Ils étaient près d’une trentaine de personnes, regroupés autour du collectif pour la réhabilitation et la sauvegarde du stade Assane Diouf de Rebeuss, à venir assister à l’audience que leur a accordée le président de la République ce jeudi, à 17 heures. Ils étaient venus lui (re)parler de la situation de leur stade fétiche, en proie aux démolisseurs. Ils n’en reviennent toujours pas. En effet, la seule chose que les membres dudit collectif peuvent retenir de leur audience à la salle des Banquets du Palais, c’est l’humiliation qu’ils y ont subie et le temps qu’aura duré l’entrevue avec Wade. Sans doute un record car il sera difficile de voir une audience aussi courte. Après avoir bien écouté le discours du porte-parole du Collectif, le chef de l’Etat a tout simplement surpris tout le monde par sa réponse : «Mais on perd du temps ! Vous m’avez posé un problème, je vous ai dit que je vais m’en charger, alors pourquoi vous venez pour me répéter la même chose ? Attendez que je vous réponde !». Un coup de massue qui a laissé l’assistance sans voix. Et Wade d’enchaîner : «Ce n’est pas bon de se répéter tout le temps ! Je suis content que vous veniez m’exposer vos problèmes certes, mais pas pour me tenir le même discours. Je ne vous ai pas encore appelés et vous venez pour me dire exactement la même chose que lors de notre dernière audience, alors je ne comprends pas le sens de cette rencontre ! Je n’ai pas de temps à perdre ! La séance est levée !». Oui. La séance venait ainsi d’être levée par le chef de l’Etat qui ne se fit pas prier pour laisser l’assistance stupéfaite, à la salle des Banquets qui, pour une fois, n’a pas connu son ambiance festive habituelle.
Pourquoi Wade s’est-il énervé ?
Le maître des lieux était agacé. Lui seul en connaît les raisons, même si chacun y va de son petit commentaire. La première raison probable évoquée par certains peut paraître saugrenue. L’audience s’est déroulée un jeudi, jour de conseil des ministres. «Le président s’est-il emporté lors de sa rencontre hebdomadaire avec son gouvernement ou en est-il sorti fatigué ?». Une hypothèse à écarter car l’audience devait précéder le conseil des ministres. Qui selon des sources ne s’est finalement pas tenue après, mais a été reportée à aujourd’hui. Pour quelles raisons ? Motus et bouche cousue. Pour d’autres, par contre, c’est le discours très salé de Moussa Diadiou, porte-parole du collectif. Ce dernier n’a pas manqué en effet de susciter la grande surprise de Wade en soulignant dans son discours que «les autorités municipales de Dakar ont, contre la volonté des citoyens, cédé le stade Assane Diouf à l’Etat.» Mieux, le porte-parole du collectif poursuit entre rappels historiques et allusions voilées, en citant une célèbre phrase du chef de l’Etat : «Je préfère la disponibilité de ma jeunesse aux milliards de l’étranger.» Toujours est-il que juste avant le dernier sommet de l’Oci, Me Wade avait exigé l’arrêt de la démolition de la tribune du stade qui a reçu des coups de marteau dans la nuit du lundi 25 au mardi 26 février 2008. «Je me donne jusqu’après le sommet de l’OCI et je reviendrai pour qu’on trouve une solution», avait-il déclaré aux jeunes du quartier abritant le stade. Le collectif est-il allé trop vite en besogne en sollicitant une audience aussi tôt ? C’est une autre des raisons évoquées pour expliquer l’accueil froid du président. Selon des indiscrétions, l’audience a été démarchée, comme pour le mouvement “navétanes”, par le président du Sénat, Pape Diop qui était toutefois absent. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la lumière n’est pas encore levée sur ce terrain «qui aurait été vendu en 2003, alors que la délibération du conseil municipal qui le cédait n’a eu lieu qu’en 2004». À cause de sa position en face de la corniche, il attire plusieurs convoitises. Un projet de construction d’une Cité des Affaires (“Kawsara”) était à l’origine de la démolition de la tribune de l’unique aire de jeu qui reste à Dakar-Plateau. Quotidiennement, il accueille des pratiquants de football, de lutte, d’arts martiaux avec la célèbre école de football de Rebeuss, l’Us Gorée, les Asc de la zone 1, la communauté guinéenne, élèves, étudiants, civils et militaires… À l’instar de Lamine Diack, Alassane Djigo, Bayal Sall, plusieurs personnalités y ont fait leurs premiers pas.
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