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Politique

Mme NGONE NDOYE, PRÉSIDENTE DE LA COMMISSION SANTE DU SÉNAT : « Accélérer la Loi pour le dépistage prénuptial »

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Mme NGONE NDOYE, PRÉSIDENTE DE LA COMMISSION SANTE DU SÉNAT : « Accélérer la Loi pour le dépistage prénuptial »

Présidente de la commission Santé, Population, Affaires sociales et Solidarité nationale du Sénat, Mme Ngoné Ndoye désapprouve toute stigmatisation contre les porteurs du Vih-Sida et les travailleuses du sexe. Soulignant que le Sénat s’est engagé dans la prévention contre la pandémie, elle dit être favorable à l’instauration du dépistage prénuptial. C’est pourquoi, elle prône une accélération de la Loi sur le Vih-Sida.

Mme la sénatrice, la Journée mondiale de lutte contre le Sida a été célébrée le 1er décembre. Quelle importance le Sénat, à travers la commission Santé, accorde-t-il à cette journée ?

Le Sida fait beaucoup de ravages en Afrique. En plus d’être une pandémie extrêmement grave, le Sida a commencé à se féminiser. Au début, pour sept hommes, deux femmes portaient le virus du Sida. Mais aujourd’hui, il y a trois femmes pour un seul homme. Ça veut dire que la femme est de plus en plus vulnérable. Les femmes ont besoin beaucoup plus d’attention, de protection. Si je parle de femmes, je fais allusion à celles qui sont au foyer, aux travailleuses du sexe qu’il ne faut surtout pas stigmatiser. Il faut aider ces travailleuses du sexe. Au Sénégal, des avancées notoires ont été notées. Même le bailleur recule un peu par rapport à son investissement, parce que le Sénégal commence à maîtriser le phénomène, mais on n’est jamais trop certain avec cette maladie. On n’est jamais trop prudent. Il faut toujours continuer.

La commission Santé, Population, Affaires sociales et Solidarité nationale du Sénat que j’ai l’honneur de présider depuis septembre 2009 a fait de la lutte contre la stigmatisation son cheval de bataille. Je suis Présidente du conseil d’administration de l’Association « Awa » qui lutte contre l’expansion du Sida chez les femmes, particulièrement les travailleuses du sexe. Nous avons pris sur nous de visiter beaucoup de centres de Santé. Mais nous avons surtout visité les malades du Sida. Nous remercions et félicitons le chef de l’Etat qui, grâce à une politique très hardie, donne gratuitement les antirétroviraux à toux ceux qui en ont besoin. Au moins, le traitement qui existe actuellement sur le Sida est mis en place au Sénégal et est gratuit.

Est-ce que ces visites vont se traduire par des actions concrètes ?

Le deuxième volet dont le Sénat est en train d’explorer, c’est la prévention et le plaidoyer auprès des bailleurs de fonds. La lutte contre le Sida est beaucoup suivie par le Cnls, l’Onusida et d’autres associations comme la Swaa. Il faudrait qu’on aille plus loin avec le ministère des Affaires sociales, de la Solidarité nationale et le ministère de la Santé pour extraire toutes nos sœurs qui sont dans la rue, toutes les travailleuses du sexe de leur environnement. Il faut qu’on trouve les voies et moyens pour qu’elles n’aillent plus chercher le pain dans la rue, mais qu’elles parviennent à résoudre leurs difficultés par le biais d’un travail rémunéré, décent et respectable.

Comment ?

En leur permettant d’avoir de Petites et moyennes entreprises. Une travailleuse du sexe ne sort pas par volonté ou par plaisir. Elle s’investit dans ce métier par besoin conjoncturel. La stigmatisation ne fait que renfermer les travailleuses du sexe dans leur milieu. Je pense qu’il faudrait autant pour les femmes que pour les homosexuels que la stigmatisation soit bannie. Il faut que les gens accompagnent ces femmes à tourner le dos à la prostitution. Derrière ces travailleuses du sexe, il faut savoir qu’il y a des enfants qui doivent aller à l’école, avoir des diplômes et réussir leur vie. Et si nous les stigmatisons, comment ferions-nous pour atteindre leurs enfants. C’est pour cela que, de concert avec l’association « Awa », nous avons initié un programme pour accompagner ces enfants. Quand ils seront diplômés, nous essayerons de trouver des débouchés pour qu’ils apportent une réponse aux difficultés de leurs parents. Le président du Sénat a pris une nouvelle démarche dans la prise en compte des préoccupations des populations par l’institution. La commission n’est plus là que pour faire des propositions de Loi ou pour voter et amender des projets de Loi. Elle va maintenant vers les populations qui détiennent l’information pour mieux comprendre et réagir afin d’aider ces couches sociales plutôt que des laisser subir la pandémie.

