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Alpha raconte sa nuit de violences et de panique au stade Demba Diop

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Alpha Rachid Guiré, supporteurs de Mbour, était au stade Demba-Diop de Dakar lorsque le drame est survenu, samedi 15 juillet.

La justice affirme qu’« aucune piste ne sera négligée » dans l’enquête ouverte suite à la mort de huit personnes, tuées samedi 15 juillet au stade Demba Diop de Dakar, après des violences entre supporteurs des clubs de Mbour et de Ouakam. Alpha, qui était dans les tribunes, raconte sa soirée de cauchemar à Jeune Afrique.

« Ce que j’ai vu là-bas… C’est très dur. Les visages étaient défigurés. Les corps tordus. Je peux vous dire que ces images-là ne vont pas partir. » Alpha Rachid Guire, joint par téléphone par Jeune Afrique, raconte le drame depuis sa chambre d’étudiant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Cette chambre où, justement, sa soirée avait commencé, samedi. Les amis étaient venus en nombre de Mbour, une ville côtière à 70 km au sud de Dakar. « On s’est retrouvés entre étudiants pour aller ensemble au stade Demba Diop, on a fait une caravane pour arriver en force », raconte Alpha. L’enjeu est de taille : samedi soir, c’était la finale de la Coupe de la Ligue sénégalaise de football, face à l’USO, le club de Ouakam, un quartier de la capitale.

Une ambiance tendue dès le début du match

Mais les supporteurs mbourois prennent du retard. Lorsqu’ils arrivent dans le stade, le match a déjà démarré. « Ouakam menait par 1 à 0. Forcément, les supporteurs de Ouakam, dans leur tribune, ils jubilaient. Nous, on est entrés et on est montés dans les tribunes de Mbour, où l’ambiance était plutôt calme. » La tension entre les deux groupes de supporters a commencé à monter en seconde période, lorsque Mbour a égalisé, raconte Alpha. « Quand notre équipe a marqué un but, c’est parti très vite. Les Ouakamois ont commencé à nous insulter, à nous prendre à partie. » Mais sur la pelouse, le match continue, jusqu’aux prolongations.

Ils nous ont repoussés dans un coin de la tribune, mais on ne pouvait plus avancer. Et c’est là que le mur a cédé

Le second but marqué par le Stade de Mbour a été l’étincelle. Sur les tribunes réservées aux supporteurs de Ouakam, c’est l’explosion. « Ils se sont vraiment déchaînés contre nous. Ils jetaient des cailloux, tout ce qu’ils pouvaient trouver. Ils nous ont repoussés dans un coin de la tribune, mais on ne pouvait plus avancer. Et c’est là que le mur a cédé », raconte Alpha. Il assure que, pendant les violences, « les forces de l’ordre sont restées très passives. Elles regardaient faire sans réagir ». Pris de panique, Alpha quitte le stade en courant.

Des spectateurs d'un match de football au stade de Demba-Diop de Dakar, où un mur s'est affaissé, le 15 juillet 2017 au Sénégal.

Affrontements jusqu’aux abords du stade

Mais devant le stade, les violences continuent. « En fait, une fois dehors, on était coincés : les Ouakamois bloquaient les rues et nous jetaient des pierres », assure Alpha. Il reconnaît aussi que les violences n’ont pas été dans un seul sens. « On s’est défendus, se justifie-t-il. Qu’est-ce qu’on pouvait faire d’autre : oui, on a jeté des pierres pour se défendre. On se jetait des pierres mutuellement… » Cette fois, les policiers réagissent. « Ils nous ont lancé des lacrymogènes, et ça s’est un peu calmé. »

Surtout, un des supporteurs de Mbour sonne le rappel. « Un ami qui sortait du stade est venu et nous criait « venez, venez, il faut retourner », raconte Alpha. Ce n’est que lorsqu’il rentre à nouveau dans le stade Demba Diop, qu’il prend vraiment la mesure de ce qu’il vient de se passer. « Il y avait du sang partout. Du sang sur les murs, sur le sol », se souvient-t-il. « On a perdu beaucoup de nos amis. Je les connaissais tous. Nous étions arrivés ensemble… », lâche-t-il.

Alpha, qui dit n’avoir pas réussi à vraiment dormir depuis le drame, n’en veut pas seulement aux supporteurs de Ouakam. « J’en veux aux Ouakamois, mais j’en veux aussi aux politiques, aux organisateurs. Franchement, il n’y avait pas assez de sécurité ! », s’emporte-t-il. « Le stade Demba Diop peut accueillir 15 000 personnes, et les policiers étaient 100, 150 maximum. C’est incroyable », vitupère-t-il, avant de livrer son avis, définitif : « Ils nous ont négligé ».

« Aucune piste ne sera négligée », assure le procureur de la République

« L’enquête suit son cours » et elle sera « complète », a assuré Serigne Bassirou Gueye, le procureur de la République, lors d’une conférence de presse qui s’est tenue ce lundi après-midi à Dakar. « Je me suis rendu sur les lieux. Nous avons pu constater l’ampleur des dégâts. Les traces de sang et autres débris trouvés sur place renseignent sur l’atrocité des actes commis », a-t-il expliqué devant la presse. « Déjà, des témoignages ont été recueillis, des films visionnés et des renseignements sont en cours de traitement. L’autopsie des corps a été ordonnée et confiée à l’hôpital Aristide Le Dantec », a-t-il également précisé.

« Aucune piste ne sera négligée. Les responsabilités seront situées et les auteurs de ces actes ignobles seront traduits devant la justice », a également promis le magistrat chargé de l’enquête. Serigne Bassirou Gueye n’a cependant rien voulu dévoiler de l’un des pans de l’enquête qui sera sans doute examiné au microscope : l’adéquation du dispositif de sécurité avec l’ampleur de l’événement. « Certains ont parlé des forces de l’ordre, est-ce que les forces de l’ordre ont tiré, est-ce qu’il y avait un nombre inférieur ? Mon problème, c’est que jusqu’à présent nous n’avons aucune piste qui mène vers les forces de l’ordre », a-t-il simplement avancé.



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