Précarité, souffrance et misère dans la banlieue : Fiche de débrouille de la famille Dia

La banlieue dakaroise regorge de familles qui vivent dans la précarité, même si elles ne sont pas victimes des inondations. Une journée passée avec la famille Dia au quartier Sans fil permet de s’en faire une idée de ce qui fait leur lot quotidien de malheurs auxquels ses membres survivent grâce à la bienveillance de leur voisinage et les maigres revenus du père.

Quartier Sans fil. Une localité située à Yeumbeul où les habitants, à l’instar de la famille Dia vivent dans des conditions déplorables. Origi­naire du Fouta, le père Dia a quitté son village natal pour s’installer dans  la banlieue de Dakar, en quête de mieux-être pour lui et sa famille.  C’était vers les années 90, quand il a débarqué à Thia­roye. Au bout de quatre longues années, avec femme et enfants, il décide de déménager pour s’installer à Sans fil. Sans travail ni qualification, Vieux Dia, la quarantaine, a dû se contenter d’un simple emploi de mécanicien. «Je travaille dans un garage mécanique. Je travaille du lundi au samedi pour un salaire mensuel de 40 mille francs Cfa», raconte-t-il. Cet homme marqué par les années, paraît beaucoup plus vieux que son âge.

Son quotidien commence à 7 heures du matin, heure du réveil. Ensuite il se présente à son poste à 10 heures après le petit déjeuner familial. «N’ayant pas de ressources suffisantes, je me contente d’un bol de fondé (bouillie de farine de mil) avant de quitter le domicile. Mon repas de midi se limite à un bout de pain avec un peu d’arachide grillé (thiaff)», confie Vieux Dia. C’est le soir qu’il pourra enfin se rassasier d’un repas des plus simples : «Oh ! Rien d’extraordinaire, sinon du riz au poisson sec» mijoté par son épouse Fatoumata Dia qui est par ailleurs sa cousine. La trentaine finissante Fatoumata dit faire «avec les moyens du bord. On a très peu d’argent. J’attends donc la fin de la journée pour faire le marché afin de pouvoir négocier de bons prix».

Parfois les voisins plus nantis qui «viennent nous offrir de la nourriture», explique cette mère de famille marquée par sa dernière maternité. Le couple a trois enfants : Ahmet, l’aîné âgé de 10 ans fréquente l’école publique de la zone. «Le peu d’argent, on le consacre à notre aîné. Pour lui acheter des vêtements et des fournitures de classe. Pour les au­tres, je fais le tour du voisinage pour leur trouver des habits usés», explique le père de famille. La preuve Aïcha, 4 ans, et le dernier Amadou vieux de seulement sept mois se distinguent par leurs  souliers abîmés et vêtements déchirés.

Autre misère, cette famille doit se serrer pour vivre dans un espace de 8 m2. Un garage en réalité. Et dire que c’est grâce à la générosité d’une autre famille de ce quartier que Vieux Dia, son épouse et leurs trois enfants peuvent dormir sous un toit. A l‘intérieur de ce garage qui leur a été prêté, on découvre un petit matelas déchiqueté, un poste téléviseur en panne, et de vieilles photos de joueur de foot qui décorent les murs. Pas de tapis ni de moquette. C’est sur le sol humide que crèche cette  famille.

«Avec mes 40 mille francs, je ne peux pas louer d’appartement. La location ici en banlieue  et ses environs, c’est minimum 60 à 75 mille francs Cfa par mois. Et avec mon salaire je dois nourrir cinq bouches. En louant un logement, je me retrou­verais dans une situation encore plus dramatique. En plus personne ne me louera une chambre au regard de mes finances», affirme ce mécanicien. Notre interlocuteur de poursuivre : «Lorsque je suis arrivé avec ma femme ici à Yeumbeul  plus précisément au quartier Sans fil, nous faisions du porte à porte pour vendre nos services de ménage. Et grâce à Dieu, une dame propriétaire d’une maison en construction a vu notre situation, et a accepté de nous héberger dans son garage. Nous ne payons aucun loyer. Et l’eau et l’électricité sont à sa charge. J’ai aménagé ce garage. J’ai installé un coin cuisine. Ce n’est pas le luxe mais c’est suffisant pour nous cinq aujourd’hui.» «De toute façon, c’était cela ou la rue», raisonne, l’air fataliste ce père de famille.

Toutefois Ousmane Dia est em­pli d’espoir. En effet, avec le changement de régime, la famille Dia espère que sa situation va changer. Dans le cas contraire le père de famille risque de rentrer tout bonnement dans son village natal, au Fouta.

Hélas, nombreuses sont les familles dans plusieurs localités de la banlieue qui vivent ce même calvaire.