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COMMENTAIRE DU JOUR : Sauve qui peut !

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COMMENTAIRE DU JOUR : Sauve qui peut !
Ousseynou D. est un jeune mécanicien qui officie à Colobane, un quartier de la capitale sénégalaise. Il a un revenu annuel de moins de 2 millions de Fcfa. Il est marié, père de trois enfants déjà. Sa jeune épouse lui en a fait un quatrième. Une naissance qui a rempli certes de joie la maisonnée, mais qui n’en a pas moins mis dans l’embarras le chef de foyer et obligé toute la famille à se saigner jusqu’au dernier sou pour que Madame puisse accoucher à la clinique privée, à la suite d’une césarienne… Huit cent mille Fcfa ont été nécessaires. C’est-à-dire près de la moitié de tout ce qu’il espère même gagner en une année entière de dur labeur. Bien entendu, au moment des faits, il ne disposait pas en épargne d’une telle somme et a dû recourir à la solidarité agissante de toute la famille qui cassa tirelires et épousseta bas de laine pour rassembler l’argent nécessaire. 

Simplement parce que la maternité de l’hôpital A. Le Dantec où sa femme aurait pu, pour une somme dix fois moins importante, accoucher par le biais d’une césarienne en toute sécurité, est fermée au public depuis août 2005. Alors que confiait hier mardi 29 avril 2008, soit trois ans après, un éminent professeur aujourd’hui redéployé ailleurs avec ses étudiants en attendant que la maternité reprenne du service, dieu seul sait quand ?,- « une sur trois césarienne était effectuée dans cette clinique universitaire… » soit 30% des cas opérés sur l’ensemble du territoire national. C’est dire !

Le cas de Ousseynou D. n’en est qu’un parmi des milliers que l’on décompte dans la capitale chaque jour avec des conséquences hélas très souvent moins heureuses sinon dramatiques. Non seulement en maternité mais également dans tous les autres domaines de la santé publique. Parce que l’Etat qui clame tout haut que le plus gros de ses investissements budgétaires est consenti à l’éducation et à la santé depuis la survenue de l’alternance a oublié certainement de doter l’hôpital universitaire A. Le Dantec d’un budget de fonctionnement de moins de cinq milliards de nos pauvres francs. Ce qui devrait lui permettre d’apporter des services de qualité à ses 13.000 usagers quotidiens. De fournir outils et moyens de formation pratique et théorique adéquate à ces 3000 étudiants de la Faculté de médecine de l’Université Cheikh Anta Diop et d’écoles de formation paramédicale, qui y trouvent un encadrement auprès des 50 professeurs d’université, 100 assistants de Faculté et 350 médecins en cours de spécialisation.

L’hôpital, aujourd’hui centenaire, premier centre francophone de formation médicale au Sud du Sahara, se meurt. Ce qui passe pour une aberration car il regroupe les meilleurs médecins du pays voir de la sous région et forme plus de 24 nationalités de l’Afrique francophone depuis cinquante ans. Il lui est difficile de se relever à l’état actuel de ses finances et de sa gestion ainsi que de ce qui semble passer comme une option des autorités, aux yeux de plusieurs observateurs, de le voir dépérir, mourir de sa belle mort. Un constat sur lequel s’accorde la Commission médicale d’établissement (Cme) de la structure qui regroupe l’ensemble des chefs de service. Une Cme que soutient tout le corps médical de l’hôpital qui avait depuis 2005 diagnostiqué le mal et en avait informé les autorités de tutelle qui, elles, ont assurément d’autres chats à fouetter, ou à tout le moins éprouvent de réelles difficultés à venir au secours de l’hôpital. Pourquoi ? Mystère et boule de gomme ! A moins que la rumeur persistante d’une délocalisation pour cause de…cession du bail à des investisseurs encore étrangers… pour je ne sais quel autre projet d’un tourisme d’affaire ne soit avérée. Nul ne sait pour l’heure et ne s’en préoccupe outre mesure au demeurant.

En vérité, il se trouve qu’en République et en démocratie, l’obligation de rendre compte fait que les administrations publiques doivent être désireuses de montrer en quoi leur action et leurs décisions sont conformes à des objectifs précis et convenus. Dans le cas, qui nous occupe ici : nous montrer l’efficacité et l’efficience de leur participation à A. Le Dantec. Le pouvoir libéral n’assure-t-il pas qu’il a investi en huit ans plus que son devancier « socialiste » en quarante ans dans tous les domaines de la vie, encore plus dans l’éducation et la santé ? Alors son administration doit être capable d’en démontrer l’effectivité.

La bonne gouvernance commande que les administrations publiques s’attachent à une production de qualité, notamment dans les services rendus aux citoyens et veillent à ce que leurs prestations répondent aux besoins des usagers. Les médecins ne veulent pas autre chose. Ils se désolent cependant de constater les arrêts fréquents et prolongés de plusieurs activités médicales au sein de leur établissement à cause des ruptures itératives de stock de consommables, d’équipements insuffisants et obsolètes, d’infrastructures défectueuses…, mettant en danger de mort les pauvres patients qui ont le tort d’être en même temps démunis et de s’adresser à l’hôpital. Les causes de la crise ont été néanmoins identifiées et portées à la connaissance des autorités depuis les assises de 2005 de l’hôpital. Apparemment pour rien, même si, apprenait-on hier, que le gouvernement allait « solder » les dettes des centres hospitaliers de la capitale. Il s’agit ici de doter un centre hospitalier universitaire, le plus important du pays et de la sous région des moyens nécessaires à sa survie d’abord et à son rôle ensuite et de noyer le problème dans la marre des autres gênes que l’on a suscitées ou laissées apparaître et prospérer assurément.

La prospective exige des autorités publiques d’anticiper les problèmes qui se posent et se poseront à partir des données disponibles et des tendances observées, ainsi que d’élaborer des politiques qui tiennent compte de l’évolution des coûts et des changements prévisibles. Toute chose que les blouses blanches se sont évertuées à fournir aux décideurs qui ont d’autres préoccupations. La situation sérieuse que vit l’hôpital mérite une réponse sérieuse. Tout comme celle que vit la nation tout entière. En attendant, c’est le sauve qui peut.



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