Cette mission pourrait réussir avec les professionnelles, mais de plus en plus des mineures se lancent dans la prostitution. Cela ne complique-t-il pas le travail ?

Nous travaillons avec l’association « Awa ». C’est une organisation où les membres vont dans les familles des travailleuses du sexe, discutent avec elles. L’association noue une complicité et des relations de confiance avec les travailleuses du sexe. Les membres sont en train de réussir l’usage obligatoire du préservatif avant d’avoir des rapports sexuels avec une travailleuse du sexe. Avec eux, de plus en plus, les femmes n’acceptent plus d’être violentées par certains hommes vicieux. Les gens sont en train de faire un travail important à travers le Sénégal. C’est pourquoi, les membres de l’association ont besoin des législateurs pour que ces actions soient beaucoup plus poussées et beaucoup plus visibles. Les travailleuses du sexe sont une frange de la société qui est très consciente du danger qui les guette. Il faut les accompagner et les aider à s’extirper de l’environnement dans lequel elles évoluent. C’est pourquoi les associations de lutte sont extrêmement importantes pour la bonne marche de ce que nous sommes en train de faire au Sénat, sous l’impulsion du président Pape Diop.

Mais est-ce que le Sénat est armé pour mener le plaidoyer ?

Le docteur Ibra Ndoye (Ndlr : secrétaire exécutif du Cnls) nous a sensibilisés. Nous sommes aujourd’hui des agents de plaidoyer. Nous devons faire le plaidoyer du haut de notre instance. Le docteur nous a renforcés en capacités pour que nous puissions faire le plaidoyer. Le Sénat a commencé à faire ce qu’il doit mener avec la Swaa qui est une association qui date de 21 ans. Six braves femmes africaines, qui avaient senti le danger que pourrait représenter la maladie sur les femmes du continent, ont créé cette association dont la présidence est occupée par le Sénégal, en la personne de Mme Aissatou Gaye Diallo. Je me réjouis de la décision du président de la République d’accorder à la Swaa l’état de siège.

Cette association avait invité le Sénat autour du thème « Violences faites aux femmes et Sida ». Les femmes sont trois fois plus nombreuses que les hommes à avoir la maladie. Nous sommes en train de voir comment mieux protéger la femme, parce que le Sénégal est très en avance sur cette question. Nous avons ratifié toutes les conventions qui protègent les femmes. Ce qu’il y a, c’est un problème d’application et nous sommes en train de nous battre pour ça. Je ne dirai pas qu’il n’y a pas de violence faites aux femmes au Sénégal, je crois que tout ce qui doit protéger la femme pour que cela n’existe pas a été mis par le législateur sur la sellette.

Que faut-il faire pour sortir les mineures de ce bourbier ?

Dans la lutte contre le Vih-Sida, il y a l’aspect violence qui conduit au virus de cette pandémie. Si vous parlez de mineures, vous parlez de pédophilie, vous parlez de violence faite à des vulnérables. C’est pourquoi, nous ne devons pas avoir peur d’aborder le sujet. Ces mineures, c’est la quête de l’argent qui les a menée dans la prostitution. Après avoir souffert, après avoir contenu les assauts d’une personne, ces enfants reçoivent en contrepartie de l’argent. C’est pourquoi, il faut trouver des débouchés, garder les enfants à l’école. Il faut les suivre et aller jusque vers le mal, essayer de le comprendre afin de trouver des solutions. La pédophilie est un vice et ce sont des adultes qui ont ce vice. Ce sont des adultes qui embarquent les enfants. Il faut donc que nous protégions cette couche vulnérable pour qu’elle ne tombe pas dans l’escarcelle de ces vieux. Ce que vous ignorez aussi, c’est que les vieilles travailleuses du sexe sont devenues des proxénètes. C’est un métier qui n’a pas de retraite et puisqu’il n’y a pas de retraite, ces vieilles femmes vont aller collecter quatre ou cinq filles qui sont mineures, commencer à leur apprendre le métier, les garder chez elles dans des chambres clandestines. Si on avait réussi à tirer cette vieille femme pendant qu’elle était jeune dame et trouver pour elle une Petite et moyenne entreprise, elle n’aurait pas jeté en pâture d’autres jeunes encore. Je crois qu’il faut oser aller au fond du problème, essayer de l’élucider plutôt que d’avoir un jugement sur les uns et les autres.

Au plan législatif, que faut-il faire pour éviter la stigmatisation ?

