Fin mars, l’hypothèse selon laquelle le virus se serait échappé d'un laboratoire de Wuhan avait été quasiment exclue par les experts de l’OMS. Le lendemain, le patron de l’OMS avait réclamé une nouvelle enquête, avant que les États-Unis et treize pays alliés n’expriment leurs “préoccupations”, réclamant à la Chine de donner “pleinement accès” à ses données. Ce vendredi, dans une lettre publique, un groupe de 28 chercheurs, baptisé le “groupe de Paris”, interpelle l’OMS “sur les lacunes structurelles, procédurales et analytiques de l’étude” des experts internationaux. Les scientifiques demandent également à la Chine de fournir un accès à des documents importants pour éclaircir la situation sur plusieurs éléments troublants.
Dans leur rapport publié fin mars, les experts internationaux de l’OMS avaient jugé “extrêmement improbable” la théorie selon laquelle le coronavirus aurait pu s’échapper de l’Institut de virologie de Wuhan, la ville du centre de la Chine où la Covid-19 a fait son apparition fin 2019.
Le directeur de l’OMS et 14 pays demandent une enquête “approfondie”
Mais, à la surprise générale, le directeur de l’OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus a demandé, dans la foulée de la publication du rapport, de poursuivre l’enquête sur cette hypothèse, notant que les experts internationaux lui “avaient fait part de leurs difficultés à accéder aux données brutes” pendant leur séjour en Chine.
Dans le même temps, les États-Unis et 13 pays alliés, dont le Royaume-Uni, Israël et le Canada, avaient exprimé leurs “préoccupations” dans une déclaration commune au sujet du rapport de l’OMS, réclamant à la Chine de donner “pleinement accès” à ses données.
La Chine embarrassée
De son côté, la Chine est apparue embarrassée face à cette hypothèse de la fuite de laboratoire. À propos d’une nouvelle mission d’enquête sur l’origine de la Covid, le pays s’est prononcé pour qu’elle se déroule dans d’autres pays.
“Il y a plus de 200 sites biologiques dans le monde, par exemple celui de Fort Detrick”, un laboratoire militaire américain, a déclaré la porte-parole de la diplomatie chinoise. “En cas de besoin, je pense qu’on devrait laisser les scientifiques mener des recherches dans d’autres laboratoires mondiaux”, a-t-elle dit.
La piste de la fuite de labo relancée
Alors que la piste de la fuite semblait au point mort depuis plusieurs semaines, près de 30 chercheurs d’une dizaine de pays ont demandé à l’OMS vendredi “une enquête rigoureuse, sans a priori, et à une plus grande transparence de la Chine”, rappelle le Figaro dans un dossier publié mardi sur l’hypothèse de la fuite.
“Il y a des zones d’ombre évidentes qui demandent des explications afin de pouvoir, ou non, écarter définitivement cette hypothèse”, écrit Virginie Courtier-Orgogozo, biologiste à l’Institut Jacques Monod de Paris. Les scientifiques demandent à la Chine de publier des données manquantes.
Une piste remontant à 2012
Dans leur lettre, les chercheurs énumèrent plusieurs éléments troublants. L'un d’entre eux est largement mis en avant: le RaTG13, cousin naturel du Sars-CoV-2, découvert en 2012 dans une ancienne mine de cuivre du Yunnan en Chine. “Six hommes qui nettoyaient du guano de chauve-souris ont été contaminés et ont développé des pneumonies sévères. Trois en sont morts”, expliquait le journaliste Christophe Giltay, sur RTL Info, mardi soir, reprenant le dossier du Figaro.
L’Institut de virologie de Wuhan a étudié ce virus provenant de ces hommes, mais les échantillons ont disparu, ce qui pose largement question, estiment les scientifiques. De plus, “désormais, l’accès à la mine est impossible. L’entrée est surveillée par des caméras”, ajoute M. Giltay.
“On ne peut pas écarter l’hypothèse qu’un doctorant de l’Institut de virologie de Wuhan ait été infecté en effectuant un prélèvement”, précise Gilles Demaneuf, co-signataire de la lettre. “Nous ne disons évidemment pas que cela s’est produit: nous demandons juste à ce que l’on nous démontre que ce n’est pas le cas”, ajoute-t-il.
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