Dans un communiqué rendu public mardi, le Collectif des diffuseurs et éditeurs de presse (Cdeps) a apporté son soutien à Abdou Latif Coulibaly qui a été inculpé il y a une dizaine de jours par un juge d'instruction. Pour les patrons de presse le parquet doit arrêter la procédure. Lire le communiqué.
"Au mois de juillet 2007, notre confrère Abdou Latif Coulibaly,
Directeur de publication de l’hebdomadaire : La Gazette, a publié un
ouvrage intitulé : Loterie Nationale Sénégalaise (Lonase) : chronique
d’un pillage organisé. A la suite de cette publication, le Directeur
Général de ladite Société et la Lonase, elle-même, ont cité l’auteur à
comparaître devant le tribunal régional hors classe de Dakar. Le
tribunal saisi, statuant contradictoirement, en audience pénale, a
décidé de débouter les plaignants, en déclarant irrecevable la procédure
initiée par Monsieur le Directeur Général de la Lonase. Ce dernier a
immédiatement interjeté appel de la décision rendue par le tribunal
régional de Dakar. Cette affaire qui a été évoquée devant la Cour
d’appel de Dakar, le 18 juin 2010, a été renvoyée à l’audience de la
Cour fixée au 5 novembre 2010. Après avoir perdu la première étape de la
procédure et en attendant le verdict de la Cour d’appel, le même
plaignant avait sollicité et obtenu du parquet de Dakar de déposer, en
son nom et au nom de la Lonase, une nouvelle plainte, auprès du juge
d’instruction du premier cabinet du tribunal régional de Dakar. C’est
ainsi que le parquet a saisi par un réquisitoire introductif le doyen
des juges d’instruction du tribunal régional, au courant de l’année
2008. Le juge a été relancé, au courant du mois juin 2010, par le
parquet qui lui a déposé un réquisitoire supplétif, lui ordonnant de
poursuivre l’instruction du dossier, portant sur le chef d’inculpation
principal de recel de documents administratifs et privés, appartenant à
la Lonase. Le 10 juillet 2010, le juge saisi a convoqué et entendu le
Confrère Abdou Latif Coulibaly et lui a notifié son inculpation. Il a
décidé de l’inculpation du journaliste, mais l’a cependant laissé en
liberté provisoire, en attendant de boucler son instruction. Cette
inculpation appelle de la part du Conseil des diffuseurs et éditeurs de
presse du Sénégal(CDEPS) un certain nombre de remarques : 1) Cette
inculpation qui a été ordonnée sur la base du chef d’inculpation de
recel de documents constitue dans son fond une atteinte grave au
principe de droit qui assure dans le droit positif sénégalais une
protection absolue aux sources du journaliste. Une telle protection ne
peut pas être organisée et garantie par la loi et qu’un juge puisse, en
même temps, ouvrir une procédure d’instruction pénale contre le
journaliste. Une procédure qui, conduite à terme, remettrait
fondamentalement en cause cette protection et cette garantie prévue dans
la loi ; 2) Cette protection organisée par la loi, à propos des sources
du journaliste, est absolue. Elle concerne à la fois les sources
dynamiques (sources humaines) et les sources statistiques (document
divers : écrits, sonores et audiovisuels). Par conséquent, nul ne peut
en discuter au cours d’une quelconque procédure, sans remettre en cause,
et de façon substantielle, la garantie apportée par la loi ; 3) La loi
qui a été adoptée au Sénégal, en juin 2006 portant organisation,
mécanismes et conditions d’un accès libre des citoyens à l’information,
apparaît, aujourd’hui, comme un obstacle juridique disqualifiant la
procédure engagée contre notre confrère Abdou Latif Coulibaly ; 4) La
Constitution sénégalaise, également, en particulier dans son article 8,
enlève toute légitimité à cette procédure et remet substantiellement en
cause sa base légale. Au regard de l’ensemble de ces considérations
juridiques et tenant compte du contexte actuel dans lequel se déroule un
processus de réflexion et d’élaboration d’un nouveau code de la presse,
dont la philosophie de base repose sur l’idée d’un approfondissement
des libertés des journalistes, le CDEPS considère que la procédure
ouverte contre le journaliste Abdou Latif Coulibaly, Directeur de
Publication du journal La Gazette, constitue une entrave grave et
inacceptable au libre exercice du métier de journaliste au Sénégal. Le
Cdeps s’étonne et s’insurge d’autant plus contre les poursuites
ordonnées contre le journaliste, que le dossier global de cette affaire
et les faits qui lui valent aujourd’hui son inculpation, ont été par ses
soins transmis, aux fins d’enquêtes, à la Commission nationale de lutte
contre la concussion et la corruption au Sénégal (Cnlcc). Et cette
dernière a conduit ses propres investigations et a produit un rapport
circonstancié au chef de l’Etat à qui elle a demandé de faire poursuivre
le Directeur général de la Loterie nationale sénégalaise (Lonase) et
l’ensemble de ses complices qui ont été dénoncés dans le livre du
collègue poursuivi. Ceux qui auraient dû être normalement poursuivis
pour répondre de leurs actes devant le juge, semblent, dans le cas
d’espèce, bénéficier d’un coup de pouce des magistrats du parquet, pour
tenter de faire punir un journaliste qui n’a fait rien d’autre que son
métier d’informer.
Le CDEPS appelle le parquet à mettre un terme à cette procédure et exhorte le gouvernement à engager, sans délai, une discussion franche et utile, pour donner un sens plus concret au principe de droit de la protection des sources du journaliste, telle que définie et consacrée par le droit positif sénégalais. Le CDEPS invite le comité scientifique qui travaille sur la réforme du code de la presse à trouver une solution de droit réaliste, pour régler dans le code en élaboration la grave contradiction qui existe entre le principe de protection des sources du journaliste et les lois pénales qui prévoient et répriment le délit de recel de documents. Le CDEPS assure son soutien journaliste inculpé et réitère son engagement à œuvrer, sans relâche, pour l’aménagement d’un cadre et d’un espace médiatique garantissant de meilleures conditions d’exercice de leur métier par les journalistes et de meilleures conditions d’existence et d’épanouissement de l’entreprise de presse au Sénégal".
Le CDEPS appelle le parquet à mettre un terme à cette procédure et exhorte le gouvernement à engager, sans délai, une discussion franche et utile, pour donner un sens plus concret au principe de droit de la protection des sources du journaliste, telle que définie et consacrée par le droit positif sénégalais. Le CDEPS invite le comité scientifique qui travaille sur la réforme du code de la presse à trouver une solution de droit réaliste, pour régler dans le code en élaboration la grave contradiction qui existe entre le principe de protection des sources du journaliste et les lois pénales qui prévoient et répriment le délit de recel de documents. Le CDEPS assure son soutien journaliste inculpé et réitère son engagement à œuvrer, sans relâche, pour l’aménagement d’un cadre et d’un espace médiatique garantissant de meilleures conditions d’exercice de leur métier par les journalistes et de meilleures conditions d’existence et d’épanouissement de l’entreprise de presse au Sénégal".
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