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PORTRAIT - Aminata Tall, initiatrice de la proposition de Loi pour le report des Locales : Une égérie en clair obscur

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PORTRAIT - Aminata Tall, initiatrice de la proposition de Loi pour le report des Locales : Une égérie en clair obscur

Aminata Tall a 59 ans et mère de trois enfants. Elle est revenue sur la scène publique avec une Loi à controverses, après être longtemps restée au «frigo» de son mentor Me Wade. Le vote d’une loi à l’initiative de cette parlementaire libérale qui sera aujourd’hui sous les néons de l’Hémicycle…

Avant, de Aminata Tall, on entendait: «Elle n’est pas dans le jeu politicien du régime libéral.» Maintenant, c’est en refrain radio que ça court : «Elle est tombée très bas.» Qu’on s’en désole ou qu’on le confirme, Mme le député veut persuader qu’elle a agi dans «l’intérêt» du pays. Au Parlement où sa proposition de Loi prorogeant le mandat des collectivités locales a provoqué l’ouverture de la première session extraordinaire de la législature, Mme Tall Bâ est arrivée, -c’était hier matin- distribuant des accolades, la mine radieuse, un brin de satisfaction éclairant ses yeux comme pour qui veut savourer les premiers instants d’un jour nouveau. Jour de renaissance ou déchéance ? Toujours est-il que la proposition de Loi de Mme Tall Bâ vient de la propulser au devant de la scène, après des années politiques passées en noir obscur. Sous l’ombre ou sous les foudres de ses «frères manipulés», peut-être, depuis le sommet. C’est qu’Aminata Tall en a plein. Son histoire complexe avec le Pds est amour et de désamour, de fidélité et d’infidélité. Idrissa Seck, alors tout puissant n°2 du Pds et Premier ministre l’écarte de son schéma dans le parti comme dans l’Etat en novembre 2002. Mais, elle revient triomphalement le 22 avril 2004, avant de perdre à nouveau son portefeuille de ministre des Collectivités et de la Décentralisation pour retourner auprès de son «seul interlocuteur au Pds», Abdoulaye Wade, à la présidence de la République avec le symbolique titre de ministre d’Etat. Tout court.

Alors, qui est cette femme qui éclate comme elle sait rester éteinte au frigo de ce grand manitou, Me Wade? Qui est cette égérie qui gêne, si elle n’est gênée par les seconds du Pds sous l’alternance? Le psychologue disait, pour signifier que les adultes sont le fruit de leur tendre jeunesse, que «l’enfant est le père de l’homme». Pour notre cas ici, on paraphraserait pour dire «que la fille est la mère de la femme». Alors là, certains traits de caractère de Mme Aminata Tall sont à chercher dans son enfance auprès d’un «père autoritaire». Ecoutons-là : «J’ai eu une jeunesse normale, j’ai vécu avec mes parents que j’ai quittés après l’entrée en sixième.» Nous sommes en 1963 et elle rejoint l’internat pour sept ans. «L’internat a joué un rôle sur ma personnalité ; il m’a permis de bien connaître les gens, de les respecter, de respecter la quiétude de l’autre, son environnement, son état d’esprit, donc à être tolérant et à combattre l’esprit d’égoïste.»

«LA JEUNE FILLE EST LA MERE DE LA FEMME»

L’influence de l’internat sur la future égérie de Diourbel est renforcée par une éducation parentale «très rigoureuse sur les principes», qui a développé chez elle «le culte de la dignité et de l’honneur». De cette jeune fille, formatée «dans les valeurs traditionnelles» entre un père autoritaire qui a parié sur ses études et une «mère généreuse», naîtra plus tard la titulaire d’un Diplôme d’études approfondies en lettres (Université Cheikh Anta Diop, Dakar), qui a fait une partie de ses humanités à l’université du Québec (Canada), la chercheuse formatrice à l’ex-Ecole normale supérieure de Dakar (1986-1990). Elle fait ses armes dans le mouvement syndical avant de rejoindre le Parti démocratique sénégalais (Pds) en 1978, quand elle vote pour la première fois. D’avril 2000 à mai 2001, la présidente de la fédération du Pds de Diourbel a occupé le poste de ministre de la Famille et de la Solidarité nationale, a hérité du ministère du Développement social et de la Solidarité nationale, son dernier poste, avant un premier départ du gouvernement, issu de l’alternance. Auparavant, elle devait rejoindre, à deux reprises, le gouvernement de majorité présidentielle élargie de l’ex-président socialiste Abdou Diouf comme ministre déléguée chargée de l’Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales (avril 1991-octobre 1992). A la sortie des «ministres de Wade», lors de la pré-campagne électorale de 1993, elle avait suivi son mentor, alors ministre d’Etat et candidat à la prochaine présidentielle. Avec le «Pape du Sopi» et ses autres «frères» de parti, elle quitte le Président Diouf pour, à nouveau, préparer l’élection présidentielle de 2000. Dire et écrire que Aminata Tall n’a foi qu’à Me Wade n’est alors qu’un constat. Le sujet fait jaser. On raconte même des choses sur leurs relations. Mais, elle recadre et clarifie dans ses «Confidences» au tout premier numéro du journal Le Quotidien : «On s’est connu à distance à travers ses activités d’opposant.» Moustapha Diakhaté de Waccok Alternance confie : «Quand elle adhérait au Pds vers les années 80, le pouvoir de l’époque, le Ps, lui faisait la cour. Il était rare de voir une femme universitaire rejoindre un parti d’opposition.» Elle avait déjà fait un choix sur l’avocat tonitruant au charisme débordant. Confidence : «On s’est rencontré dans son cabinet d’avocat, plus tard. Les gens sont toujours tentés de faire des commentaires, je sais qu’il a autant d’admiration et d’amitié pour moi que j’en ai pour lui. Mais… il n’y a pas d’amitié en politique.» Avant de lâcher, un tantinet mélancolique : «On est frères de parti.»

