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LEÇON INAUGURALE DE Me WADE A L’UGB : Entre limitations légales des droits et exigence de la société

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LEÇON INAUGURALE DE Me WADE A L’UGB : Entre limitations légales des droits et exigence de la société

C’est sur cette problématique que le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, lors de sa leçon inaugurale, a décidé « librement » d’inviter les universitaires à réfléchir. C’était ce samedi, lors du lancement officiel, à Saint-Louis, des festivités des 20 ans de l’Université Gaston Berger (Ugb), la deuxième du pays.

Développant le thème, Me Wade a axé son intervention sur la responsabilité d’un chef d’Etat qui détient des instruments que lui confère la Constitution lui permettant de limiter les droits des citoyens en cas de crises majeures mais qui doit également faire face à l’exigence de la société à travers ses forces de pression (religieuses, syndicales, partis politiques).

En effet, le chef de l’Etat a relevé deux limitations qui sont légales et constitutionnelles, notamment « l’Etat d’exception et l’Etat d’urgence », non sans rassurer les Sénégalais. « Ne vous en faites pas, je ne prendrai jamais de telles décision dans ce pays », a-t-il dit. Il a affirmé que l’Etat d’exception existe « lorsque le pays est bloqué et que le président décide de suspendre tous les droits » et que l’Etat d’urgence est « un degré supérieur de l’Etat d’exception, puisque l’exercice de l’autorité est assuré par l’armée ».

A ces deux limitations, s’ajoute « la raison d’Etat ou la raison du Prince ». Le président de la République a estimé que la pression des forces sociologiques peut constituer « un mécanisme de limitation de la primauté du droit dans le pays », faisant remarquer qu’il n’a jamais reçu de pression des religieux pour la nomination de tel ou tel individu à un poste.

« Depuis que je suis là, je n’ai jamais reçu une telle pression, même si parfois on attire mon attention sur quelqu’un. Par contre, il nous est arrivé de prendre des mesures sous la pression des syndicats », a précisé Me Wade. Le chef de l’Etat a promis d’instituer un prix pour l’étudiant qui fera le meilleur mémoire sur les sujets : « Primauté du droit » et « Force et le droit ». Le montant sera 1,5 million de FCfa.

Histoire politique du Sénégal

D’abord, Me Wade, qui s’est posé deux questions sur la notion de la primauté du droit et sa raison, a indiqué que s’il a choisi un tel sujet, c’est pour rester dans le sillage de la réflexion à laquelle l’Ugb invite les universitaires comme lui. Faisant un petit cours d’histoire politique du pays, il a affirmé qu’à l’indépendance, le colonisateur a remis le pouvoir à des hommes qui étaient des députés du Palais Bourbon, leaders interlocuteurs de la puissance coloniale comme Léopold Sédar Senghor, Houphouët-Boigny, etc.

« Et cela sans élection, alors que des partis politiques existaient », a-t-il précisé. Donc la transmission du pouvoir ne s’était pas fait de « façon démocratique ». « Je pense qu’on aurait pu consulter les populations par l’intermédiaire du suffrage universel. Cela n’a pas été fait », a ajouté Me Wade. La conséquence est que partout en Afrique, à l’époque, les détenteurs du pouvoir ont refusé toute dévolution démocratique. « Leur idée, c’était de conserver le pouvoir. A l’époque, prononcer le mot alternance, c’était finir en prison », a dit le conférencier du jour.

Le parti unique a été partout établi. L’expression la plus usitée d’alors était : « un seul bonnet sur une seule tête ». Ce qui, de l’avis du chef de l’Etat, est « intellectuellement difficile à comprendre ».

Il a indiqué cependant que le Sénégal se situait dans une situation particulière, la Constitution ayant prévu le multipartisme, comme ce fut le cas du Zaïre. Senghor se trouvait alors dans une situation paradoxale. Mais dans l’esprit d’indépendance, il lui fallait un pouvoir fort.

Tyrannie intellectuelle au Sénégal

Il a créé le parti dominant qui ne pouvait germer que sur un « terrain de multipartisme mais théorique, tous les pouvoirs étant entre les mains de ce parti, même les syndicats ». Ce système de parti dominant, à travers le temps, s’est consolidé jusqu’en 1965 par deux techniques : la dissolution des autres partis (cas du Pai) et l’absorption (par la proposition de postes à des hommes politiques). C’était aussi l’époque de « la confusion des pouvoirs qui étaient tous sous la coupe du président », a expliqué Me Wade, dénommant cette période de « l’ère du barracuda, ce gros poisson qui se nourrit des plus petits ».

