Les neuf policiers suspectés d’avoir volé 200 millions de francs CFA à deux commerçants maliens, Vonama Ombatidé et Aly Djiguiba, ont été jugés mardi dernier devant le tribunal correctionnel de Pikine-Guédiawaye. À la barre, les mis en cause ont tous tenté de nier les faits.
Le chef de brigade Abdoulaye Diaw, alias Baye Fall, a déclaré avoir ordonné l’opération ayant abouti à la disparition du montant en question sur la base d’une information anonyme faisant état d’un trafic de cocaïne entre Dakar et Bamako. De plus, jure-t-il, il avait pris le soin d’informer sa hiérarchie avant d’envoyer ses hommes sur le terrain.
Faux, a rétorqué son supérieur hiérarchique, le lieutenant Abdou Aziz Bâ. D’après L’Observateur, qui a assisté au procès, ce dernier a indiqué avoir été informé après coup, lorsque l’argent a été compté et que les Maliens ont signalé la disparition de 200 millions.
Sans démonter l'accusation, l’indic Doudou Cissé, au volant de la voiture qui filait les victimes, s’est attelé à circonscrire son rôle à celui de «simple collaborateur», souligne le quotidien du Groupe futurs médias. «Mais ses incohérences et son implication dans le transport des sacs d’argent le desservent lourdement», relève le journal.
Le verdict de cette affaire est fixé au 13 mai prochain. Les policiers et leur indic risquent trois ans de prison ferme, peine requise par le procureur pour association de malfaiteurs, vol en réunion et abus d’autorité. Celui-ci a demandé la relaxe des deux Maliens, pour défaut de charges.
Cette affaire remonte à la nuit du 20 au 21 juillet 2024. Un véhicule banalisé conduit par Doudou Cissé file un 4X4 à bord duquel, ont pris place les deux commerçants maliens. À hauteur du rond-point Sedima, les policiers, sur ordre de leur chef, «Baye Fall», arrêtent le véhicule de ces derniers.
Menottes aux poignets, les Maliens sont conduits à la carrière de Zac Mbao. Une fouille de leur véhicule permet aux mis en cause de mettre la main sur deux sacs et d’une valise contenant, selon les commerçants, 650 millions de francs CFA en liquide et des effets personnels.
D’après l’accusation, c’est ainsi que les policiers ont réclamé 40% du montant. Les Maliens refusent. Les discussions s’étirent jusqu’au petit matin, selon L’Observateur. Le groupe se déploie finalement au poste de police de Zac Mbao. Mais après comptage des billets, les commerçants dénoncent un trou de 200 millions.
L’affaire sera confiée à la DIC. Les Maliens déclarent aux enquêteurs avoir été victimes d’un vol planifié, précisant que les fonds provenaient de leurs activités de transfert d’argent entre Dubaï, Bamako et Dakar. Les images d’une caméra embarquée dans le coffre de leur voiture montre que le montant saisi était de 650 millions.
Alors que l’enquête s’emballe, Doudou Cissé disparaît de la circulation; ce n'était pas pour arranger les choses pour les policiers suspectés. Il sera arrêté plus tard. Et une perquisition de son domicile permet de mettre la main sur des menottes, des grenades lacrymogènes et une fausse carte professionnelle de police, ce qui lui vaut en plus une inculpation pour usurpation de fonction.
Mais l’élément le plus précieux pour les enquêteurs de la DIC est le film capté par les caméras de surveillance d’une clinique établie à Zac Mbao. «On y voit deux policiers décharger des sacs d’argent d’un véhicule conduit par l’indic [Doudou Cissé]. Cette preuve irréfutable mène à l’arrestation de tous les policiers impliqués, qui rejoignent ainsi les commerçants, qui étaient placés en garde à vue», rappelle L’Observateur.
Malgré ses éléments compromettants, les neuf policiers ont plaidé non coupable. Ils vont déchanter si le tribunal suit le réquisitoire du procureur.
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