Depuis quelques semaines, il y a une sorte de jeu du chat et de la souris entre la majorité présidentielle et le parti ou l’ex-parti d’opposition Pastef, plus particulièrement entre le président Macky Sall et son farouche opposant Ousmane Sonko. Jusqu’ici, l’opinion attend d’être éclairée sur ce qui se passe entre ces deux hommes.
Pour l’instant, ceux qui en parlent jouent sur les mots. Dialogue, concertation, décrispation, pour certains, négociations, deal, pour d’autres. Et le résultat est, semble-t-il, cette loi d’amnistie examinée ce mercredi à l’Assemblée nationale mais aussi le report de la présidentielle et la réouverture du processus électoral pour permettre à d’autres candidats de pouvoir participer, comme le précise d’ailleurs l’exposé des motifs de la loi d’amnistie.
Du côté de Pastef, on affirme publiquement qu’on n’est demandeur de rien et que Sonko et ses partisans ‘’victimes’’ de la violence d’Etat depuis des années ne sauraient être les bénéficiaires d’une amnistie. Mais en même temps, cette formation est accusée de souffler le chaud en public et le froid dans les coulisses. Une chose est sûre, un contact direct ou indirect entre Macky Sall et Ousmane Sonko a eu lieu, comme l’ont déjà dit Atépa et Alioune Tine, confirmé par la réponse du président Macky Sall, lors de son interview avec une partie de la presse nationale.
Reste à savoir ce qu’ils se sont dit et sur quoi ils sont d’accord. Et c’est là que réside le danger pour Ousmane Sonko. En réalité, c’est l’opposant qui a le plus à gagner ou à perdre de cette situation. Macky Sall s’en va, même s’il a la possibilité de revenir plus tard. Mais pour l’instant, c’est un acteur politique en phase d’être conjugué au passé. Tout le contraire de Sonko qui non seulement est en début de carrière, mais bénéficie d’une forte popularité.
C’est pourquoi le leader des patriotes doit faire très attention en ces moments ; il marche sur des braises et des œufs. Jusqu’ici, ses partisans affirment qu’il n’a mandaté personne pour parler avec Macky Sall. Ses hommes soutiennent qu’ils sont contre la loi d’amnistie qui ne profite qu’à Macky Sall et ses hommes de main.
Seulement, on apprend que les députés de Pastef se sont abstenus lors des travaux en commission. Ce qui sème déjà le doute sur leur position. Mais les choses ne tarderont pas à être claires, surtout avec un vote à main levée devant les caméras. Ce matin, Guy Marius Sagna et ses camarades ont exprimé un rejet catégorique de la proposition devant le pupitre de l’hémicycle. La logique voudrait donc qu’ils votent contre la loi à la place d’une abstention. Ce sera un argument de taille pour dire que Sonko n’est mêlé en rien à ce qui se trame.
Par contre, si Ousmane Sonko a un accord avec Macky Sall, il a intérêt à faire preuve de transparence avec les Sénégalais. L’opposant doit beaucoup apprendre de la carrière politique d’Idrissa Seck. A partir de 2005, le patron de Rewmi était l’opposant le mieux placé pour devenir président après Abdoulaye Wade. Mais ces ‘’deals’’ avec l’ancien président ont sérieusement érodé le capital sympathie dont il bénéficiait auprès des Sénégalais.
L’ascension politique du l’ancien PM et maire de Thiès a été freiné par ses tergiversations, son manque de constance vis-à-vis de Wade. Cette même tortuosité l’a amené à s'allier avec Macky Sall après être arrivé deuxième à la présidentielle de 2019. Aujourd’hui, il apparaît comme le symbole de l’inconstance sur la scène politique sénégalaise.
Or, Ousmane Sonko est à un tournant décisif. Il a déjà été critiqué pour s’être allié avec des hommes du système. Le Pds et Taxawu Sénégal en ont d’ailleurs profité pour l’affaiblir. En plus, en dépit du caractère politique de l’affaire Adji Sarr, le fait de s’être rendu à Sweet beauty lui a été fortement reproché et a donné une occasion inespérée à la majorité présidentielle.
Aujourd’hui, il doit plus que jamais faire attention. Sonko n’a jamais été guetté autant par le syndrome Idy. Une erreur supplémentaire dans ces circonstances pourrait lui être fatale. Il a donc intérêt à jouer franc jeu, comme Khalifa Sall l’avait fait au dialogue, malgré les critiques. Un leader a besoin d’assumer ses choix, même lorsqu’ils vont à l’encontre de la clameur populaire.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion