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Eau et Assainissement à Pikine Alerte ! La banlieue souffre.

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Eau et Assainissement à Pikine Alerte ! La banlieue souffre.
En cette période hivernale, la banlieue constitue un terreau fertile pour le développement de toutes sortes de maladies. Inondations et eaux impures à la consommation cohabitent aisément avec les amoncellements d’ordures. Dans la localité de Pikine Wakhinane, l’impuissance et l’insatisfaction des populations fait régner un fatalisme lourd de dangers. Reportage.

Péril hydraulique en banlieue

Le supplice des populations

Payer sa facture d’eau sans la consommer ! Eau saumâtre, impropre et infecte, c’est le calvaire que vivent perpétuellement les populations de la banlieue qui se disent être les plus mal lotis en eau. Grincements de dents, ras le bol et frustrations sont les sentiments les mieux partagés chez ces populations qui n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.

Il ne fait pas bon consommer l’eau du robinet à Pikine Wakinane. Et cela, les populations de la banlieue, plus précisément celles de Wakhinane le clament haut et fort. En effet, habitant depuis une dizaine d’années dans la localité, cette dame du nom de Adji Maguette Sall nous explique ses déboires : « l’eau est trop sale. Moi et ma famille, on ne la consomme pas. Chaque jour, nous faisons un véritable parcours du combattant pour nous en procurer à Guinaw-Rails. On est obligé de faire la navette tous les jours et les charrettes constituent notre seul moyen de locomotion». À raison de 150 Fcfa le bidon 20 litres, c’est un véritable supplice que vivent ces braves ménagères. Sa voisine, Dieynaba Diop ne se fait pas prier pour nous exprimer son ras-le-bol : « on dirait du nescafé. Et quand on la laisse se reposer, on constate une couche noirâtre au fond des bassines. La majorité du quartier ne boit pas cette eau. Avec cette eau, nous risquons tous de tomber malades. Nos enfants se plaignent de diarrhée, de maux de ventre, de boutons et de démangeaisons sur le corps. Vraiment c’est du n’importe quoi. Nous utilisons cette eau seulement pour nos besoins secondaires ». D’après ces ménagères, l’état du Sénégal ne leur vient pas en aide. On dirait qu’ils ne les considèrent pas comme des citoyens. La Sénégalaise Des Eaux (SDE) ne vient dans la localité qu’à la fin du mois. Et encore ! Pour seulement relever les compteurs. Même son de cloche au quartier Thiaroye Djida Kaw. « C’est nous qui gérons. Et avec le peu de moyens dont nous disposons, nous dépensons plus que prévu. L’eau que nous consommons nous revient presque à 500 fcfa par jour. Et l’on se pose la question de savoir combien cela va nous revenir à la fin du mois, sans compter nos factures. On dirait qu’on est retourné à l’époque préhistorique à Pikine» déclare Adji Ndiaye. Et l’hivernage n’arrange rien à la chose. Avec les inondations, les ordures empilées çà et là, c’est la catastrophe dans la banlieue. Avec tous les problèmes auxquels les populations sont confrontées, la banlieue survit plus qu’elle ne vit. Les propos de Ndioba Seck habitant de Djida Thiaroye Kaw confirment bien cela : « Je ne bois pas l’eau. Car elle est d’une couleur indescriptible et au lieu d’être inodore, cette eau a une saveur infecte. Seuls les gens qui en ont les moyens s’en sortent grâce à l’installation de pompes à eau. Sinon nous sommes confrontés à tous les problèmes du monde. » Et la liste est loin d’être exhaustive. L’hivernage et l’affluence de moustiques aidant, le paludisme, les inondations et le non-ramassage des ordures sont des phénomènes très récurrents et constituent les plaies de la banlieue. « Pour contrer la déferlante que constitue l’eau en ces périodes de fortes pluies ; nous comblons la devanture de nos maisons avec du sable qui nous revient à 1500Fcfa. Quant aux ordures, nous avons initié notre propre système de ramassage » déclare Adji Maguette Sall. Quid du rôle de la mairie ? Les populations s’interrogent sur sa présence et doutent même de son efficacité. Dans la mesure où, ces dames disent ne même pas le connaître et n’ont écho de son existence que lors de meeting. «On dirait que nous sommes les oubliés de cette Alternance» continue Maguette Sall. «Le problème de l’eau sera toujours d’actualité ici à Pikine et tant que l’Etat ne nous viendra pas en aide, elle demeurera notre grand handicap. Il faut que les autorités interviennent » termine Adji Ndiaye. Choc et ahurissement sont les sentiments qui prévalent le plus aux yeux d’un non avertis. Eaux usées, ordures qui jonchent la chaussée, moustiques, tel est le sombre cliché qui dépeint la banlieue. Mais ce cas de figure n’est pas du tout spécifique aux quartiers périphériques de Dakar. Nous le rencontrons presque partout dans Dakar. En attendant des améliorations qui semblent relever de l’utopie, les populations sont dans l’expectative et pour l’instant, elles croisent les doigts. D’ailleurs lors du débat d’orientation budgétaire de l’année 2007, le député Fatou Younouss Aidara a plaidé auprès du Ministre d’Etat, ministre de l’Economie et des Finances pour une amélioration de la qualité de cette eau. Même si elle soutient que tous les jours, les laborantins de la Sénégalaise des Eaux (Sde), les rassure que cette eau est de bonne qualité. Et on serait en passe de se demander si cette eau qui est source de vie n’est pas en train de se muer en source de maux en tous genres.

