Le monde se donne rendez-vous au Sénégal : Le pouvoir de Wade brille par son absence

Le Forum social mondial organisé au Sénégal a officiellement démarré hier par une grande marche pacifique dans les rues de la capitale. Fait étonnant : il n’y avait pas une seule autorité sénégalaise ni au début encore moins à l’arrivée des différentes caravanes à l’Ucad. Suffisant pour que le président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho) se désole de ce manque de courtoisie vis-à-vis d’illustres hôtes étrangers. ‘Ils ne savent pas lire les changements qui se profilent à l’horizon du 21ème siècle concernant les relations des peuples avec leurs propres autorités, leurs propres pouvoirs. Ces changements qui vont affecter les relations internationales avec l’Afrique’, objecte Alioune Tine. Il cite les dictateurs qui étaient adulés et soutenus hier par les occidentaux eux-mêmes avant d’être, aujourd’hui, lâchés sans état d’âme par ces derniers, à l’image des présidents Ben Ali de la Tunisie et Moubarak de l’Egypte.

Pendant ce temps, l’ancien secrétaire général du Parti de l’indépendance et du travail (Pit), Amath Dansokho, se dit nullement surpris de cette absence des tenants actuels du pouvoir. Pour lui, le programme d’Abdoulaye Wade, c’est le développement du libéralisme. ‘Abdoulaye Wade lui-même dit qu’il n’est pas libéral. Il dit qu’il est néolibéral. C’est-à-dire la fraction la plus réactionnaire des libéraux ; c’est cela son idéal’. ‘Il a tué les secteurs de l’éducation et de l’agriculture’, peste Dansokho. Et de préciser : ‘C’est écrit noir sur blanc dans son programme que nous, pôle de gauche, avons rejeté avec Bathily, Landing et les autres’.

Amath Dansokho poursuit en affirmant que la conviction profonde du président Wade demeure le libéralisme. Autrement dit, explique-t-il, ‘celui qui n’a pas d’argent n’a qu’à mourir. Celui qui ne peut pas voler les ressources publiques n’a qu’à mourir’. Pour lui, le président de la République a fabriqué aux Sénégalais une démocratie artificielle en prenant les ressources publiques, en les distribuant comme il le veut. ‘Comment voulez-vous qu’il vienne ici ?’, s’interroge-t-il avant de certifier que ‘c’est lui-même (Wade) qui a dit au responsable du comité d’organisation du Forum social mondial qu’il est libéral néo-conservateur’. Un aveu de Me Wade que l’ancien leader du Pit prend très au sérieux en concluant que Wade n’a, donc, pas sa place à la marche. Mais, avertit Dansokho, ‘comme il s’est lui-même exclu, il verra bientôt ce que cela va lui coûter’.

Tournant en dérision ces grands absents de la marche du Forum social mondial, qui s’est terminée au Campus universitaire de Dakar, le chef de file de l’Alliance des forces du progrès (Afp), Moustapha Niasse, estime que les autorités sénégalaises actuelles ont une phobie de tout ce qui est université. ‘Elles ont une phobie physique de l’espace universitaire. Elles voient dans les étudiants des êtres extraterrestres, spécialisés dans les jets de pierres et qui leur versent de l’eau chaude’, analyse le leader politique. Mais, pour Niasse, cela ne suffit pas pour justifier une telle discourtoisie des autorités sénégalaises. ‘Il y a un chef d’Etat. Il eut fallu qu’il eût ici des autorités sénégalaises qui accompagnent le président Evo Morlez de la Bolivie, et le représentant du président Lula du Brésil, mais il n’y avait personne’, souligne-t-il pour le dénoncer.