Rappelons simplement que Me Wade l’a réhabilitée, quand Idrissa Seck a voulu l’enterrer. Rebelote dans l’affaire du Programme national de développement local (Pndl) qui l’a opposée avec Macky Sall, alors Premier ministre. Dernièrement, Mme Aminata Tall a «perdu», malgré la solidarité des mouvements de femmes, la bataille de la Présidence du Sénat, après avoir refusé le poste de vice-président de l’Assemblée nationale. N’empêche, elle reste un cacique incontournable dans le dispositif du Pds, même si elle n’en donne pas l’air. Face au leadership de Idrissa Seck ensuite de Macky Sall, Aminata Tall est sortie indemne des batailles engagées. Sa force et son principale arme, c’est qu’elle ne boude jamais le parti, tranchent les analystes. Elle sait s’éclipser et attendre son tour, cette fois-ci qui tarde à venir. Pourtant, elle disait à qui veut l’entendre qu’elle n’entend pas jouer les seconds rôles. C’est que la maire de Diourbel, ancienne présidente du mouvement des femmes libérales n’a jamais bénéficié d’un soutien populaire «sopiste», comme en disposent ses adversaires, lorsqu’il s’agit de s’affirmer.

POLITIQUE, ELEGANCE ET MARIAGE

Ce déficit, Moustapha Diakhaté l’a diagnostiqué et l’«origine» «dans la forte personnalité» de l’égérie. «Elle n’a jamais permis l’émergence de leader au niveau de Diourbel. Quand on veut faire le vide autour de sa personne, n’importe quel vent peut vous emporter. En tant que maire, elle s’est mise en mal avec les commerçants. A la tête du mouvement des femmes, elle n’a pas assuré sa présence dans l’espace politique», regrette M. Diakhaté. Aminata Tall ne voit pas les choses de la même manière et pense qu’en politique les gens changent en fonction des intérêts du moment et ne se préoccupe que de cela. Pourtant, c’est ce que lui reprochent ses adversaires. Moustapha Cissé Lô, député libéral, membre de la fédération Pds de Diourbel l’accuse de se suffire d’elle-même. «Elle ne fait appel aux autres que quand elle a besoin d’eux ; c’est pourquoi elle se sépare toujours avec ses compagnons. Elle n’a pas d’amis d’hier. C’est fréquent chez elle. Tous ceux qui l’aidaient hier l’ont abandonnée aujourd’hui.» Pire, «elle utilise des gens comme des citrons dont on presse le jus pour ensuite jeter l’écorce». Malheureusement, il semble que c’est ainsi que les gens fonctionnent au Pds, se désole El Pistolero. Heureusement, ces défauts sont noyés dans le courage dont fait montre Mme Tall dans ses prises de position, lorsqu’il s’agit de dire non à Me Wade au sein du parti. L’anecdote est rapportée par Moustapha Diakhaté : «En 1992, quand le Pds siégeait dans le gouvernement de majorité élargie de Diouf, une majorité écrasante du Bureau politique s’était prononcée pour le retrait du parti du gouvernement, mais la résolution du Bureau politique ne mentionnait pas ce souhait des militants. Alors, elle a décidé de se retirer du gouvernement pour respecter le choix des militants, malgré le désapprobation du chef du parti.» C’est Talla Sylla à l’époque et Moustapha Diakhaté qui l’avaient rencontrée pour la dissuader d’aller à l’encontre de Me Wade. Entre temps, l’eau a coulé sous le pont. Servez-lui désormais du Madame Bâ. Oui ! Le locataire du quartier de Keur Cheikh à Diourbel vient du haut de ses 59 ans d’épouser un garçon de 45 ans «contre l’avis de ses trois enfants (deux filles et un garçon) et de sa famille», confie un proche. La dame vit une seconde jeunesse, même si elle n’a jamais perdu l’éclat. Elle disait un jour : «J’aime l’élégance.» Ses enfants sont issus d’un premier mariage avec le défunt doyen de la Faculté des Lettres et Sciences humaines, Mbaye Guèye.

Teint noir ébène, à l’éclat comme inoxydable, Mme Aminata Tall est belle. Sans doute, ses yeux de bouche et la blancheur de coton de ses dents bien rangés y sont pour quelque chose. Elle a une taille moyenne et son accoutrement pudique trahit ses formes plantureuses. «Quand j’étais enseignante, j’exerçais un certain charme sur mes élèves.» Ce charme n’a pas quitté cette amie des animaux, des perroquets, notamment car, dit-elle, c’est un oiseau qui représente la vie. L’art la fascine aussi : «Nous sommes tous des artistes, quelque part.» Ses couleurs sont le rose, le mauve et le parme ; ses marques, Channel et Yves-Saint Laurent et son parfum : Angel. Angé-lique, Mme Tall Bâ ?

 



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