INSALUBRITE AU MARCHE "SANDIKA"

Les viseurs sont au rouge

Les problèmes d’assainissement de la banlieue ne sont pas encore relégués aux oubliettes. Les commerçants du marché syndicat ne diront pas le contraire : eau stagnante, gravats et marchandises dispersés au sol, les vaillants vendeurs cherchent coûte que coûte des solutions pour remédier à ce problème tout en se souciant de comment liquider leurs stocks fruitiers.

Respirer l’air du marché «Syndicat» de Pikine relève d’une véritable prouesse. Une odeur pestilentielle et nauséabonde vous titille les narines aux abords de ce marché très réputé pour la variété de ces fruits. En effet, les problèmes d’assainissements et d’inondations sont en train de faire des ravages. « Syndicat, un marché quotidien situé au cœur de la banlieue pikinoise en souffre. Les commerçants venus d’horizon divers comme le Mali ou encore la Guinée sont confrontés à des situations lamentables. Avec les inondations et les déchets, les clients commencent à se faire rare et les lois de l’offre et de la demande disparaissent à petit feu. Saletés et inondations sont logées à bonne enseigne dans ce marché qui, cependant ne désemplit pas. Indifférents à cet état de fait, les commerçants continuent de vaquer le plus tranquillement du monde à leurs occupations, dans une atmosphère infernale. Les vendeurs, habitués de la situation et des lieux cherchent des moyens pour écouler leurs marchandises. Niokhobaye Gueye, vendeur et responsable du marché affirme que « depuis que nous avons quitté le marché Colobane précisément à «Angle mousse», le marché est resté comme tel. La situation ne s’est guère améliorée. À notre arrivée, nous avons trouvé un lieu mal assaini, les ordures sont rarement ramassées ou presque jamais. Dans les rares cas, c’est une fois par mois ». Sur cette lancée, Pape Malick, un autre vendeur embouche la même trompette et confirme les propos de Niokhobaye Gueye. Il demande aux autorités étatiques de leur venir en aide soit en mettant à leur disposition des véhicules qui évacuent les ordures ou en plaçant à chaque coin du marché des bacs à ordures. M. Doguo, un vieux vendeur atteignant la soixantaine, comme pour dire qu’il n’y a pas d’âge pour gagner sa vie à la sueur de son front fait partie des pères fondateurs du marché. L’air pensif, assis dans un banc et occupé à mettre de l’ordre dans ses marchandises, il est entouré de toutes sortes d’ordures et de mouches. Selon lui, le marché n’a jamais était assaini. «Quand on n’a pas ce que l’on veut, on se contente de ce dont on dispose» lance-t-il laconique. «La mairie devrait déployer certaines mesures pour régler les problèmes d assainissement car non seulement ce lieu est un endroit où on vend de la nourriture, mais il constitue aussi un lieu de rencontre et de brassage culturelle. Nous implorons l’aide de l’État » continue-t-il. Avec l’hivernage, l’inondation constitue un phénomène récurrent. Et ce n’est pas Monsieur Baba Diop, un autre commerçant gérant de cantine, qui nous démentira. «Avec l’inondation, toutes nos activités sont freinées. D’ailleurs, je devais même recevoir une livraison, mais l’eau non seulement a empêché le camion d’apporter la commande, mais aussi, elle a démoli une partie de ma cantine». Poursuivant, il déclare «En plus, ce n’est pas bon pour un pays en voie de développement. Nous sommes obligés de nous conformer à la situation». En désespoir de cause, ce boutiquier rencontré non loin des lieux use de l’ironie et demande au Président de leur fournir des pirogues pour que les clients puissent pénétrer à l’intérieur du marché. À l’unanimité, les commerçants et habitués du marché «Syndicat» se sont soulevés comme un seul homme pour dénoncer les conditions inhumaines dans lesquelles ils exercent leur métier. Comme pour dire qu’un corps sain dans un environnement sain » est nécessaire à l’épanouissement de tout individu. Et nul n’est censé ignorer qu’insalubrité rime avec maladie.

