(Correspondance) - Où, quand et comment est mort Abba Diédhiou ? C’est à ces questions que les Ziguinchorois tentent d’apporter des réponses pour connaître les tenants et les aboutissants de la disparition brutale du principal suspect dans l’affaire El Hadj Oumar Lamine Badji, du nom du président du Conseil régional de Ziguinchor assassiné le 30 décembre dernier à Sindian, dans le département de Bignona. Abba Diédhiou s’est-il réellement suicidé en sautant du véhicule de la gendarmerie qui le transportait, comme on a tenté de le faire croire ? De toutes les hypothèses émises, celle-là en tout cas semble la moins pertinente. Et pour cause, personne ne sait où s’est réellement produit l’incident. Et personne n’a été témoin d’un tel fait.
Aux dernières nouvelles, on nous apprend d'ailleurs que le véhicule transportant Abba Diédhiou n’a jamais quitté la capitale du Sud. Si l’on en croit nos sources, le véhicule de la gendarmerie a bel et bien embarqué le prisonnier avec comme destination, la compagnie de gendarmerie de Ziguinchor, à 3 km de la maison d’arrêt et de correction. Qui plus est, Abba Diédhiou est bien arrivé à destination. Si drame il y a, précise notre source, il s’est produit dans l’enceinte même de la gendarmerie où le prisonnier, accusé entre autres de trafic illicite d’armes, devait être entendu pour ce délit. Toutes choses qui battent en brèche la thèse de l’accident produit en cours de route.
Dès lors, intervient une autre hypothèse que les populations du Sud ne se sont pas privées d’émettre : celle de la bavure. Abba Diédhiou a-t-il été victime d'une bavure policière ? Si oui, cherche-t-on à protéger quelqu’un et qui ?
Autant de questions sans réponses. Quoiqu’il en soit, la responsabilité des gendarmes enquêteurs semble engagée dans la disparition d’Abba Diédhiou. Et aujourd’hui, cette thèse de la bavure se précise de plus en plus. Selon d’ailleurs nos sources, c’est au cours d’un interrogatoire musclé que le prisonnier est mort, victime de tortures. Certainement surpris par la tournure des événements, les gendarmes se sont précipités pour déposer le corps à la morgue de l’hôpital régional de Ziguinchor. Un corps encombrant qui sera évacué quelques heures plus tard, à Tandine pour y être inhumé, sans qu'aucune autopsie ne soit faite bien qu'il s'agisse ici d'une mort violence pendant que la victime se trouvait sous la responsabilité de l'Etat.
De plus en plus d’ailleurs, cette thèse de la bavure se précise. Faisant du coup de la gendarmerie, la responsable d’une mort qui dérange. Surtout que l’initiative de sortir Abba Diédhiou de la maison d’arrêt et de correction pour un interrogatoire à la compagnie de gendarmerie n’a pas été portée à la connaissance de son avocat, et le juge chargé d'instruire le dossier était absent de Ziguinchor au moment des faits, selon une source proche de l’enquête. Une situation que le conseil de la victime a dénoncée.
Cette affaire est, en tout cas, loin de livrer tous ses secrets. Et les Ziguinchorois vivent dans l’espoir que la lumière sera faite sur cette affaire, comme sur l‘assassinat de l’ex-président du Conseil régional de Ziguinchor.
Mamadou Papo MANE Ansoumana BADJI (ancien secrétaire général du Mfdc) : ‘La mort d'Abba Diédhiou est bizarre’
L'ancien secrétaire général du Mouvement des Forces Démocratiques de Casamance (Mfdc), Ansoumana Badji, a trouvé ‘bizarre’, la mort annoncée mercredi d'Abba Diédhiou, considéré comme le suspect numéro un dans l'assassinat de l'ancien président du Conseil régional de Ziguinchor, El Hadji Omar Lamine Badji. ‘J'ai appris très tôt hier, en fin de matinée, la mort d'Abba Diédhiou, mais je dois tout de suite avouer que les circonstances de sa mort telles que relatées me semblent totalement bizarres’, a notamment déclaré à l'Aps Ansoumana Badji. ‘On a déclaré qu'il s'est suicidé en voulant sauter du véhicule de la gendarmerie qui le transportait vers son village à Tendine, pour les besoins de l'enquête’, a-t-il noté. Mais, affirme-t-il, ‘je ne crois pas qu'Abba, censé être menotté et placé sous forte escorte de la gendarmerie normalement, puisse tenter de sauter du véhicule en mouvement, tout en étant conscient qu'il ne pouvait pas s'échapper. Autrement, a-t-il poursuivi, ça aurait été une erreur grave de la part de l'escorte de la gendarmerie, que de transporter dans un véhicule sur une longue distance un suspect principal dans une enquête de cette nature sans prendre toutes les précautions d'usage’.
Se prononçant sur la thèse selon laquelle la gendarmerie conduisait le suspect dans son village où elle aurait trouvé une cache d'armes lui appartenant, Ansoumana Badji a dit trouver cette autre version tout aussi ‘bizarre’. ‘Tout, autour de cette mort, est suspect et mérite d'être élucidé au même titre que l'assassinat d'El Hadji Omar Lamine Badji’, a-t-il estimé. ‘Je pense que des crimes pareils ne doivent pas rester impunis quel que soit le côté où se trouvent les auteurs et leurs commanditaires’, a-t-il indiqué.
Le candidat à la succession de l'abbé Diamacoune Senghor à la tête du Mfdc a déclaré être ‘prêt à collaborer avec les autorités pour la manifestation de la vérité dans l'affaire de l'assassinat d'El Hadji Omar Lamine Badji s'il était avéré que les auteurs d'un tel crime étaient du Mfdc’.
0 Commentaires
Participer à la Discussion