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Politique

Pape Diop (Président du Sénat) : Pourquoi nous avons perdu Dakar aux élections locales

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Pape Diop (Président du Sénat) : Pourquoi nous avons perdu Dakar aux élections locales
Deuxième personnalité de la République du Sénégal, le président du Sénat, Pape Diop, est catégorique : ‘Il n’y a pas de projet de dévolution monarchique du pouvoir au Sénégal’. Pour preuve, il n’est au courant d’aucune modification de la Constitution allant dans ce sens. Et puis, Pape Diop se veut clair dans l’entretien qu’il nous a accordé en marge de la troisième conférence de l’Union interparlementaire (Uip) ouverte lundi et qui s’achève ce mercredi à Genève : ‘C’est impossible au Sénégal’. Il y aborde également les raisons de sa défaite aux élections locales, le rôle du Sénat auprès des populations....

Wal Fadjri : Le président de la République a déclaré qu’il n’avait pas de projet de dévolution monarchique du pouvoir allant dans le même sens que son fils le ministre Karim Wade qui disait que ‘le Sénégal ne s’hérite pas’. En tant que deuxième personnalité de la République, n’y a-t-il pas vraiment un projet de ‘monarchisation’ caché ?

Pape Diop : Je ne le pense pas. Certes, cela a fait l’objet de beaucoup de discussions au niveau des populations. Mais un projet de dévolution monarchique du pouvoir doit reposer sur beaucoup de choses. Il doit y avoir un projet de révision constitutionnelle pour mettre en selle quelqu’un, à l’image de l’introduction dans notre loi fondamentale de l’article 35 du temps de Senghor pour laisser à la place au président Diouf. Mais un tel projet n’existe ni à l’Assemblée ni au Sénat. D’ailleurs, il faut remarquer qu’au Sénégal, cela est impossible. A l’état actuel de la démocratie au Sénégal, personne ne peut penser que notre pays est capable d’aller vers cette situation. C’est pourquoi, au vu de ce qui précède, je m’inscris en faux contre l’existence d’un tel projet. Je suis quand même responsable au Parti démocratique sénégalais et un proche collaborateur du président de la République et je peux vous assurer que je ne suis pas au courant d’un tel projet.

Voulez-vous dire que celui qui devra diriger le Sénégal devra nécessairement passer par des élections ?

Mais c’est irrémédiable. Personne ne peut accéder à la magistrature suprême au Sénégal sans passer par les urnes. C’est impossible et tous les Sénégalais s’accordent sur ça. Par conséquent, il faut que les gens sachent raison garder. Demain, celui qui devra diriger le Sénégal devra le faire en passant par le suffrage universel.

Votre candidat déclaré, le président Abdoulaye Wade, peut-il remporter la présidentielle de 2012 ? Si oui comment ?

Comment ? Mais c’est par les réalisations effectuées et qui sont aujourd’hui visibles par tous les Sénégalais. Nos concitoyens ont vécu une situation d’avant alternance qu’ils peuvent comparer avec cette période actuelle depuis que le président Wade dirige le Sénégal. Les changements sont énormes dans tous les domaines. Au niveau de la santé, ce qui s’est fait de 2000 à maintenant, on ne va pas le citer. Dans le domaine des infrastructures, il n’y a pas photo. Il faut connaître le Sénégal pour savoir que ce que nous avons réalisé, personne ne l’a fait auparavant. Dans les autres domaines comme l’éducation, le Sénégal lui consacre 40 % de son budget. Tous les étudiants de l’Université de Dakar sont boursiers ou, en tout cas, ont une aide de l’Etat. C’est le même cas pour les étudiants qui sont à l’extérieur et envoyés par l’Etat. La situation que nous vivons est donc totalement différente de celle d’avant. Et les Sénégalais sont assez mûrs. Mais nous avons en face une opposition de salon qui bat campagne régulièrement à travers la presse. Mais ce qu’elle dit n’est pas l’avis de la grande majorité des Sénégalais. C’est pourquoi, je pense, que mon candidat gagnera dès le premier tour.

D’ailleurs, depuis quelque deux à trois mois, je sillonne, pour ma part, les différents quartiers et communes de Dakar pour organiser des rassemblements qui sont visibles à travers la presse écrite et les télévisions publiques comme privées. Partout où je passe, de grandes foules se forment et cela ne se passe pas pendant une période de campagne électorale. C’est ce qui est extraordinaire. C’est différent car, pendant la campagne, tout le monde peut drainer des foules mais pendant les moments qu’on croit les plus difficiles, j’arrive à drainer les populations qui viennent faire des témoignages sur les réalisations effectuées depuis l’alternance en 2000. C’est pourquoi, j’ai l’intime conviction que mon candidat va gagner au premier tour.

‘C’est la division de nos responsables, les tendances multiples qui existent dans les différentes localités du pays qui minent tous les efforts que fait le président de la République’

Pourtant, vous avez perdu la ville de Dakar lors des dernières élections locales. Vous avez vous-même été critiqué. Comment expliquez-vous dès lors votre défaite ?

