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Allemagne : le sexe déclassé X

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Allemagne : le sexe déclassé X

LIVREBest-seller paru en 2012, le manuel d’éducation sexuelle «Make Love» sort en France. Face à Internet, saturé d’images pornographiques, ce livre-ovni, drôle et malin, explique l’intime sans tabou.

 

En ces temps difficiles pour l’édition, les performances de vente sont d’autant plus frappantes. C’est le cas de Make Love : à sa sortie en 2012, en Allemagne, ce manuel d’éducation sexuelle s’est écoulé à plus de 100 000 exemplaires en quelques semaines et a aujourd’hui passé le cap des 150 000 – un tel score, en France, le ferait rentrer dans le top trente des meilleures ventes de l’année.

Dans la foulée, le livre a inspiré une série documentaire télévisée outre-Rhin (succès critique et d’audience) qui se revendique « proche des gens » auxquels elle apprend « comment faire l’amour ». Le best-seller vient enfin d’être traduit en français par les éditions Marabout.

TON DÉCONTRACTÉ ET BIENVEILLANT

A quoi tient donc le succès de Make Love ? L’ouvrage, né de la rencontre d’une journaliste (Tina Bremer-Olszewski) et d’une sexologue (Ann-Marlene Henning) frappe d’abord par la bienveillance et la décontraction de son ton, qui n’est pas sans rappeler la liberté sexuelle de l’ex-RDA : « Passe-toi de la crème et sois attentif à ce que tu éprouves en le faisant. Ne néglige aucune partie (…), il n’y a pas que le gland ou la pointe du clitoris qui sont sensibles aux caresses », est-il prescrit dans le chapitre « Se toucher ». Un peu plus loin, on peut trouver en détail en quoi consiste une fellation ou un cunnilingus.

Autre particularité du livre : il est ponctué de photos très explicites qui montrent de vrais couples en action. Des photos d’amants hétéro ou homo, dans tous les cas avec des corps normaux aux proportions et à l’épilation réalistes (pas de seins sous le menton ni de pénis chauve). « Il était important de montrer aux lecteurs à quoi ressemble une vraie intimité », explique Tina Bremer-Olszewski. A cela s’ajoutent des citations tirées de la pop culture (empruntées à The Big Lebowski, la série The New Girl ou une chanson de Benjamin Biolay).

Mais aussi des données drôles, des infographies montrant comment est désigné le vagin dans différentes langues (la moule barbue en anglais, ou la pêche en turc) ou un schéma comparant le nombre de positions exécutées lors d’un rapport physique réel (une à trois) et dans les films porno (cinq à huit). Au final, même si le livre s’adresse plutôt aux adolescents, il a rencontré en Allemagne un certain succès auprès des adultes.

Les auteurs de Make Love sont parties d’un postulat: la surabondance de sexe dans les médias ou sur le web donne l’impression trompeuse qu’il n’y a plus rien à apprendre. Le porno est particulièrement mis en cause : « Il montre des pratiques sexuelles sauvages, des femmes qui parviennent à l’orgasme en deux minutes et des corps parfaits. Cela n’a rien à voir avec le sexe accompli. C’est comme un film de science-fiction avec des effets spéciaux », affirme Tina Bremer-Olszewski.

DES SITES D’ÉDUCATION SEXUELLE

Le succès commercial de Make Love tend à donner raison à ses auteurs, mais il ne faut pas oublier qu’il s’inscrit dans un courant plus large d’évolution de l’éducation sexuelle. Le temps où l’éveil sexuel se résumait à glisser un préservatif sur une banane au collège et le visionnage de film érotique sur M6 le dimanche soir est révolu. Internet apporte et fait prospérer une manne miraculeuse de contenus sexuels alternatifs hautement pédagogiques, via des récits, des BD ou des vidéos. «C’est une chance qu’il n’y ait pas ou peu de modération possible sur le web : aujourd’hui, même dans un pays puritain comme les états-Unis, ceux qui ont envie d’avoir une vision plus saine du sexe ont les moyens de s’informer et de s’éduquer», affirme Erika Moen, une dessinatrice américaine revendiquée queer qui tient depuis 2013 un site de BD sur le sexe.

Ses dessins – très mignons – racontent ses tests de sextoys, expliquent comment fabriquer une culotte de fille capable de contenir un godemiché posé sur un harnais, ou comment devenir un bon patron de club de strip-tease – témoignages de stripteaseuses à l’appui. Erika Moen, dont la réputation a dépassé depuis longtemps les frontières de son pays, ne cache pas son admiration pour des sites d’éducation sexuelle tels que Scarleteen (fondé en 1998, il compte près de 800 000 visites par mois) ou celui de Laci Green.

A 24 ans, Laci Green, avec ses faux airs de Miley Cyrus période prépubère, a su tirer parti de YouTube. Ses tutoriaux courts sur le sexe sont vus, en moyenne, par 5 millions de personnes chaque mois dans plus de cent pays différents ; elle a désormais sa propre émission sur les chaînes de télé américaines Discovery Channel et Planned Parenthood. Un succès qui s’explique facilement. La jeune Californienne, douée d’un vrai talent de communication, sait rendre n’importe quel sujet (le point G, les amateurs de prépuce…) drôle et accessible.

