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Liberté d’expression : La société civile réclame une réforme urgente de l’article 255

Auteur: Seneweb News

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Dans une déclaration conjointe publiée le 26 mai 2025, des organisations de la société civile, des mouvements citoyens et des médias ont exprimé leur profonde inquiétude face à l’usage abusif de l’article 255 du Code pénal sénégalais, qui criminalise la diffusion de « fausses nouvelles ». Signée par des acteurs tels qu’AfricTivistes, AfrikaJom Center, Article 19 Afrique de l’Ouest, RADDHO, le mouvement Y en a marre, ainsi que des journalistes comme Jaly Badiane et Ayoba Faye, la déclaration dénonce une série d’arrestations et de poursuites visant journalistes, activistes et citoyens engagés, un an après l’élection du Président Bassirou Diomaye Faye.
Le cas récent d’Abdou Nguer, chroniqueur à SenTV, illustre cette tendance préoccupante. Placé sous mandat de dépôt le 20 mai 2025 pour « diffusion de fausses nouvelles », « offense au Chef de l’État » et « apologie de crime ou délit », Nguer est poursuivi pour des analyses diffusées sur TikTok, notamment sur l’affaire PRODAC et un rapport de la Cour des comptes. Ce n’est pas sa première interpellation : le 17 avril, il avait déjà été détenu pour des propos sur feu Mamadou Badio Camara, ancien président du Conseil constitutionnel, à la suite d’une auto-saisine du procureur.
D’autres cas récents incluent les militants de Pastef, Assane Gueye (Azoura Fall) et Ousseynou Kairé, jugés le 21 mai pour avoir injurié l’ancien président Macky Sall, risquant six mois de prison, dont trois ferme. L’activiste Assane Diouf, arrêté le 3 mars pour des motifs similaires, et le journaliste Simon Faye, placé sous contrôle judiciaire le 10 avril, figurent également parmi les victimes de cette répression. Des figures politiques comme Moustapha Diakhaté et Adama Fall ont aussi été ciblées ces derniers mois pour des accusations de diffamation et de diffusion de fausses nouvelles.
L’article 255, qui punit la diffusion de fausses nouvelles d’un à trois ans de prison et d’une amende de 100 000 à 1 500 000 FCFA, est critiqué pour sa formulation vague et son application disproportionnée. Selon la société civile, cette disposition héritée du cadre législatif post-colonial prête à des interprétations subjectives, offrant un pouvoir discrétionnaire excessif aux autorités judiciaires. « Le recours systématique à la sanction la plus sévère, sans prise en compte des circonstances spécifiques de l’infraction, soulève de sérieuses préoccupations quant au respect du principe de proportionnalité », souligne la déclaration.
Un contraste avec les aspirations démocratiques
Ces arrestations vont à l’encontre des engagements de « rupture et de renouveau institutionnel » pris par le Président Faye lors de son élection en 2024, ainsi que des conclusions des Assises nationales de la Justice de juin 2024, qui appelaient à des réformes judiciaires. Elles contredisent également les obligations internationales du Sénégal, notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantissent la liberté d’expression.
Des recommandations pour un changement urgent
Face à cette situation, les signataires appellent à une réforme immédiate de l’article 255, ainsi que de l’article 80, pour les aligner sur les standards internationaux des droits humains. Ils proposent de privilégier des peines alternatives à l’emprisonnement, comme des amendes proportionnées, des travaux d’intérêt général ou des programmes éducatifs sur l’usage responsable de l’information. Ils demandent également la création d’un juge des détentions et de la liberté pour superviser les mises en détention.
Pour les personnes actuellement détenues, telles qu’Abdou Nguer et Assane Diouf, la société civile exige des procès rapides et une remise en liberté immédiate, ainsi qu’un réexamen des condamnations déjà prononcées, potentiellement via des mesures de grâce ou des aménagements de peine. Enfin, ils recommandent de renforcer le rôle des médias indépendants et d’investir dans l’éducation numérique pour lutter contre la désinformation sans porter atteinte aux libertés fondamentales.
« La démocratie ne se résume pas aux élections, elle est une culture », rappellent les signataires, soulignant que ces convocations et arrestations risquent de ternir l’image du Sénégal, souvent perçu comme un modèle de stabilité démocratique en Afrique.
Auteur: Seneweb News

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