Les Dakarois savent mieux que moi pourquoi j’ai perdu. Vous avez devant vous quelqu’un qui perd une élection comme la mairie de Dakar et qui en sort plus populaire, c’est extraordinaire. Je suis aujourd’hui plus populaire qu’avant, c'est-à-dire quand j’étais maire. Cela veut dire qu’il y a un phénomène qu’on n’arrive pas à expliquer jusqu’à présent. Aujourd’hui, la majorité des Dakarois reste collée à Pape Diop parce que tout le monde connaît mon bilan à la tête de la ville de Dakar. C’est un très bon bilan. Pour preuve, nous avons réussi dans toutes les communes de Dakar à créer un centre de santé. Avant mon installation comme maire de la ville, Dakar était confrontée à un sérieux problème d’infrastructures sanitaires. Il fut une période où une ambulance pouvait faire le tour de Dakar toute la journée, sans pouvoir trouver une place pour un malade. Aujourd’hui, dans toutes les communes, il y a un centre de santé moderne. J’ai également construit un centre de gériatrie moderne pour les personnes âgées, une clinique ophtalmologique moderne qui n’a rien à envier aux grandes cliniques d’Europe. Et dans les autres domaines, nous avons accompli des réalisations notables. C’est le cas avec l’éclairage public qui fut le point focal de notre campagne de même que l’éducation. Nous avons donc fait un très bon bilan qui fait qu’aujourd’hui les gens me disent : ‘Nous ne savons pas pourquoi nous avons voté pour Benno’ (Ndlr : le regroupement des partis d’opposition). A chaque fois, des milliers de personnes, notamment des jeunes, viennent nous dire : ‘Nous ne savions pas’.

Il y a également un phénomène que les gens ont analysé après. En effet, Dakar est composée de dix-neuf communes d’arrondissement. Et les votes sanction contre certains maires de commune ont eu une répercussion sur le décompte des voix au niveau de l’élection à la mairie de ville. Mais si, aujourd’hui, les élections locales étaient à reprendre, c’est sûr que le Pds va gagner. Et ça, les gens de Benno le savent. Il faut quand même signaler qu’une ville ou un pays ne se construit pas en 5 ans, c’est un travail de longue haleine. C’est un éternel recommencement. C’est pourquoi d’ailleurs, nous avons espoir pour les prochaines élections si les problèmes internes à notre parti sont réglés. C’est d’ailleurs la division de nos responsables, les tendances multiples qui existent dans les différentes localités du pays qui minent tous les efforts que fait le président de la République. En tout cas, si nous arrivons à régler les problèmes internes, nous allons gagner très facilement.

L’Assemblée nationale du Sénégal qui est l’autre mamelle de notre démocratie parlementaire, est en train d’auditionner les responsables du secteur énergétique suite aux coupures intempestives que dénoncent les populations. Alors qu’attend le Sénat ?

Nous avons, depuis quinze jours, une commission ad hoc mise sur pied par le Sénat et qui est en train d’auditionner les hauts fonctionnaires et les responsables des sociétés privées sur l’attribution de licences de téléphone au Sénégal. Des responsables de la société Sentel sont entendus. Récemment, une troisième licence a été attribuée, et nous avons également, dans ce domaine, commencé à auditionner pour savoir exactement les conditions d’attribution qui ont fait l’objet de beaucoup de supputations dans la presse. Le Sénat voudrait donc en savoir plus. C’est pourquoi nous travaillons sur ces dossiers et sur d’autres. C’est vous dire que l’Assemblée nationale et le Sénat sont complémentaires. Si l’un est sur un dossier, l’autre peut être sur un autre. Nous sommes censés être les représentants du peuple et à ce titre, à chaque fois qu’un problème surgit, nous montons au créneau pour éclairer la lanterne des populations pour qui nous existons.

Pouvez-vous nous dire l’intérêt que revêt la troisième Conférence de l’Uip pour laquelle vous êtes à Genève ?

L’Uip regroupe l’ensemble des Parlements du monde. Les thèmes que nous avons abordés cette année, comme à l’accoutumée, sont des sujets d’actualité. Nous avons ainsi discuté de la crise financière internationale, de l’évolution de la démocratie dans le monde et surtout en Afrique, de même que d’autres questions. Ainsi chaque président de parlement a pu donner son point de vue. En ce qui me concerne, j’ai plus spécifiquement parlé de l’articulation entre la liberté et le développement, deux paradigmes qui posent souvent problème dans les pays africains. En effet, beaucoup d’Européens pensent que nous ne pouvons pas articuler ces deux notions dans le bon sens, c’est-à-dire être des pays de démocratie et être performants. Pourtant, des pays africains ont démontré le contraire parmi eux, le mien, qui a fait des progrès extrêmement importants sur le plan démocratique. Le Sénégal n’a rien à envier aux grandes démocraties du monde. Nous avons une presse libre, dynamique, à l’image des grands médias des grandes démocraties. Nous avons également une société civile très dynamique qui fait tache d’huile en Afrique. Et en matière de développement, bien qu’étant parmi les pays les moins avancés du monde, le Sénégal a fait ces derniers temps des progrès remarquables qui sont appréciés de partout. C’est ce qui fait qu’entre le pain et la liberté, j’ai préféré le pain et la liberté en même temps parce que l’articulation est bien possible.


Propos recueillis au Palais des Nations Unies à Genève par El Hadji Gorgui Wade NDOYE (ContinentPremier.Com)



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