En 1974, le Parti démocratique sénégalais (Pds) fut créé dans cette atmosphère, à la « surprise générale » et à sa suite, la deuxième centrale syndicale en 1975. On aboutit alors à la « loi des 3 courants : socialiste, libéral et marxiste ». Mais, Senghor a accepté un 4è courant, celui conservateur, avec cependant une réglementation stricte à la base que le chef de l’Etat a jugé « grave ». Car, a-t-il indiqué, « aucun leader n’avait le droit de parler d’un autre courant que le sien, même à l’extérieur ». Cela n’était rien d’autre qu’une « tyrannie intellectuelle », a estimé Me Wade qui n’a pas manqué de manifester son dépit parce que ne pouvant pas accepter qu’un intellectuel de la trempe de Senghor réagisse de la sorte.

« Je ne pouvais pas comprendre qu’un tel projet puisse sortir de la tête d’un intellectuel comme Senghor », a-t-il fait remarquer, précisant cependant qu’il n’était pas l’auteur mais bien un de ses assistants techniques. « Je l’ai dénoncé », a souligné le président Abdoulaye Wade.

Réactions, Réactions...

Pr MOUSSA DAFF, LINGUISTE-GRAMMAIRIEN A L’UCAD : « C’est une leçon sur la responsabilité de l’action du politique »

« Dans la leçon inaugurale du chef de l’Etat, on peut facilement identifier la responsabilité d’un président de la République qui est à cheval entre le pouvoir que la Constitution lui confère lui permettant, d’une part, de prendre un certain nombre de décisions et d’autre part, l’exigence de la société dans tous ses composantes comme forces de pression. Il a montré que la qualité d’un chef de l’Etat réside dans sa capacité à réguler et à maintenir l’équilibre entre ce que le droit t’autorise et ce que la société exige de toi. Il a montré en somme que le pouvoir est un jeu d’équilibre qui permet de sauvegarder la démocratie. L’éthique politique réside dans la capacité à gérer les contradictions sociales au profit de la Nation et de l’Etat. C’est pour cela que l’Etat de droit est une force politique comme l’Etat d’exception et l’Etat d’urgence, des instruments juridiques de régulation des crises majeures entre pouvoir et forces politiques et sociales (religieux, organisations syndicales partis démocratiquement constitués). C’est une leçon sur la responsabilité de l’action du politique. Dans la première partie de son discours, c’est l’économiste qui a parlé tandis que dans la seconde, c’est le juriste ».

Pr BAYDALLAH KANE, DIRECTEUR DE L’UFR LSH, UGB : « C’est un grand discours académique et structuré »

« Le chef de l’Etat a fait une bonne leçon inaugurale dans la mesure où ça été non conformiste. C’est un grand discours académique et structuré. Le président Wade a rappelé que les universités doivent s’adapter aux grands développements, à travers le monde, pour contribuer au développement social durable sur la nécessité d’aller vers savoir novateur. C’est de tout cela que nos universités ont besoin. La primauté du droit est très importante, puisque démontrant que tout le monde est en dessous de la loi, y compris le président de la République. Me Wade a rappelé les règles démocratiques de base que l’Etat de droit doit être fondamentalement séparé du pouvoir. Je ne peux qu’adhérer à cette pensée ».

Dr ADRIEN COLY, ENSEIGNANT A L’UGB : « Le rôle de l’intellectuel dans la société a été bien défini »

« Le discours est en droite ligne de la préoccupation de tout le monde, qu’on soit politique, enseignant ou chercheur. C’est comment faire de sorte qu’on ait une université performante, qui réponde aux besoins de la Nation en valorisant les hommes. Le Recteur a dégagé des pistes par rapport à cet Enseignement supérieur, en prenant en compte les innovations stratégiques à l’Ugb. Le président de la République donne tout l’accord du politique à cette démarche, réaffirmant le rôle de l’intellectuel dans la société, c’est-à-dire participer aux débats, remettre en cause et proposer des solutions ».



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