Mountaga Diop, enseignant à l’INEPS sur le dopage : «En utilisant ces produits, on sollicite le cœur au-delà de ses possibilités»

Docteur en physiologie de l’effort, Mountaga Diop a fait ses études à Institut National Supérieur de l’Education Populaire et du Sport (INSEPS). Il va ensuite se spécialisé en physiologie de l’effort en France. Son travail consiste à voir comment fonctionne le corps lors de l’activité physique. Il revient dans cet entretien sur les conséquences du dopage sur l’organisme.  

On remarque de plus en plus que le dopage est évoqué dans le milieu sportif. A quoi consiste-t-il réellement ?  

Le dopage est un sujet d’actualité, le sport est aujourd’hui une activité physique de compétition. L’objectif c’est la recherche de performance, en essayant de se surpasser. Est considéré comme dopant, tout produit prohibé et qui peut aider l’athlète à se surpasser. Il y a des substances qui, s’ils sont ingurgités par l’athlète, peuvent surmonter sa fatigue. D’autres produits servent à augmenter la masse musculaire. Tous ces produits sont dangereux. Certains agissent sur le fonctionnement cardiaque. Donc vous comprenez facilement que c’est dangereux.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?

Il y a les stéroïdes anabolisants considérés comme des drogues qui fonctionnent comme la testostérone. C’est une hormone qui permet aux athlètes, surtout ceux qui font des épreuves de force, de vitesse, d’augmenter leur masse musculaire. Ce sont des produits très dangereux. Nous avons noté qu’entre 1992 et 1993, il y a eu près de 300 000 Américains qui utilisaient ces produits. Nous prenons l’exemple des USA parce qu’ils ont les moyens de faire des études sur le nombre de pratiquants. Imaginez actuellement l’ampleur de ce phénomène. Au Sénégal, il n’y a pas d’études très larges qui ont été faites. On parle du dopage dans le domaine de la lutte et même chez certaines personnes qui ne pratiquent pas un sport de haut niveau mais qui veulent une meilleure présentation de leur corps. On en parle aussi dans le milieu de la mode pour se faire un peu de muscle. Ces anabolisants d’après les études d’un chercheur peuvent rendre agressif. D’un autre côté, la personne a plus de résistance et de compétitivité. Ces produits permettent aussi de supporter l’endurance quelque soit l’intensité des entrainements auxquels la personne est soumise. Ces produits dopants sont des imitations de produits sécrétés par l’organisme. Ceux qui fabriquent ces produits s’inspirent de l’hormone de croissance qu’ils modifient pour créer un produit qui lui ressemble.

La lutte sénégalaise n’est pas épargnée…

Dans le milieu de la lutte, on ne peut pas dire que tel lutteur se dope. Mais nous avons constaté comme beaucoup d’autres que des lutteurs en un laps de temps ont eu un gain de poids qui fait peur. En général cela est du aux hormones, comme on le note au Brésil où on a autorisé le vente de ces produits. Certains de nos lutteurs de retour d’un voyage reviennent avec une masse musculaire extraordinaire. Nous attirons l’attention des gens que c’est très dangereux pour ceux qui veulent avoir de l’avenir et qui, après la lutte veulent faire quelque chose. L’usage de produits anabolisants peut entrainer un arrêt cardiaque en pleine pratique et une mort subite. En utilisant ces produits, on sollicite le cœur au-delà de ses possibilités.     

Certains produits naturels utilisés par le Sénégalais tels que le bissap, sont d’après certains, dopants. Qu’en est-il véritablement ?

Nous sommes de chercheurs et nous ne pouvons pas affirmer de façon gratuite. Pour pouvoirs dire si le bissap ou le kinkéliba, ou le gingembre sont dopants, il faut qu’on fasse des études. Il y a aussi l’expérience de certains qui disent que quand ils consomment du bissap, ils ont plus de tonus. Vraiment jusqu’à présent, nous n’avons pas encore de preuves palpables nous permettant d’avancer sur le plan scientifique. Mais le café peut être considéré comme un produit dopant. C’est important que nos athlètes le sachent. Une tasse de café peut contenir entre 150 et 250 mg de caféine, or c’est la caféine qui est considérée comme dopant. Quand un athlète n’a pas ces informations, cela peut poser problème, s’il est contrôlé.

Réalisé par ANGELIQUE THIANDOUM