Le Sénégal a vite fait de faire une mise au point quant au éventuel accord de rapatriement entre l’Espagne et le Sénégal. Il n’en est rien d’ailleurs. Mais face à une telle situation, l’Etat avait perdu la tête. Les autorités s’en étaient mêlées les pieds et avaient donné leur accord pour ce cas d’urgence. Mais de manière formelle, ce sont les émigrés qui n’avaient pas maîtrisé les termes et code en vigueur quand on décide de braver la mort dans des embarcations de fortunes pour se rendre en Espagne. Les îles de Mellia et la forteresse en grille de fer au Maroc ont servi de passoire à des milliers de Sénégal. Mais jamais, l’idée de rapatriement n’a été agitée, ne ce serait que pour les dissuader. Il est de coutume que les jeunes émigrés jettent toutes leurs pièces identification avant d’atteindre l’autre rive. Dès qu’ils franchissent le rubicond et se retrouvent entre les mains des éléments de la Croix rouge, ils refusent de fournir des éléments qui puissent aider ces derniers de savoir leurs pays d’origine. C’est donc après quelques jours de répit qu’on les achemine en ville en leur offrant progressivement du travail puis un permis de séjours.
Quelques-uns que nous avons approchés et qui ont été régularisés depuis des années nous informent dans un récit pathétique que si la personne décline son identité et son pays d’origine, elle est immédiatement refoulée. La formule été de donner le nom d’un pays qui vit une guerre civile ou une crise politique, comme le Libéria, la Sierra Léone, la Guinée-Bissau. Certains en avaient pris pour leur ignorance et ont été retournés au pays. Nos compatriotes qui ont bravé l’Océan atlantique auraient échappé aux goulets d’étranglement s’ils ne s’étaient pas fait identifier comme Sénégalais. Même si le Sénégal est un pays carrefour donc d’embarquement, il n’en demeure pas moins que d’autres nationalités étaient des différents voyages.
Les autorités ont certes tôt pris le taureau par les cornes en y envoyant une délégation, mais pour autant, elles sont en passe de commettre une erreur gravissime, historiquement dangereuse. Ces milliers de jeunes qui ont toisé la mort et côtoyé le supplice pendant une semaine pour embrasser le bonheur d’arriver en Espagne ne leur pardonneront jamais. Pire, ils risquent d’emprunter le chemin de la déviance et de la défiance en s’adonnant, soit à la drogue ou à l’agression. N’en déplaisent aux agitateurs du plan de retour vers l’agriculture, qui font rêver les rapatriés de Mélilia et Céuta. Les pêcheurs de Guet Ndar à Saint Louis et à Yarakh à Dakar ont donné le ton en battant le macadam pour fustiger l’accord de rapatriement de leurs enfants pour un hypothétique projet « Rèva ». Pourvu que l’Etat parvienne à la reconversion rapide de ces derniers de pêcheurs en agriculteurs. Mais avec le spectre des bons impayés, la pâte risque de ne pas prendre.
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