C’est mardi dernier que Abdoulaye Sow a signifié, vers 21 heures, sa démission du ministère du Budget au Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye qui l’a reçu au 9e étage du Building administratif. Le chef du gouvernement a insisté pour connaître les raisons de cette démission, mais Abdoulaye Sow s’est réfugié dans le silence. Tout juste mentionne-t-il dans sa lettre avoir pris sa décision pour « convenance personnelle ». N’empêche, vendredi dernier, il avait été reçu par le président de la République en présence du chef du gouvernement. On ignore pourquoi, mais c’est suite à cette rencontre qu’il a arrêté sa décision. Abdoulaye Diop, briefé depuis l’étranger où il se trouvait par celui qui le considère comme son « seul ami au monde » s’est d’ailleurs rendu tôt dans la matinée du lundi au Palais pour une audience avec le Président Wade.
Le Pm insiste, Abdoulaye Sow refuse de donner des explications
Vendredi dernier déjà, les milieux informés étaient au courant du départ imminent du désormais ancien ministre du Budget, Abdoulaye Sow. Reçu ce jour-là par le président de la République en présence du Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, il est ressorti de l’audience le visage fermé. Que s’était-il passé ? Mystère et boule de gomme ! En tout cas, Abdoulaye Sow a aussitôt pris langue avec le ministre d’Etat, ministre de l’Economie et des Finances Abdoulaye Diop, son « seul ami au monde », comme l’explique une source autorisée. C’est donc en « parfait accord » avec l’argentier de l’Etat qu’il a décidé de quitter le gouvernement. Ce qu’il a fait depuis mardi à 21 heures. Quelques heures après le conseil présidentiel sur le Fesman, il a sollicité et obtenu une audience avec le Premier ministre. Une fois devant le chef du gouvernement, il lui a expliqué, lettre à la main, son intention de démissionner de ses fonctions. Le chef du gouvernement lui demande les raisons qui justifient sa décision. Mieux, selon nos sources, le Pm est même revenu sur l’audience du vendredi pour demander à son interlocuteur si « c’était à cause de ça » qu’il partait. Abdoulaye Sow soutient que non, et précise, comme il l’a mentionné dans sa lettre, que cette démission obéissait à des « convenances personnelles ». Souleymane Ndéné Ndiaye prend acte et informe le président de la République qui signe quelques minutes plus tard le décret N°2009-548 du 09-06-2009 mettant fin aux fonctions d’un ministre, nommant un ministre et fixant la composition du gouvernement. La nouvelle ne sera rendue publique qu’hier.
Un « grand ami » de Karim et de Ibrahima Sarr au Budget
Le même décret qui constate la démission de Abdoulaye Sow donne le nom de son remplaçant : Abdoulaye Diop. Cet homonyme du ministre des Finances était son directeur de cabinet. A la suite de la nomination de Hadjibou Soumaré comme Premier ministre en 2007, l’argentier de l’Etat, alors en bons termes avec l’ancien ministre du Budget, avait demandé à Abdoulaye Diop d’aller « aider » Hadjibou Soumaré. C’est ainsi que ce dernier occupera les fonctions de directeur de cabinet du Premier ministre Hadjibou Soumaré. Me Souleymane Ndéné Ndiaye, nommé à la Primature, demande à Abdoulaye Diop de rester en place, le temps que la procédure de nomination de son successeur arrive à terme. Celui que le nouveau Pm a choisi comme directeur de Cabinet est un magistrat qui était en service à la Cour suprême et il faut attendre l’avis de sa hiérarchie pour finaliser sa nomination. Jusqu’à une certaine époque donc, Abdoulaye Diop était proche de son homonyme, l’argentier de l’Etat. Mais les temps ont changé. Aujourd’hui, renseignent des sources, il a deux « grands amis » : Karim Wade et Ibrahima Sarr, ancien ministre du Budget. D’ailleurs hier, des informations selon lesquelles Mamadou Abdoulaye Sow a démissionné, parce que le fils du Président lui aurait demandé de payer les salaires des travailleurs d’Air Sénégal international (Asi), ont circulé. Ce que contestent certains puisque les travailleurs d’Asi ont été payés à travers un compte ouvert dans les livres de la Banque islamique du Sénégal (Bis) et alimenté avant-hier par virement effectué par Asi. Pourquoi donc Abdoulaye Sow a-t-il démissionné ? Seule certitude du moment : quand il a exposé ses raisons à son « seul ami au monde », ce dernier a été convaincu, même s’il a cherché par la suite à éviter le clash entre Sow et le Président.
