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SERVICES- Alerte rouge à l'hôpital : Sos pour les Urgences !

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SERVICES- Alerte rouge à l'hôpital : Sos pour les Urgences !

«Je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité (…) de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain.» Le serment de Hypocrate est en souffrance dans les hôpitaux où les malades, en cas d’urgence, sont parfois victimes de négligences trop souvent fatales. Mais, ce n’est pas toujours la faute des praticiens qui se retrouvent dans les services d’Urgences, sans les moyens d’exercer leur art. Des situations vécues à Dakar, Diourbel et Vélingara. Mais en cas de fonctionnement défectueux de ses services, l’Etat est responsable du préjudice porté aux malades qui peuvent recourir à la Justice pour réclamer une indemnisation.
Allongé sur un brancard, visage livide, physique frêle, ce patient, octogénaire, attend, à l’entrée du service des urgences de la clinique neurologique du Chu de Fann dans l’espoir, d’être admis. A son chevet, son fils, Mamadou Lam, la cinquantaine révolue, empêche, à l’aide d’un éventail tenu de sa main droite, les mouches de s’approcher de son géniteur sous perfusion, à moitié couvert d’un pagne tissé.
Vêtu d’un boubou marron, bonnet vissé sur la tête, cet homme ne comprend pas pourquoi son malade n’est pas interné alors que, dit-il, tout était calé avant de quitter le Samu de Grand-Yoff où son père était interné. Désemparé, il raconte : «Quand les médecins (du Samu) les ont appelé hier (le reportage a été réalisé le 3 septembre 2008, Ndlr), on leur a dit qu’il y avait de la place pour le vieux ; qu’il pouvait venir. Mais, une fois là, on nous dit qu’il n’y a pas de place», et d’attendre les autorités médicales qui «sont en réunion», informe M. Lam qui est arrivé avec son malade, «depuis 8 heures».
De quoi faire craindre le pire pour les deux infirmiers du Samu qui accompagnent le patient. Les médecins de Fann attendent que le vieux «meurt pour se rendre compte de la gravité de son état de santé» lance, dépité, l’un d’eux. On sent l’inquiétude chez M. Lam qui ne cesse de consulter les deux infirmiers du Samu assis sur le banc installé à l’entrée.

LE «MAUDIT» SESAME
Il est un peu plus de 11 heures, le patient n’est toujours pas admis. Alors qu’un autre jeune patient qui, à l’instant, débarque d’un taxi pour s’affaler sur un brancard, est directement, admis aux urgences. De quoi révulser M. Lam : «Il ne faut pas être malade au Sénégal. Sinon tu meurs. Surtout lorsque tu es vieux parce qu’ils ne bénéficient pas du Plan sésame» qui permet aux personnes âgées de se faire soigner sans bourse délier. Mais, les médecins «préfèrent accorder la priorité aux patients qui paient comptant, plutôt qu’aux vieux», commente-t-il.
Un avis non partagé par Mamadou Lamine Fall, chef de la cellule de communication du Centre hospitalier universitaire (Chu) de Fann. «Le nombre de lits au niveau de la réanimation est calibré à 8 pour, non seulement, le Sénégal, mais aussi pour la sous-région», explique-t-il pour justifier le cas du vieux Lam. Par conséquent, «le service neurologique ne peut recevoir tout le monde». Pourquoi assurer, alors, à ce patient une place avant son déplacement ? «Il y a parfois des impondérables», répond M. Fall qui jure : «Nous ne faisons pas attendre quelqu’un pour le plaisir de le faire attendre.»
Soit ! Dans tous les cas, l’affaire de la dame Maguette Sow qui a perdu son bébé en couches, le samedi 23 août du fait d’un «refus des hôpitaux de Dakar de l’admettre», est assez révélatrice. Salimata Gadiaga Baldé, mère de cette dame, n’en revient toujours pas. «On est parti à l’hôpital militaire de Ouakam, Iho puisque c’est là-bas qu’elle a passé ses visites. Arrivées sur les lieux, la première question était de savoir si son mari a de l’argent. Je réponds que non, qu’il ne travaille pas. On me dit que l’opération est à 150 000 francs Cfa. A nous de nous débrouiller pour rassembler cette somme.» Alors, elles se rendent à la Polyclinique, à la Médina mais, les médecins trouvés sur place lui signifient qu’il n’y avait pas de place, confie Mme Baldé dubitative. A l’Hôpital principal de Dakar, c’est aussi la galère car, Maguette Sow, qui «était en train de saigner», se verra refuser toute prise en charge. Turlupinée, sa mère se rabat sur l’hôpital de Thiaroye où sa fille va perdre son enfant.
Une affaire qui avait suscité l’émoi et qui devait faire l’objet d’une enquête, selon la tutelle. L’année d’avant, Adama Ciss, selon nos confrères de L’Observateur, ballottée entre l’Hôpital général de Grand-Yoff (Hoggy), Nabil Choukair sera finalement admise au centre de santé Roi Baudouin de Pikine, dans la nuit du 20 au 21 octobre 2007. Mais, c’était trop tard. Elle y perd la vie et celle de son bébé. Son mari, peu convaincu par l’alibi du manque de place décida de porter plainte pour «non assistance à personnes en danger». Et dire que le slogan de l’Hoggy c’est : «Au cœur des populations, un hôpital pour la vie.»
Nos tentatives pour rencontrer le Dr. Diaw, dont le service a été accablé par Maguette Ciss, mari et père des victimes, sont restées vaines. La secrétaire, qui avait promis de nous «rappeler», n’a finalement pas réagi. Mais le Dr. Abdoulaye Bousso, chef du service orthopédie de l’Hoggy et responsable du Syndicat autonome des médecins du Sénégal (Sames), évoque une «insuffisance de places». «Ce problème continuera d’exister, car l’offre est largement inférieure à la demande», poursuit-il. «Certains patients croient dur comme fer que tant qu’ils ne viennent pas ici (Hoggy), ils ne seront pas bien soignés. Alors qu’ils pouvaient, pour le genre de maladie dont ils souffrent, se limiter au centre de santé qui est proche de leur domicile», explique le chef du service d’orthopédie.