Le regard du Médecin : « Le constat est là mais… »

Au Sénégal, hivernage rime avec inondations. Et qui dit inondation, dit insalubrité Et ce sont les populations qui en souffrent. Surtout celles de la banlieue. Désespérés, ces populations le sont et déplorent les maux qui gangrènent leur quotidien et menacent leur santé. Face à leurs craintes, un médecin nous apporte des éclaircissements.

Et c’est parti ! L’hivernage a démarré avec son lot de problème. Inondations, moustiques, amoncellement d’ordures ; c’est là le sombre tableau qui se dessine sous nos yeux dans la banlieue de Pikine. La plainte des populations n’a pas trouvé un écho favorable auprès des autorités locales. Au district sanitaire Saint Dominique où nous nous sommes rendu, le médecin Mamadou Seck rencontré sur place a confirmé nos craintes. «Nous recevons des cas de paludisme douze mois sur douze, mais il faut noter une forte recrudescence durant la saison des pluies et cette maladie n’épargne aucune tranche d’âge. Aussi bien les femmes, les hommes que les enfants sont concernés » nous dit le médecin. Hormis les cas de paludisme déplorés, les populations se plaignent aussi d’autres fléaux. Et L’eau n’est pas en reste. En effet, il ne fait pas « sûr » de consommer l’eau provenant du robinet à Pikine Wakhinane et cela, les populations nous l’ont fait savoir. Et nul ne sait ce qui peut découler de la consommation de cette boisson, source de vie. Nul n’est épargné et selon toujours le docteur Mamadou Seck, médecin généraliste «nous sommes tous confrontés à ce problème. Même ici à l’hôpital, nous vivons ce calvaire. Et on reçoit souvent des cas de maladies diarrhéiques». Mais le docteur Seck se veut prudent et n’impute pas la responsabilité de cette impureté de l’eau à la Sénégalaise De l’Eau (SDE). «Le constat est là. Quand on dépose, par exemple un verre d’eau et qu’on le laisse reposer au bout d’un certain temps, on remarque en effet un dépôt de substances non identifiées au fond du verre, mais on ne peut pas incriminer la Sde.» Quid des boutons et démangeaisons que les populations constatent sur leurs peaux ? Monsieur Seck nous signifie son inaptitude à se prononcer sur la question « cela ne relève pas de ma compétence ». La défaut de collecte des ordures fait aussi partie intégrante des maux déplorés par les populations. Heureusement, aucun cas de choléra n’a encore été signalé. Le médecin Mamadou Seck préconise cependant une série de mesures pour enrayer le fléau. L’enfouissement ou l’incinération sont avancés comme solution mais il ne sont pas sans conséquences. Car l’enfouissement peut contaminer la nappe phréatique et avec l’incinération,il faut prendre en compte les asthmatiques. «La meilleure solution reste et demeure le ramassage» continue le docteur Seck. D’autres mesures préventives ont aussi été abordées pour lutter contre le paludisme. Depuis l’instauration du programme de lutte contre le paludisme, des avancées sont notées comme la réduction du prix des moustiquaires imprégnés qui est passé de 2500Fcfa à la modique somme de 1000Fcfa. Ces moustiquaires sont mis à la disposition de populations et sont disponibles dans tous les districts sanitaires de Pikine. Mais le docteur déplore l’absence de campagnes de sensibilisation à grande échelle. «Et donc, on est devant l’obligation de nous limiter à une conscientisation individuelle, quand les patients viennent en consultation» termine le Docteur Seck.

Carton Rouge au plan Jaaxaay !

Incroyable mais vrai ! Qui nous l’aurait raconté, on ne l’aurait crû. On se croirait dans une mare. Mais cette mare est loin du commun que nos yeux ont l’habitude de contempler. Vu sa couleur et sa nature. Verte, oui, cette eau est verte. D’un vert digne d’une forêt amazonienne. Des enfants sales, la morve sous le nez avec un regard de chien battu. C’est dans ce piteux décor que vit la dame Amy Colé Dieng avec son mari et ses enfants. «Cette eau date de l’année passée et nous avons toujours vécu ici. Nous n’avons pas bougé d’un iota même avec le plan Jaaxaay. Mon mari n’a pas tenu à déménager pour dit-il garder la maison» nous confie-t-elle. Du paludisme, elle et sa famille en ont été épargnés. Et cela grâce aux moustiquaires imprégnés. «Toute la maison est inondée et nos colocataires ont tous déménagé. Seule cette chambre a été épargnée» explique t-elle. C’est au-delà de l’imaginable. Et il paraît inconcevable que des hommes vivent dans de telles conditions d’insalubrité avec les moustiques, les ordures et de l’eau au ras des fenêtres. «Nous arrivons à survivre dans cette saleté grâce à l’eau de javel qu’on asperge un peu partout, dans la cour et dans la chambre et l’Etat ne fait rien pour nous venir en aide» se désole cette femme désespérée.



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