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Parité de l’orgasme : quand le rapport sexuel ne se réduit plus à la jouissance masculine

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Parité de l’orgasme : quand le rapport sexuel ne se réduit plus à la jouissance masculine

«Alors, t'as joui ?» Pas toujours facile, pour les femmes, de répondre honnêtement à cette question. Pourquoi n'ose-t-on pas dire la vérité ? La faute à notre société patriarcale, mais qui tendrait à changer. Enquête.

«Si vous avez moins d’orgasmes que les hommes, c’est parce que vous êtes plus sentimentale.» Une petite phrase, anodine pour certains, qui a eu l’effet d’une bombe pour Dora Moutot. La journaliste free-lance partage l'«anecdote» avec ses followers sur Instagram, et en l’espace de quelques heures, sa messagerie privée est saturée. La jeune femme de 28 ans décide alors de  créer un compte public, intitulé, et ça ne s'invente pas, «T’as joui ?». En une semaine, la page comptabilise plus de 80.000 abonnés, et d'innombrables témoignages de femmes frustrées par leur vie sexuelle. En se livrant ainsi, auraient-elle a cœur de (re)prendre leur sexualité en main ?

"Une femme honorable ne devait pas jouir"

On nous fait croire depuis l'enfance que notre plaisir est malsain

Dora Moutot

«Aujourd’hui encore, les couples hétérosexuels ont une sexualité établie en fonction d’un point de vue masculin, représentée par le schéma pénétration, puis éjaculation», pose en préambule Sylvie Chaperon, historienne spécialiste de l’Histoire des femmes, de la sexualité et du féminisme et professeur à l’université Jean Jaurès à Toulouse. «Il s’agit d’une conception très ancienne, dont Hippocrate parlait déjà 400 ans avant Jésus-Christ. Ses travaux ont influencé la médecine occidentale, et ce, jusqu’au XIXe siècle», laissant de nombreuses femmes peu épanouies sexuellement. Or, assure la sexologue Caroline Janvre, «la pénétration n’est pas toujours ce qui procure le plus de plaisir aux femmes».

Le jouissance des femmes ? Voilà un sujet qui, pendant des siècles, n’a pas passionné les foules. «On ne s’en préoccupait guère, reconnaît le psychologue Stéphane Clerget. Elle était même malvenue en Occident et considérée comme un pêché. Une femme honorable ne devait pas jouir.» Une idée tenace, même en 2018, et dont s’insurge la créatrice de «T'as joui». «On nous fait croire depuis l'enfance que notre plaisir est malsain, proteste Dora Moutot, c'est un vrai problème, car de nombreuses femmes méconnaissent leur corps, y compris une fois adulte. Sans parler de cette injonction totalement fausse qui prétend qu'il est naturel que les femmes ne jouissent pas autant que les hommes car elles sont moins "mécaniques".» 

Un a priori que l’évolution des mœurs, et notamment la révolution sexuelle, tend cependant à atténuer. «Après mai 68, le plaisir féminin était un sujet souvent abordé dans les milieux gauchistes et féministes. Depuis, il semblerait que le sujet se soit élargi à la sphère publique, devenant ainsi plus consensuel, en partie grâce aux réseaux sociaux», explique Sylvie Chaperon. Les YouTubeurs et Instagrameurs, notamment sont toujours plus nombreux à aborder le thème de la sexualité, et ce d’une manière décomplexée.

Les femmes, aussi, connaissent mieux leur corps. «Elles sont de plus en plus nombreuses à se rendre compte que le clitoris est le seul organe uniquement dédié au plaisir, et qu'elles sont les seules à en être pourvues !», ironise Caroline Janvre. Si la découverte de cet organe féminin n’est pas nouvelle, les médias n’en ont jamais autant parlé que ces dernières années. «Les femmes prennent la parole et font part de leurs expériences sexuelles, note Sylvie Chaperon. Des sujets qui se sont aujourd’hui démocratisés, notamment grâce à la presse et à la féminisation du métier de journaliste.» Autre pas de géant : l’entrée du clitoris dans les manuels scolaires en 2017.

