Kaffrine : le "baromètre" du PDS se rappelle au bon souvenir de ses frères libéraux

De toute la galaxie libérale de Kaffrine (centre), Ousmane Kane est le premier à militer dans le Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir), mais paradoxalement, il assure encore attendre dans un certain dénuement les retombées de ce militantisme précoce qui lui a pris l’essentiel de sa jeunesse.Petit de taille, accoutrement sobre, Ousmane Kane est connu de tous les Kaffrinois pour son engagement en faveur de la formation politique créée par Me Abdoulaye Wade. "Je suis entré au PDS durant les durs moments de braise, entre 1977 et 1978. Je faisais partie de la jeunesse avant-gardiste dans le combat démocratique", rappelle-t-il, sur un ton à la fois ferme et nostalgique."Je suis le doyen des libéraux à Kaffrine. 

Je m’étais pleinement investi à côté de l’opposant Wade au milieu des années 70", clame Ousmane Kane, le visage maltraité par des rides faisant apparaitre des joues creuses surplombées par deux bouts de pommettes.Selon lui, il n’était pas donné à n’importe qui de soutenir à l’époque Me Wade. "J’ai été confronté à toutes sortes de difficultés durant ces années de compagnonnage avec le fondateur du PDS. J’ai été le seul jeune à oser prendre la parole lorsque notre leader était de passage dans le Ndoucoumane", se rappelle celui qui se présente comme le fils du parti libéral."Un nommé Baye Samba Ndao fut le premier responsable à recevoir Abdoulaye Wade à Kaffrine, c’était en 1976. Après lui, Adja Ndèye Thiobane, en tant que première responsable départementale des femmes du PDS, avait reçu Me Wade avant les années 80", a expliqué M. Kane.

"Ces deux personnes sont décédées avant l’alternance (mars 2000), elles n’ont pas connu Wade au pouvoir, ce qui me confère le titre de doyen des libéraux dans tout le Ndoucoumane, parce que si Samba Ndao et Mme Thiobane étaient respectivement le père et la mère du PDS, moi j’en suis le fils naturel à Kaffrine", a-t-il dit."Je suis le baromètre du PDS dans cette localité. Tous ceux qui s’agitent et qui réclament le titre de responsable local, c’est moi qui les ai incités à militer dans le Parti démocratique sénégalais", tonne-t-il avec un regard et des gestes qui en disent long sur sa sincérité.

Agé de plus de 60 ans, marié et père de six enfants dont une fille, Ousmane Kane se dit marginalisé dans la vie politique au niveau local, une décennie environ après l’arrivée du PDS au pouvoir en mars 2000. Après une trentaine d’années de lutte dans le PDS, il dit attendre toujours que ses efforts soient récompensés."Aujourd’hui, je n’arrive pas à joindre les deux bouts avec ma famille. Il s’y ajoute que mon grand frère est décédé et que toute sa famille est sous ma responsabilité. Quand je regarde dans le rétroviseur, je dis que je ne mérite pas cette galère dans laquelle je suis condamné à vivre", confie-t-il avec un brin de tristesse sur le visage, le corps enveloppé dans un tee-shirt qui cache mal ses membres chétifs.

"C’est à la suite des élections locales de mars 2009 que le parti m’a récompensé. Le Conseil régional a décidé de faire de moi le gardien des locaux de l’institution. Mais comment le salaire d’un pauvre gardien peut faire vivre deux familles ?", s’interroge le vieux militant libéral, l’air désolé."Rien que la maigreur de mon corps, renseigne amplement que je baigne dans le mal-vivre et la pauvreté la plus extrême, alors que pendant ce temps, les néolibéraux qui se disent députés, sénateurs et autres ministre croulent sous le luxe", a encore déploré Ousmane Kane.Il ajoute : "A part Babacar Gaye (président du Conseil régional) qui m’a recruté pour ce poste de gardien, seul le ministre Aliou Sow m’a une fois offert 600 mille francs CFA. 

Compte tenu de mon passé dans le parti, je mérite largement plus que ces miettes".Il a dit que sa seule consolation réside dans l’amitié qui le lie à l’une des figures de la jeunesse du parti. "Mon vrai ami dans le parti c’est Modou Diagne Fada (actuel ministre de la Santé). D’ailleurs, un des mes fils porte son nom et il me téléphone assez souvent", relève-t-il."Pendant les grands évènements familiaux comme la Tabaski, Fada m’envoie toujours un mouton et une enveloppe, lui au moins il est reconnaissant, même s’il peut mieux faire pour me sortir de la galère", se console celui qui se considère comme le baromètre du PDS à Kaffrine.