Au moment où l’opinion espagnole reste braquée sur l’arrivée massive d’immigrés sahariens sur l’archipel des Canaries, le journal El País, proche du parti au pouvoir, vient de publier une enquête sur la mort de 48 Sénégalais sur les côtes brésiliennes, au début de l’année 2006.
(Correspondant particulier à Madrid) - Selon l’enquête menée par le journal espagnol, c’est le 24 décembre 2005 qu’un Espagnol résidant aux îles Canaries loue les services d’un certain Amadou pour recruter à Praia, capitale du Cap Vert, 53 jeunes sénégalais à qui il propose de les conduire à l’archipel des Canaries en quelques jours moyenant 1 200 euros (786 000 F Cfa) par personne. Mais ayant des doutes sur la faisabilité et la réussite d’une telle opération, six personnes finiront par désister. Le reste du groupe, dont la majorité est originaire de la Casamance, ne se fera pas prier pour embarquer à bord du yatch de l’Espagnol. On est le 25 décembre 2005. Quatre mois plus tard, en fin avril 2006 précisément, la même embarcation apparaît à 120 mètres des Iles Barbades. Avec à son bord 11 corps momifiés. Le 18 mai dernier, le frère d’une des victimes de cette odyssée macabre, qui vit en Espagne, prend contact avec la garde civile espagnole pour demander l’ouverture d’une enquête judiciaire.
Des conversations que les journalistes du quotidien El Paìs ont eues avec des familles des victimes, il ressort que le yatch se dirigeait bien aux îles Canaries et non au Brésil, comme tentent de le faire croire certaines sources et qu’il y avait bel et bien 48 personnes à bord et non 37. Autre précision de taille : le yatch est sorti du port de Praïa au nez et à la barbe des autorités portuaires. Toujours est-il qu'après trois jours de navigation, l’embarcation tomba en panne, en pleine mer. Et selon des parents des victimes interrogés par El Pais, un yatch de dimension beaucoup plus grande viendra au secours des passagers. En les remorquant. Mais au lieu de naviguer vers le nord, c’est à dire les Canaries, ou le sud jusqu’au Cap Vert, le yatch les conduit vers l’ouest en pleine Atlantique, à la merci des courants nord équatoriaux qui vont du Cap Vert au Bresil.
A raison de 500 mètres à l’heure, le yatch fera presque quatre mois pour regagner le Brésil. Cet état de fait explique la mort des 48 passagers et l’abandon des premiers cadavres en plein océan. Les 11 cadavres retrouvés dans le yatch sont surement les derniers survivants de la tragédie. Ils étaient dispersés dans tous les compartiments du yatch, les corps dans un état de putréfaction si avancée qu’il était difficile de les identifier. N’empêche, El País a pu, à partir de recoupements, établir une liste de 21 victimes, toutes de nationalité sénégalaise (voir liste en bas de page).
Aujourd’hui que les conditions de la mort de ces 48 personnes ont été établies, le frère de l’une des victimes du nom de Malang est en train de remuer ciel et terre pour que les autorités espagnoles mettent la main sur l’instigateur et l’organisateur de ce génocide, qui se trouve être un Espagnol résidant aux îles Canaries.
Ibrahima Khalil WADE Liste de 15 des 48 victimes du yatch, toutes de nationalité sénégalaise : Malang Sané, Moussa Kouyaté, Touba Dibangui, Moro Faty, Malick Dieng, Sounkar Diaw, Yaya Bâ Kaba, Vieux Samaké, Mama Sané, Yacouba Dramé, Tombo Seydi, Malang Tandiang, Malang Samaké, Abdou Dramé, Abdoukhadry Diallo
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