Il faut prendre contact avec les populations. L’idée du président du Sénat consistant à demander à ses collègues de quitter les bureaux, faire des descentes chez les populations et les écouter, est ingénieuse. Ça nous permet de savoir sur quelle ficelle tirer pour trouver la solution. Le président nous a instruits de ne pas écouter de manière vague, mais d’aller voir la sage-femme, le malade, celui qui est tenté afin de sortir les meilleures propositions de Loi à proposer à nos institutions. C’est ce qui nous amenés à la Loi sur le Vih-Sida. La commission de l’Assemblée nationale et la commission du Sénat se sont réunies autour du Cnls pendant deux jours d’atelier financé par Onusida avec le Pnud. Au sortir des travaux, nous avons passé en revue la Loi sur le Vih-Sida qui parle de tous les problèmes que je viens d’énumérer. Cette Loi parle même du mariage précoce. L’âge du mariage pour l’homme est déterminé, mais l’âge pour la femme ne nous arrange pas. Il y a beaucoup de problèmes à l’intérieur. Aujourd’hui, lorsqu’un homme et une femme se marient, on devrait passer le test. Si l’homme ne passe pas le test, la femme peut être une femme au foyer, mais l’homme peut venir amener la maladie vers cette épouse, surtout ceux qui sont à l’extérieur. L’homme peut avoir trois à quatre épouses, leur donner le virus et vivre à l’extérieur. Il faut qu’on revoie cette Loi. Nous sommes en train de l’éplucher pour trouver une solution pour qu’avant le mariage, les gens puissent faire le dépistage. C’est extrêmement important. Ce n’est pas un manque de confiance ou de respect, mais c’est parce que chacun a fait sa vie avant le mariage. Un homme qui a deux femmes et qui doit prendre une troisième doit faire le test, même pour que la femme qui arrive dans le foyer n’y amène pas le Sida. Au de-là du plan législatif, nous insisterons sur la sensibilisation. C’est pourquoi, il y a, aujourd’hui, des sorties assez nombreuses des commissions du Sénat, parce que le président a voulu que nous allions vers l’information réelle.

Comment faire pour vaincre les réticences à propos du dépistage volontaire ?

C’est un problème culturel. Vous savez comment fonctionne la « Sutura » au Sénégal. Le fait de se protéger parce que l’on pense que si l’on parle de son problème, on est dans la rue. Nous devons avoir notre approche. C’est pourquoi, nous devons avoir des relais. C’est-à-dire des femmes volontaires qui voient leurs sœurs dans les bars afin que ces femmes se confient à elles. Une heure est même choisie pour les sages-femmes qui s’occupent de ces femmes. C’est extrêmement sensible. Il faut mettre le respect qu’il faut vis-à-vis de ces personnes. Chaque vie mérite respect. Nous voulons donner ce respect afin de les aider à sortir de leur situation. C’est une sorte de communication très humble que nous développons pour les aider à sortir de ce bourbier.

A côté des travailleuses du sexe, il y a les homosexuels que d’aucuns considèrent comme une bombe sociale...

Il y a aussi une association qui s’appelle « Adama » que je ne connais pas, qui s’occupe aussi d’homosexuels. Notre religion n’accepte pas l’homosexualité comme la plupart des religions révélées. Mais notre rôle, ce n’est pas de croire ou de ne pas croire. Nous devons nous occuper des droits humains. Chaque individu a droit à la vie, à la santé et à la sécurité. Pour se protéger, il faut justement sensibiliser et protéger ces porteurs potentiels du Vih-Sida. Il faut leur faire comprendre que pour leur vie et pour la vie des autres, ils doivent faire attention. Nous ne portons pas de jugement sur leur homosexualité, parce que c’est leur problème, mais nous portons un jugement sur leur santé. C’est notre devoir de les protéger. Les droits humains font, qu’aujourd’hui, le législateur a le devoir de s’occuper de tous les Sénégalais. C’est pourquoi, nous devons aussi protéger tous ces homosexuels et nous battre pour que la maladie ne se propage pas dans notre société. Il y a des homosexuels identifiés, mais qui partagent leur vie avec d’autres gens que nous n’avons pas identifiés. Ils peuvent être des gens du coin et lorsqu’ils retournent dans leurs foyers, ils se mettent avec leurs femmes.

Quelle solution préconisez-vous contre les violences faites aux femmes ?

Si on prend l’excision en exemple, cette pratique est un phénomène culturel dans certains milieux. Le changement ne se fait pas du jour au lendemain. J’ai entendu récemment le président Obama dire que la démocratie ne s’importe, ni ne s’impose à un peuple. C’est une maturité. C’est un peuple qui s’assume et qui atteint un seuil de maturité. C’est une étape de l’évolution d’un peuple. Je pense qu’à force d’expliquer, de montrer pourquoi ce n’est pas bien de violenter une femme, d’exciser une femme, que les peuples vont arriver à l’accepter. Certes, il faut des mesures répressives ; mais pour moi, tout est culturel ; je ne suis pas très favorable à l’usage de la force. Je suis pour le dialogue.



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