SATURNISME - Suite à l’annonce d’une possible délocalisation de leur quartier : Des habitants de Ngagne Diaw opposés à tout départ

Des populations de Ngagne Diaw, un quartier de Thiaroye-sur-mer, secoué par l’intoxication au plomb, sont contre toute idée de leur déménagement. Une position exprimée à la suite d’une volonté de l’Etat de procéder à une délocalisation.

Un coin du voile entourant les préparatifs de l’expulsion des enfants atteints de saturnisme et de leurs parents du centre Guinddi se dissipe. En effet, suite au conseil interministériel tenu mardi dernier sur le «cas du quartier Ngagne Diaw», miné par du plomb qui a occasionné la mort des mômes et menace la vie des adultes, le ministre de la Famille, Awa Ndiaye, envisage réellement de «reloger» ces familles chez des parents volontaires. Ce, le temps que l’Etat mette sur pied un nouveau «plan Jaxaay».
Puisqu’il n’y a pas une autre alternative, ce quartier doit être effacé de la carte de Dakar pour endiguer le mal, conformément aux directives de l’Organisation mondiale de la santé (Oms). Qui avait signifié à l’Etat du Sénégal que les mesures de décapage du sol, qui ont été prises, n’auront aucun effet salvateur. Au contraire, le plomb avait déjà en ligne de mire les adultes qui présentent un taux de plomb dans le sang «élevé», selon le ministre de la Santé. Safiétou Thiam d’assurer sous ce rapport que son département a mobilisé 140 millions de francs Cfa, en plus de 20 millions de francs du ministère de la Famille, pour «continuer le dépistage du reste du quartier ainsi que de poursuivre la prise en charge des personnes affectées». Des propos relevés à l’Aps, mardi dernier.

«DES SOINS ET NON DE NOUVELLES MAISONS»

Seulement l’idée agitée par le gouvernement de délocaliser le quartier Ngagne Diaw ne semble pas enchanter les populations dudit quartier, situé à Thiaroye-sur-mer. En effet, lors de la visite du ministre de la Santé à Ngagne Diaw, en fin juin dernier, des populations sondées sur une possible délocalisation n’étaient pas favorables à cette alternative. Pour elles, l’urgence est de prendre en charge ceux qui sont déjà malades, mettre en place un plan de suivi médical adapté pour les autres populations, décaper le sol et interdire toute forme d’exploitation du plomb dans le quartier. Des mesures apparemment déjà prises.
Mais les experts nationaux sont aussi catégoriques que l’Oms : il faut vider les lieux, car cette partie de la banlieue est véritablement assise sur une poudrière.
«Nous voulons des soins et non de nouvelles maisons», a tenu à affirmer Demba Diaw, habitant du quartier et père d’une fille de 2 ans qui a rendu l’âme, il y a quelques mois, à cause du saturnisme. M. Diaw, qui est à la tête de toutes les initiatives, «pour restaurer le quartier Ngagne Diaw», est convaincu que le mal ne se trouve pas sous la terre. Il est d’avis que l’exploitation du plomb était la seule explication possible et maintenant qu’elle est interdite, il y a de fortes chances que le saturnisme ne cause plus d’autres dégâts.
Des propos corroborés par son père qui est aussi un «dignitaire du quartier». Très avare en parole, certes, mais son point de vue demeure que la zone n’est pas polluée. La solution salutaire, pour lui, est que les exploitants du plomb soient déguerpis des lieux et, «tout rentrera dans l’ordre». «Ils n’ont qu’à traiter le quartier», rebondit Demba Diaw. Qui renchérit : «Je ne vois pas l’utilité de vider un quartier qui ne souffre d’aucune intoxication. Des familles sont là depuis une vingtaine voire une trentaine d’années. C’est seulement maintenant qu’on a ces problèmes de plomb et comme ces gens (les exploitants du plomb) sont interdis d’activité, le problème va se régler.»