Sa démarche pédagogique se double d’une conscience politique. Celle qui affirme «que sa motivation principale, dans la vie, est la justice sociale» s’évertue à démonter les lieux communs (non, le sexe entre filles ne se résume pas à l’invraisemblable position des ciseaux) et n’hésite pas à s’engager dans la lutte féministe ou contre l’homophobie. «Je trouve ces initiatives excellentes, affirme Tina Bremer-Olszewski. Mais l’avantage d’un livre est qu’on peut se plonger au moment où l’on veut dans le sujet qui nous intéresse en particulier. Et le lecteur le lit à son rythme, à l’écoute de son corps, sans se sentir submergé.» En matière de sexe, un éloge de la lenteur n’a certes rien d’absurde. 

 

Pénis et testicules: comment on les surnomme un peu partout. Image DR

« COMME TOUTES LES CONTRE-CULTURES, LE PORNO OSCILLE ENTRE LA MARGE ET LE MAINSTREAM. »

Maïa Mazaurette, 36 ans, est auteur, blogueuse (sexactu.com) et chroniqueuse. Son travail fictionnel et journalistique se consacre au sexe. Son dernier roman, La Coureuse, a été publié aux éditions Kero.

Partagez-vous l’analyse des auteurs de Make Love selon laquelle plus le sexe est accessible, notamment via le web, plus le néophyte risque de s’en forger une image erronée ?

Blâmer Internet pour tous les malheurs du monde est toujours réducteur. Il y a de la mauvaise information sexuelle en ligne, mais aussi des sites bien faits destinés à un public jeune. Et la nouvelle génération a été formée au fake, je crois qu’elle a de l’esprit critique. Les jeunes savent que le porno est du porno, de même qu’ils savent qu’on ne meurt pas vraiment dans un film d’action. Ensuite, ils peuvent choisir d’adopter certaines des normes du porno – celles qui les arrangent. Mais les croire dupes ? C’est un peu facile.

Il existe clairement une « contre-culture » très ludique. Quelle est sa place et qui touche-t-elle ?

Comme toutes les contre-cultures, elle oscille entre la marge et le mainstream. Récemment des BD sur le harcèlement de rue ont fait des scores très surprenants et ont été relayées au-delà de leur audience initiale. YouTube, c’est la cour des miracles. Et je suis bien placée pour savoir que les blogs marchent très fort aussi. Du reste, c’est plutôt une question de curiosité : en « rester » au porno ou aller chercher des alternatives ? Plus le discours est articulé, plus il se destine à des personnes éduquées. La fracture sociale chère à Chirac est là aussi : il faut des mots, des concepts, pour sortir du basique. L’école reprend alors toute sa place – ainsi que les parents et l’environnement socio-culturel.

Cette contre-culture a-t-elle toujours existé ?

Oui, mais Internet accélère sa diffusion. Parler du porno n’a pas vraiment de sens : il y a toujours eu de la pornographie alternative, drôle, queer et féministe. Elles se répandent dans l’industrie musicale, via les clips, dans la peinture, dans la littérature (où elle a toujours habité) : à mesure que notre regard accepte ces images, elles se propagent. D’où une utilisation marketing, notamment dans la mode. On a beau s’en défendre : nous sommes prêts pour la pornographie globale et nous en avons plutôt envie.

Les contenus « alternatifs » sont souvent créés par les femmes… pour les femmes ?

La vision des femmes sur la sexualité (on est bien d’accord qu’elle n’est pas unique) intéresse les deux sexes. Alors que la vision des hommes, parfois caricaturale ou premier degré, lasse – aussi parce qu’on l’a déjà vue mille fois. Je pense qu’on assistera bientôt à l’érotisation du corps masculin par les femmes. On en a tellement besoin. Et les rôles ne changeront pas tant que le désir des femmes restera à la place qui lui a été assignée : une place de réaction et non d’action.

Pensez-vous que les parents et l’école ont encore un rôle à jouer dans l’éducation sexuelle ?

Plus que jamais. D’abord parce que presque tout le monde a des parents et que l’école est obligatoire, alors qu’Internet dépend de l’initiative de chacun. Ensuite parce que donner des normes est utile : on en a besoin, ne serait-ce que pour s’y opposer.

Make Love d’Ann-Marlene Henning et Tina Bremer-Olszewski, éditions Marabout, 286 p., 17,90 €. ohjoysextoy.comyoutube.com/user/lacigreen

Elvire von BARDELEBEN



3 Commentaires

  1. Auteur

    Ooolalala !

    En Octobre, 2014 (20:26 PM)
    Sénéweb , ou voulez-vous mener ce beau pays ? Peut être vos actionnaires JÉSUITES de votre site web , sont au courant de l'arrivée de l'antéchrist ? Ce dernier est -il loin ?



    Nonnnnnnn !  :sad:  :sad:  :sad:  :sad:  :sad:  :sad:  :dedet:  :dedet:  :dedet:  :dedet: 
  2. Auteur

    Iam

    En Octobre, 2014 (20:29 PM)
    Je cherches une femme mure [email protected]
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    Auteur

    Rfakl

    En Octobre, 2014 (09:36 AM)
    Je cherches une femme sur [email protected]
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