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[ V I D E O Reportage ] Le plomb tue dans la banlieue de Dakar

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[ V I D E O Reportage ] Le plomb tue dans la banlieue de Dakar

Dans une banlieue de la capitale sénégalaise, des enfants meurent empoisonnés par le plomb qui sature le sol. Après des années de recyclage sauvage de batteries automobiles, les autorités n'ont pris que des mesures superficielles.Le sol du quartier de Ngane Diaw à Thiaroye-sur-Mer, une banlieue de Dakar, regorge de plomb. Depuis 1975, des batteries de voiture étaient illégalement stockées au milieu des habitations.

En 1995, le recyclage pour en extraire le plomb est vite devenu un commerce lucratif auquel Aliou Camara a participé. Il se souvient que jusqu'à récemment, "il y avait des exploitants, il y avait des tamiseuses". Il se souvient qu'il trouvait des acheteurs pour des lots de plomb à 200 000 Francs CFA qu'il achetait 150 000 Francs CFA. Selon lui, "toutes les autorités ont regardé faire. Il n' y a pas eu d'intervention".

Entre octobre 2007 et mars dernier, 18 enfants âgés de moins de six ans sont morts intoxiqués. Le taux de plomb maximum, fixé par les toxicologues à 350 microgrammes par litre de sang, a été largement dépassé. Il atteignait 3 500 microgrammes chez les enfants les plus infectés. L'oxyde de plomb ayant un goût sucré, il attire les tout-petits qui portent naturellement leurs doigts à la bouche.

"Tout ce qu'elle vomissait était noir"


Dans une des cours de Ngane Diaw, Aminata Gueye a perdu sa fille Leila, âgée de 23 mois. Elle explique qu'elle l'avait emmenée à l'hôpital en urgence : "Ils lui ont fait des analyses, mais ils n'ont rien trouvé. Ils ont constaté que tout ce qu'elle vomissait était noir. Quand elle est morte, je n'y croyais pas, tout s'est passé en moins de 24 heures."

Voilée de noir, une autre mère en deuil est assise dans la même cour. Aminata Diop rapporte les souffrances insupportables de sa fille de 18 mois. "Tous les enfants sont morts de la même manière. Vomissements, convulsions, mort."

Le saturnisme et toutes les maladies liées au plomb font des dégâts particulièrement importants sur les enfants. Ils assimilent notamment une part plus importante de plomb dans le sang, de l'ordre de 40 à 50 % contre 5 à 10 % pour un adulte.

Le 4 mars dernier, date du dernier décès d'enfant recensé, une famille de victime a enfin donné l'alerte. Le Dr Marie Khemess Ngom, médecin chef de la région de Dakar, s'est rendue sur les lieux.
 
Après les différentes analyses, il est apparu que le plomb était à l'origine de ces décès. Elle précise que ce métal " a pour prédilection de faire des dégâts importants sur le système nerveux, les reins, la moelle osseuse."

Mesures insuffisantes


Dans le quartier de Ngane Diaw, les seules mesures visibles prises par le ministère de l'Environnement ont été la saisie de 299 tonnes de sacs de plomb, qui étaient stockés par les habitants, et le déversement de sable par des camions sur la terre à peine décontaminée en mars 2008. Des mesures jugées insuffisantes selon des experts en décontamination de zones polluées.

Selon les habitants de Thiaroye, le trafic, qui a cessé avec la mort des enfants, se faisait principalement avec des acheteurs indiens qui gèrent la casse de Pikine, une banlieue voisine.

Interrogé sur ce qu'il recycle dans les batteries, un homme qui se présente comme le propriétaire des lieux confirme récupérer "le plastique et le plomb. On mélange le plomb avec autre chose et on le vend".

Sans réponse à notre demande de filmer dans le centre social Guindi où sont pris en charge les enfants victimes de l'intoxication depuis le 1er juillet, nous n'avons pu confirmer si l'état de santé des 26 enfants qui y sont traités s'est amélioré.


Les enfants soignés ne devraient pas pouvoir regagner leurs foyers de Thiaroye, toujours contaminés. Selon les ministères de la Famille et de la Santé, ils devraient être placés dans des familles d'accueil en attendant que les familles intoxiquées puissent à leur tour être prises en charge.

Leurs parents redoutent l'éloignement et les problèmes de relogement. Aujourd'hui, 634 adultes qui attendent toujours une désintoxication.

A ce jour, aucune procédure judiciaire n'a été entamée pour déterminer les responsabilités de la pollution.



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