200 000 décès pourraient être évités, si les médicaments utilisés contre le paludisme étaient conformes. L’appel de Cotonou marque-t-il un nouveau départ dans la lutte contre les faux médicaments ?
« Les trafiquants ont compris que c’était plus profitable que de la drogue, parce que c’est beaucoup moins contrôlé. »
L’appel de la fondation Jacques Chirac pour une conférence internationale en 2010, à Genève, pour fixer les règles de lutte contre les faux médicaments, intervient alors que de nombreux pays africains commencent à mesurer l’ampleur des médicaments contrefaits sur la santé publique. D’après l’OMS, un médicament sur quatre utilisé dans les pays en développement serait faux. Et d’enfoncer le clou : « Quelque 200 000 décès par an pourraient être évités, si les médicaments prescrits contre le paludisme étaient conformes à la règlementation. » D’où cette mobilisation sans précédent de sept chefs d’Etat africains autour de l’ancien président français, le 12 octobre dernier, pour signer l’appel de Cotonou (voir encadré).
Les marges seraient désormais en passe de rattraper celles de la drogue.
Au grand dam des pharmacies
Le problème est global. Au Sénégal, 35% des médicaments vendus hors des pharmacies sont faux. Le pays vient d’édicter des mesures énergiques pour mettre fin au commerce des médicaments dans la rue. Au Bénin, qui compte le seul laboratoire de la région, environ 85% des consommateurs de médicaments s’approvisionnent sur le marché informel. Le commerce des faux médicaments occupe 6000 personnes, au grand dam des pharmacies, qui accusent un manque à gagner évalué à 30 milliards de FCFA. Le manque à gagner est tout aussi important pour les recettes de l’Etat. A l’échelle mondiale, les faux médicaments rapportent 45 milliards d’euros par an et représentent, selon l’OMS, près de 10% du marché mondial.
Le bénéfice est de 6000 à 20 000%
Les marges seraient désormais en passe de rattraper celles de la drogue. Interrogé par l’AFP, Amor Toumi, de l’OMS, note qu’un comprimé de faux Viagra coûte 0,05 dollar à fabriquer et que le bénéfice est de 6000 à 20 000%, selon qu’on le vende sur Internet (3 dollars) ou sur le marché officiel (10 dollars). D’après la Fondation Chirac, « 50% des produits pharmaceutiques vendus sur la toile sont faux ou falsifiés ».
« Les trafiquants ont compris que c’était plus profitable que de la drogue, parce que c’est beaucoup moins contrôlé », explique le professeur Marc Gentilini, médecin de la Fondation Chirac. « De plus en plus de morts sont liées à la prise de médicaments trafiqués, sous-dosés ou contenant des impuretés ; on a même vu des vaccins qui étaient remplacés par de l’eau », a déploré le professeur Gentilini.
L’Appel de Cotonou
L’Appel de Cotonou contre les faux médicaments a été signé par l’ancien président français et les chefs d’Etat du Bénin, Boni Yayi, du Burkina Faso, Blaise Compaoré, du Niger, Mamadou Tandja, du Sénégal, Abdoulaye Wade, du Congo, Denis Sassou NGuesso, de Centrafrique, François Bozizé, et du Togo, Faure Gnassingbé, ainsi que par des représentants d’organisations internationales.
Par Mohamed Baba Fall, Casablanca, avec le concours de SGS
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