Depuis 7 ans, il a refusé le ministère du Budget
Pour ceux qui connaissent bien Mamadou Abdoulaye Sow, cette démission n’est pas une surprise. Témoignage d’une source proche du ministère des Finances : « Ce gars-là a des principes. C’est un homme d’honneur, très rigoureux. Quand, par exemple, son nom est apparu, en tant qu’ancien directeur du Trésor, dans le rapport de l’Inspection générale d’Etat sur les dépenses hors Budget, il était dans tous ses états. Il est tellement rigoureux que même ses collaborateurs le jugent parfois difficile. Homme de caractère, il n’accepte pas qu’on lui crie dessus et qu’on lui manque de respect ». Depuis sept ans, il a refusé le poste de ministre du Budget. S’il avait accepté, Hadjibou Soumaré n’occuperait sans doute jamais ce poste en 2001. On dit d’ailleurs que c’est Abdoulaye Diop qui lui a tordu le bras en le faisant nommer sans l’avoir consulté. C’est dire la proximité qui existe entre les deux personnalités. C’est la raison pour laquelle, à son retour de voyage, le ministre des Finances qui avait été auparavant briefé, s’est rendu lundi très tôt au Palais où il a été reçu par le Président Wade. Apparemment, cette audience n’a pas eu d’effet sur la décision déjà arrêtée de Sow. Sorti de l’Enam en 1979, il roule sa bosse au Trésor depuis 30 ans. Les finances n’ont plus de secret pour lui. En démissionnant, il sait que des gens comme lui ne chôment pas.
Quel avenir pour Abdoulaye Diop ?
Cela dit, des sources informées pensent qu’encore une fois, c’est Abdoulaye Diop qui est fragilisé, même si Abdoulaye Sow, en ce qui le concerne, a pris l’initiative du départ. Il n’en demeure pas moins, renseignent des sources, que si Abdoulaye Diop a été convaincu par les « arguments » de l’ex-ministre du Budget, c’est que lui-même est « très en colère » depuis plusieurs mois. Cependant, sans entrer dans les détails, des sources renseignent que le ministre des Finances, contrairement à Abdoulaye Sow, ne compte pas démissionner. Pas pour le moment en tout cas. Il attend qu’on « le limoge » après les manoeuvres tous azimuts notées depuis plusieurs mois. Avec Mamadou Abdoulaye Sow, Abdoulaye Diop avait mené, de l’interne, la « résistance ». Pour preuve, à la suite du rapport de l’Ige sur les dépassements budgétaires, Abdoulaye Sow avait adressé une correspondance à Nafi Ngom Keita pour lui signifier que le budget de la structure de contrôle et de vérification allait être délesté de 100 millions de FCFA. L’histoire retiendra qu’à la suite de l’affaire dite des dépassements budgétaires, c’est Abdoulaye Sow qui avait rédigé le mémorandum transmis au Fonds monétaire international (Fmi) dans lequel l’Etat du Sénégal s’engageait à procéder à plusieurs correctifs. Il ne savait, sans doute, pas en ce moment que le rapport de l’Ige sur ces dépenses allait engager sa responsabilité comme directeur du Trésor, poste qu’il occupait avant d’atterrir au ministère du Budget.
C.M. G
Mamadou Bousso Lèye délesté par une cohérence budgétaire Le décret N°2009-548 du 09-06-2009 a permis au chef de l’Etat et à son Premier ministre de faire quelques retouches. Ainsi les Langues nationales, jusque-là logées au ministère de la Culture reviennent désormais à Kalidou Diallo. La raison de ce changement ? Le Président estime plus cohérent de rattacher les Langues nationales au ministère de l’Enseignement Préscolaire, de l’Elémentaire et du Moyen Secondaire. En effet, le budget alloué aux Langues nationales se trouve logé au ministère de l’Education. Et puis, ce sont toujours des enseignants et non les acteurs culturels qui sont concernés par ce volet qui quitte désormais le ministère de la Culture.
C.M.G
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