénégal connaît des moments difficiles avec la pénurie de carburant très fortement ressentie par la Senelec au point de procéder à de longs délestages de ses abonnés. Une affaire d’Etat qui tarde à être réglée. Sans doute parce que le chef de l’Etat a été tenu «hors du circuit» dans la gestion de cette carence. Le Président Wade a surpris son monde hier en avouant ignorer que le Sénégal était en proie à de terribles délestages. Pauvre Wade ou pauvres Sénégalais ?

Pendant que les quartiers des villes du Sénégal sombrent, à tour de rôle, dans l’obscurité tous les soirs. Pendant que les unités artisanales et industrielles tournent au ralenti, pour cause de délestages opérés dans la distribution de l’électricité, le chef de l’Etat est tenu éloigné de tout cela. Oui, le Président Wade n’a pas été informé de coupures intempestives d’électricité qui meublent le quotidien des Sénégalais, depuis pratiquement la fin de la Coupe du monde de football. Le Président Wade l’a reconnu lui-même, répondant à la presse après la cérémonie d’ouverture de la conférence ministérielle des pays africains non producteurs de pétrole.

Le chef de l’Etat s’était montré étonné en lançant un «ah bon !», quand un journaliste l’a interpellé sur les solutions immédiates à apporter aux délestages. Mieux, dans sa réponse, le chef de l’Etat a déclaré clairement, avec un naturel et un flegme décapant : «Je ne suis pas au courant des coupures….Je ne les ressens pas au Palais. Peut-être que c’est une stratégie de la Senelec (rires)…» (Ndlr : De ne pas couper l’électricité dans le secteur du Palais présidentiel). De toute façon, le président demandera sur place au ministre de l’Energie et des Mines, Me Madické Niang, de «répondre à la question s’il le peut».

Macky Sall, Premier ministre, assis à la droite du chef de l’Etat, a montré quelques signes de contrariété. Me Niang, lui aussi, visiblement gêné par la sortie du Président Wade, cherchera ses mots avant de lâcher un aveu surréaliste, pour ne pas dire terrible. «Oui, c’est vrai Monsieur le Président, nous avons, ces derniers temps, quelques problèmes d’approvisionnement en carburant. Mais je peux annoncer que depuis hier (Ndlr : mercredi), il est arrivé à Dakar un navire de 30 tonnes de carburant.» Mieux, poursuit le ministre de l’Energie, «à compter du 5 août prochain, la Senelec va faire venir son propre carburant, deux bateaux vont arriver».

Il faut dire que, depuis le bras de fer entre le gouvernement et le cartel de pétroliers actionnaires de la Sar, il y a environ un trimestre, l’Etat du Sénégal a tenu à prendre certaines dispositions pour tenter de casser le monopole d’importation de carburant qui était accordé à la raffinerie. Aussi, le gouvernement a-t-il tenu à racheter certaines parts dans le capital de la raffinerie pour porter ses actions de 23% à un peu plus de 41%. «Nous voulions même faire plus, mais certains pétroliers refusent de vendre leurs actions», indique le ministre de l’Energie. Les relations entre les plus hautes autorités de l’Etat et les responsables de la Sar avaient été très heurtées. Le Président Wade disait même, publiquement, refuser le diktat ou le chantage des pétroliers.

En effet, excipant de son monopole d’importation de carburant, la Sar qui n’arrivait pas à recouvrer la totalité des dettes que lui doit l’Etat et ses démembrements, avait refusé le déchargement, le stockage ou le traitement de carburant importé par l’Etat du Sénégal pour approvisionner le marché en proie à une grave pénurie.

Dans la foulée, répondant à une autre question sur les carences du Sénégal pour constituer un stock de sécurité, le ministre Madické Niang affirme qu’un accord est déjà trouvé avec la société Oryx, pour stocker le carburant qui vient d’être acheminé à Dakar. Il prendra à témoin le chef du gouvernement Macky Sall, affirmant qu’un espace est déjà trouvé au port pour y construire un lieu de stockage de carburant. L’Etat assure donc que la situation délicate à laquelle le Sénégal fait face sera dépassée rapidement.

Quid des rumeurs de hausse du prix du carburant ? Le Président Wade, dont ses collaborateurs assurent qu’il s’évertue encore à refuser toute hausse du prix de l’électricité, ira d’un plaidoyer qui a laissé dubitatif son monde. «S’il doit y avoir une hausse, les gens comprendront que ce sont des mesures qu’il faut accepter en attendant. Que les gens sachent que le gouvernement prend les mesures pour limiter les difficultés sociales. Si nous ne pouvons pas, nous dirons aux Sénégalais d’accepter la nouvelle hausse. Les gens sont assez responsables pour ne pas nous demander l’impossible.»