La révolution du clitoris prend aussi ses racines dans l’acceptation plus générale du corps, notamment celui des femmes. «Avec les mouvements "body positive" qui circulent sur les réseaux sociaux, explique Cy, bédéiste, illustratrice et militante féministe, certaines femmes commencent à refuser les diktats imposés par la société. Phénomène qui entraîne des réactions en chaîne, ainsi qu’une remise en cause des fondamentaux, dont la sexualité.» Ajoutez à cela le mouvement #metoo, complète la réalisatrice Ovidie, et vous «amenez la jeune génération à se poser des questions et à redéfinir les rôles de chacun. Elle ne veut plus d'inégalité, y compris au lit.»

La crainte de ne pas être "normale"

Remettre en cause la sexualité habituelle, c'est remettre en question la masculinité 
Cy.


Mais cette libéralisation sur la place publique a-t-elle des effets jusque dans l’intimité ? Qu’en est-il une fois sous la couette ? À 25 ans, Hélène* n'a jamais eu d'orgasme avec un homme. «Je n’ai jamais osé dévoiler à l’un de mes partenaires que la pénétration ne me donnait pas de plaisir et qu’il fallait me toucher pour que j’en prenne». «Les femmes sont coincées dans un cercle vicieux et craignent de ne pas être "normale" si elles disent à leur partenaire qu’elles ne jouissent pas», déplore Cy. Alors elles se taisent, et la situation demeure la même. Sans compter que les femmes, même dans leur sexualité, ont tendance à «materner leur partenaire», ajoute Stéphane Clerget, et craignent de le voir se vexer ou de «bouder» si elles leur disent la vérité.

Pourtant, «il est primordial d'arrêter de simuler», martèle Dora Moutot. Plus facile à dire qu'à faire. «La sexualité de la femme est toujours cantonnée à une sexualité matrimoniale, hétéro, où la pénétration est légion. Alors aborder le sujet avec son partenaire n'est pas toujours évident, car cela équivaut à déconstruire les stéréotypes de la sexualité hétéronormée et masculino-centrée», explique la sexologue Caroline Janvre. «Ce qui est difficile, estime Cy, plus que de remettre en cause la sexualité habituelle, c'est remettre en question la masculinité même.»

"Il faut lancer un mouvement global"

Comment faire pour que l’orgasme féminin s’impose jusque dans la sphère privée ? «Il faut lancer un mouvement global, et aborder la sexualité féminine dans des cours d'éducation sexuelle, dans notre manière de parler de sexe, mais aussi dans les médias», recommande la réalisatrice de 38 ans. «Réinventer la sexualité passe aussi par notre culture populaire», estime Sylvie Chaperon.

Un bouleversement auquel on assiste déjà dans l'industrie pornographique avec des réalisatrices comme Ovidie ou Erika Lust, mais aussi dans la littérature érotique. Même le géant Netflix se met à la page. Dans le dernier épisode de sa série de documentaires Explained, la plateforme en ligne aborde l'orgasme féminin. «C'est un excellent point et c'est fondamental si l'on veut modifier notre sexualité stéréotypée et appauvrie», prédit l'historienne.

Quant au couple, il faut «faire preuve d'imagination pour réinventer sa sexualité, et privilégier la communication», conseille Sylvie Chaperon. Une interaction verbale ou non. «Si la femme n'ose pas en parler avec son partenaire, elle peut tout à fait lui montrer ce qui lui donne du plaisir au moment du rapport», souligne Caroline Janvre, ou précise Cy, «lui envoyer un article de presse, ou le compte Instagram "T'as joui" pour amorcer la discussion». La clé, ajoute Stéphane Clerget, est «d’éviter la critique envers son partenaire». Dire «je» plutôt que «tu». Et si, en dépit de tous ces appels du pieds le message ne passe pas, changez de partenaire !



2 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Septembre, 2018 (09:50 AM)
    Une bonne apologie pour l'homosexualité Pffff!!!!!!!!!!!!!!!
  2. Auteur

    Anonyme

    En Septembre, 2018 (11:18 AM)
    Ceci est vrai en Europe. Pour nous sénégalais, nous sommes très loin de ce concept





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