NEGLIGENCES
Cela dédouane-t-il pour autant les médecins ? Dans tous les cas, au lendemain de la mort du promoteur d’Africa Fête à l’Hôpital Principal de Dakar (Hpd), le 20 juin 2007, Robert Lahoud s’était fait une religion : «Mamadou Konté a été victime des négligences médicales (car) dans les hôpitaux, les gens n’ont pas fait de différence entre Mamadou Konté et de la viande.» (Voir Le Quotidien du 21 juin 2007).
Cette dame, assise sur une natte dans le jardin de l’hôpital n’en doute certainement pas. Em-mitouflée dans un boubou vert olive, teint clair, cette quadragénaire dodue, palabre avec une autre dame du même âge, tout en manipulant son téléphone portable. Elle est sortie de la salle de réanimation, «il y a, juste, 5 jours» où elle et son «fils», étaient internés. Mais l’enfant, lui, y est toujours retenu. Bien que satisfaite des soins qu’elle a reçus, cette bonne dame déplore, toutefois, la longue attente observée au service des Urgences pouvant mettre en péril la vie des patients.
Ce problème, c’est le dénominateur commun des hôpitaux et qui s’explique, selon Moussa Samb, le chef de la cellule de communication de l’Hpd. Il tient à préciser, cependant que l’Hpd «n’a jamais renvoyé un patient». «On ne peut pas acheminer quelqu’un aux urgences, poursuit-il, sans au préalable se préoccuper des procédures administratives systématiques.» C’est-à-dire, vérifier la capacité du patient ou de ses proches à pouvoir payer les frais d’hospitalisations. Des frais jugés «très onéreux» par Adama Ndiaye, rencontré devant la porte de cet hôpital militaire où vendeurs de fruits et taximen font bon ménage. Les prix varient, indique ce jeune homme au teint noir et à la taille moyenne, de 12 à 50 mille francs Cfa par jour, selon le standing. D’où croit-il, l’Hpd est un hôpital de privilégiés où le bas peuple n’est pas toujours le bienvenu.
Non, rétorque M. Samb qui explique : «Dans nos tarifs, nous incluons la restauration, les médicaments. Alors qu’à Le Dantec, vous payez votre restauration et vos ordonnances.» Un argument contesté par Koundian Coulibaly, chargé des relations avec la presse à Le Dantec qui «est l’hôpital qui regroupe toutes les spécialités et les plus grands médecins, mais ayant les plus bas tarifs». Ce qui lui vaut, d’ailleurs «le nom d’hôpital des indigents, car c’est vers nous qu’on renvoie, en dernier recours, les patients». Invoquant le serment d’Hypocrate, M. Coulibaly, prêche : «Un malade, on est obligé de le prendre en charge, sinon il meurt. Notre loi nous y oblige. On ne doit pas lui réclamer de l’argent avant de le soigner.»

