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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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Plein Sud - Chaos

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Plein Sud - Chaos

Au moment où ces lignes sont écrites, ma machine aura subi plusieurs arrêts intempestifs, en raison des délestages de la Senelec. Plus un seul jour sans que les délestages de la société ne se rappellent tristement à nous en nous laissant dans le noir. Même les jeunes enfants ont appris à se familiariser avec le fameux terme qui nous plonge dans l’obscurité. Il n’y a pas de mots pour décrire l’impuissance et le néant dans lesquels nous nous débattons tous les jours. Sauf le chaos peut-être. La vie quotidienne est devenue un véritable chaos au Sénégal ou à Dakar tout le moins. Le pire est cependant à venir car la Senelec ne prévoit la fin des perturbations que pour la fin de l’année. Nous pressentons que ce n’est que le début de nos malheurs. C’est cela qui est angoissant. La situation est inquiétante et même grave.

                                                                                                                             
Les délestages sont tellement monnaie courante que lorsque nous tournons le bouton de l’interrupteur et que la lumière s’allume, nous manquons nous agenouiller devant un tel miracle. S’éclairer, conserver ses aliments à basse température, regarder son programme télé favori sont devenus une denrée si précieuse que cela en devient un privilège, une exception. Alors que nous avons adopté le train de la modernité et équipé nos maisons avec de l’électroménager, qui marche au courant électrique comme son nom l’indique, nous voilà obligés de revenir à la bougie de grand-mère et à la vie de caverne de notre ancêtre Cro-Magnon. Bénéficier des lumières de la fée Électricité nous paraissait normal, automatique et machinal. Aujourd’hui que c’est devenu aléatoire comme le Pmu nous mesurons la chance que nous avions. Nous regrettons d’ailleurs ce temps béni où ne nous ne soucions de la Senelec qu’au moment de payer les factures.

Les délestages nous rendent chameau, presque abrutis. Abrutis à force de faire attention à tout. Attention de ne pas créer un incendie avec les éclairages d’appoint. Attention à ce que les variations de tension n’abîment le frigo, le congélateur ou la machine à laver. Nous en devenons paranoïaques et angoissés. Il nous arrive de guetter fébrilement le moment où un clic annonce traîtreusement la coupure. Finis alors le dîner, la discussion à bâtons rompus ou tout autre activité familiale. C’est la débandade totale et la course aux abris comme durant les bombardements de Londres. Je ne vous parle même pas de la terreur que l’obscurité inspire aux enfants et du retour imposé au moyen âge de la révolution industrielle. L’obscurité n’arrange en réalité que le tête-à-tête amoureux et les jeux de mains, jeux de vilains. Le plus triste est que nos esprits et nos organismes se sont habitués à ces délestages obsolètes indignes d’une nation qui ambitionne de siéger au conseil des Nations Unies !

Nous ignorons ce que nous avons fait au Bon Dieu pour mériter de vivre comme dans le pays le plus pauvre de la planète, dans des conditions indignes des ambitions et des proclamations de nos autorités. Apparemment, les déclarations des autorités qui nous gouvernent sur la bonne santé de notre économie sont loin de la vérité crue. Manifestement, les prétentions du régime libéral à l’émergence d’un Sénégal moderne sont largement inférieures à la réalité de nos capacités et de nos possibilités à court et moyen terme. Nous n’osons même pas imaginer comment nos autorités comptent conduire des projets aussi ambitieux que la Plate-forme de Diamniadio si la Senelec n’est même pas capable de fournir les ménages et les entreprises. C’est comme vouloir installer une infrastructure sophistiquée sans avoir les moyens de la faire marcher. Disposer de la fourniture de l’énergie électrique est un minimum pour un pays qui se veut civilisé. Nous avons reculé dans un passé que nous ne connaissions pas, en tout cas pas depuis l’indépendance du Sénégal. Comme l’a écrit mon confrère Madiambal Diagne du Quotidien, nous vivons à présent au rythme de la Guinée Conakry.

La comparaison n’est pas fortuite. Dans ce pays voisin frère, l’électricité est une question privée et personnelle : pas de générateur, pas de courant. Pas de voirie dans la capitale, pas d’éclairage public la nuit, pas d’assainissement public non plus dans les quartiers populaires. Alors, chacun se débrouille comme il peut. La comparaison n’est pas flatteuse pour notre pays et nos autorités qui se targuent d’être à la pointe du progrès en Afrique. Sans aller jusqu’en Guinée, souvenons-nous des incroyables pénuries alimentaires et énergétiques qui étaient le lot quotidien du prolétariat dans l’ancienne Union soviétique et ses républiques satellites. Notre chauvinisme en prend un sacré coup tout de même.

Il serait temps que le gouvernement se soucie de respecter les droits des citoyens sénégalais qu’il prive de la précieuse énergie électrique. Une telle pénurie est inadmissible dans un pays organisé. L’absence d’une communication courageuse et d’une information du consommateur est encore plus irrespectueuse de la part de ceux qui nous gouvernent. Il y a une situation de crise énergétique. Le gouvernement nous doit des explications sur son incapacité à satisfaire notre demande énergétique. Pas les tentatives d’explication alambiquées et opaques comme celles du ministre de l’Energie et du directeur de la Senelec. Le régime libéral semble vouloir continuer de surfer sur le fatalisme légendaire des Sénégalais pour ne pas prendre ses responsabilités et mettre fin à cette situation anormale et grave dans le secteur de l’électricité. Devrons-nous encore attendre que le représentant au Sénégal de la Banque mondiale tape sur la table pour que la lumière soit ? On se souvient que M.Madani Tall avait fait état d’un dialogue difficile de ses services avec la Senelec. La Banque mondiale s’était même montrée « extrêmement réservée » dans les choix techniques actuels opérés par la Senelec qui sont contraires aux engagements pris. Et le Directeur des opérations de la Banque de nous avertir que « Dakar risquait d’être bientôt dans le noir ». C’est fait.

Le soir, les quartiers de Dakar sont dans la pénombre et ce sont les phares des voitures qui trouent l’obscurité de temps en temps. Les autorités doivent nous éclairer par rapport à ce conflit sur les choix techniques de la Senelec et nous convaincre de leur pertinence. Parce qu’après les délestages et la pénurie de produits pétroliers, c’est l’arrêt de l’approvisionnement en eau qui nous pend très bientôt. Sans électricité, la Sde risque de ne plus pouvoir approvisionner les ménages et alors bonjour la galère. Il ne nous restera plus qu’à monter tous dans les pateras des trafiquants humains pour immigrer clandestinement en Espagne.



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