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APPEL D’AIR : Dakar et environs : Quand la chaleur s’invite au mois de décembre

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APPEL D’AIR : Dakar et environs : Quand la chaleur s’invite au mois de décembre

Un Sommet mondial à Copenhague. Des négociations passionnées. Un accord qui suscite des réactions contrastées. Le Sénégal a vécu au temps de cette importante rencontre sur les changements climatiques. A Dakar et dans les régions de l’intérieur, hommes et femmes, au quotidien, sont confrontées aux effets de la dégradation de l’écosystème. Ici, c’est l’indifférence, là, c’est un cri du coeur. « Le Soleil » vous propose une série de reportages. Suivez le guide.

Dakar et environs : Quand la chaleur s’invite au mois de décembre

D’une manière peut-être moins spectaculaire que dans certaines parties du monde, mais tout aussi réelle, le réchauffement du climat est en train de changer la vie des Dakarois. C’est toute une organisation de la vie en fonction des saisons, des repères et des habitudes qui est en train d’être bousculée.

Mermoz. Ce lundi matin du mois de décembre, la vie commence lentement dans ce quartier chic de Dakar. Les rues sont presque désertes. Comme d’habitude. Les rares personnes qu’on croise sont toutes pressées. Elles marchent, les yeux baissés. Tous ou presque sont habillés en tenues légères : tee-shirt ou chemise pour les hommes, tenues légères et flottantes pour les femmes. L’air est frais. Mais ce n’est guère le froid habituel des mois de décembre. Devant une banque située dans ce quartier, M. Fall sirote sa tasse de café... plus par habitude que pour se réchauffer. « Je constate, comme tout le monde, les changements climatiques. Mais, à mon avis, le vrai problème, c’est la pollution de l’atmosphère avec les rejets de Co2 par les véhicules. Quant au froid, il ne faut pas s’impatienter, il sera au rendez-vous avant fin décembre. Pour le moment, il fait tout simplement bon », souffle-il avec un petit brin de climato-scepticisme. En attendant, s’il n’allume plus son ventilateur, il continue de laisser ouverte sa fenêtre la nuit. « C’est seulement vers 4 heures du matin que je commence à ressentir la fraîcheur », ajoute Gasmou Touré, en passant.

Une femme, son bébé en califourchon, attire l’attention. L’enfant est habillé en courtes manches, les bras et les pieds dehors. Il n’a pas de bonnet. C’est clair, ici on n’a pas froid au dos des hivers rigoureux qui sévissent en Europe. Toutefois, il fut un temps Dakar avait son petit hiver. Sans neige, il est vrai !

A Dakar-Plateau, autre ambiance, autre décor, même mode vestimentaire. C’est l’heure de pointe. La petite fraîcheur matinale commence à faire place au soleil. Les embouteillages réchauffent l’atmosphère. Les hommes et les femmes sont tous habillés léger. C’est le cas de Pape, en chemise, les boutons ouverts. « Il fait chaud presque toute l’année, confie-t-il. On n’a presque plus d’hiver. Je me rappelle quand j’allais à l’école, au mois d’octobre il faisait tellement froid que je portais des Jeans ».

Abdoulatif Diop partage ce constat. Lui, pointe un doigt accusateur. « Ce sont les mêmes qui parlent le plus du réchauffement climatique [les Européens] qui ont conduit notre planète à l’état actuel. Malheureusement, nos gouvernants n’avaient pas pris les devants pour prévenir ces conséquences », dit-il.

Perte de repères

Nafi et Khardiata, rencontrées à Pikine, sont originaires de Toubab Djalaw, village situé dans le département de Rufisque, sur le littoral. Si elles disent ne pas comprendre grand-chose des changements climatiques, elles en constatent les effets. « Le climat, on ne comprend plus. Dès fois, il peut faire très froid le jour et très chaud la nuit ou vice versa. Le climat change d’une manière vraiment imprévisible », témoigne Khardiata. Alors, difficiled’organiser sa vie en fonction des saisons. « J’avais l’habitude d’acheter des habits adaptés au froid pour les enfants dès le mois de novembre mais à présent on ne sait plus à quoi s’en tenir », dixit Nafi.

D’une manière presque diffuse, le réchauffement du climat a fait changer bien des habitudes. « Moi, je continue toujours à allumer mon ventilateur la nuit durant presque toute l’année et je n’utilise plus de couverture quelle que soit la saison », confie Gallo. Ce qui était inimaginable en mois de décembre à Dakar, il y a quelques décennies. D’autres habitudes, comme chauffer de l’eau pour le bain, durant cette période de l’année, ont tendance à disparaître.

Pour les habitants de l’hinterland, l’idée qu’on se faisait de Dakar, c’est celle d’une ville où il faisait froid durant presque toute l’année. « Je me souviens que ma grand-mère quittait toujours son village du Saloum pour venir passer le mois de Ramadan à Dakar parce que, disait-elle, ici, il fait froid durant toute l’année », se rappelle Modou Guèye. Aujourd’hui, ce ne serait pas trop exagéré de dire qu’il n’y a pas une grande différence entre le climat de Dakar et celui de Kaolack.

Vente de pulls en baisse

L’effet du changement climatique, les marchands de fripes en mesurent peut-être mieux la température. Au marché Sandaga, les marchands de pulls et autres vêtements de froid sont formels : ce n’est pas la bonne affaire, pour le moment. Un signe qui ne trompe guère : ce sont chemises et tee-shirts qui sont mis en vitrine. Les rares clients qui viennent ne s’intéressent guère aux pulls.

« En ce moment, seuls les voyageurs qui partent pour l’Europe viennent acheter des vêtements adaptés au froid, alors qu’il y a quelques années, quand le ballot de fripes arrivait, à cette période de l’année, les gens se bousculaient pour avoir des vêtements de froid », se souvient Moulaye Seck, président de Synergie des marchands ambulants pour le développement (Symad). Il a l’air de savoir de quoi il parle. « Cela fait 20 ans que je me suis spécialisé dans la vente de fripes notamment des vêtements de froid. J’étais toujours pressé que cette période arrive parce que c’était une aubaine pour moi. Je gagnais jusqu’à 300.000 FCfa le ballot en un laps de temps. Maintenant, je ne gagne même pas le quart de cette somme. C’est pourquoi, depuis deux ans, je commence à délaisser ce créneau », dit-il.

Moustapha, un autre vendeur de vêtements, abonde également dans cette rhétorique alarmiste : « regarde ce pull, qu’il désigne avec un geste nonchalant, cela fait des jours qu’il est là mais personne ne s’y intéresse. Je ne suis pas un expert de la question, j’entends tout le débat qu’il y a autour du réchauffement global du climat, mais selon moi, c’est une réalité absolue », déclare Moulaye Seck.

Révolutionner le mode d’habitat

Le débat sur le mode d’habitat en Afrique est tout aussi relancé. Selon certains architectes, les constructions en géo béton (terre stabilisée) répondent mieux aux conditions climatiques de l’Afrique que les constructions en béton armé qui dégagent deux fois plus de chaleur, mais largement usitées dans nos pays.

« Quelle que soit la température, quand vous entrez dans une maison entièrement construite en géo béton, vous avez l’impression qu’il y a un régulateur thermique », explique Saïku Thiam, coordonnateur de l’Association pour le développement naturel d’une architecture et d’un urbanisme africains (Adaua - Sénégal), une Ong basée à Thiès. D’après cet avocat infatigable de l’habitat en géo béton, il est temps de révolutionner notre mode d’habitat.


 



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