Mais arrive-t-il qu’un «indigent» se fasse hospitaliser sans bourse délier ? L’histoire de ce vieux vivant à la Gueule Tapée qui, au bout de trois jours d’hospitalisation à Le Dantec, est «libéré» alors qu’«il ne s’était pas complètement rétabli» semble attester le contraire. «Nous ne pouvons pas garder plus longtemps un Sdf (Sans domicile fixe) dont on ne connaît pas véritablement les parents. Nous avons estimé que son état de santé s’était amélioré et qu’il pouvait se faire soigner de là où il venait», réplique M. coulibaly.

Quid du Plan sésame ? Il esquive.
A l’instar des autres structures sanitaires, l’hôpital Le Dantec est aussi confronté à un déficit criard de places. C’est le cas de la salle de consultation chirurgicale qui jouxte le service d’orthopédie, où deux patients, sous perfusion, allongés sur des brancards, attendent d’être admis. L’un des patients, un maçon, torse nu, pantalon en haillons, a eu un accident sur son lieu de travail. Gagné par la douleur, il remue légèrement son bras gauche. Un élément des sapeurs-pompiers, règle avec un des accompagnateurs de l’accidenté, les formalités administratives. «Qu’une seule personne reste. Les autres peuvent sortir», ordonne-t-il. Mais ce jeune homme, d’une vingtaine d’années, vêtu d’une chemise, ne l’entend pas de cette oreille. La salle d’attente est remplie de monde. Il s’impatiente de voir son parent interné. Il s’emporte : «Ces gens ne travaillent vraiment pas.» Dans tous les cas, le patient, lui, devra «attendre qu’un malade sorte» de la salle.

BEBES CONFONDUS
Mais, le pire se trouve à l’hôpital Abass Ndao qui, depuis la fermeture de la maternité de Le Dantec, a vu son nombre de visiteurs passer du simple au triple. Cette structure sanitaire au statut hybride -c’est un hôpital de niveau 3 mais qui est sous la tutelle de la Mairie de Dakar- n’a pas profité de cette situation pour relever son plateau technique. Situé au carrefour des populeux quartiers de la Médina, Gueule Tapée et de Fass, il ne dispose même pas d’un service d’accueil. Ce qui «est inadmissible» pour Dr Arona Diop, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de la Santé (Syntras).
Si certains patients ont la chance de se faire hospitaliser, ils sont, parfois, victimes de négligences aux conséquences fâcheuses. C’est le cas de Aminata Niang dont le bébé a été confondu avec un bébé sans vie. Une histoire qui avait défrayé la chronique en 2007. «A sa naissance, le bébé était prématuré de 3 mois. Après 8 jours passés à Le Dantec, il a été transféré à Abass Ndao. Lorsque je suis venu lui rendre visite, une sage-femme m’a dit que le bébé est décédé. Je reviens le lendemain, pour récupérer le corps, la même dame me demande d’aller à la morgue pour récupérer le certificat de décès», se rappelle Moussa Niang, époux de la dame qui a été surpris de découvrir, à la morgue «que le bébé était de sexe masculin alors que le mien était de sexe féminin. J’ai interpellé, alors, la sage-femme qui soutient mordicus que mon bébé est de sexe masculin». Révulsé, Moussa Niang avait porté plainte contre les autorités médicales de Abass Ndao.
Interrogé, à l’époque, sur la question, le chef du service maternité, le Pr. Ousmane Ndiaye n’a pas daigné nous parler. Le Dr Arona Diop, lui, dédramatise et parle d’«erreur de communication» entre les autorités médicales et le couple Niang. Mais, quand cette erreur devient récurrente… En 2001, deux bébés (garçon et fille) ont été confondus du fait de la négligence, encore, d’une sage-femme. L’une des mamans n’avait pas voulu restituer le bébé dont elle revendiquait la maternité.



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