Sexualité : Tabou à la maison, acceptée dans les Centres conseil pour adolescent

Au Centre conseil adolescent, il n’y a pas de honte pour discuter de la sexualité. Les adolescents parlent de ce sujet à titre préventif.

Ils ont entre 10 et 25 ans. Ces jeunes et adolescents, garçons et filles, une trentaine environ, n’ont pas pourtant de complexe pour discuter des questions relatives à la santé de la reproduction. A les entendre parler de la sexualité et de la protection contre les grossesses précoces et non désirées, des maladies sexuellement transmissibles, dont le sida et des risques de stérilité en résultant, ils semblent bien connaître le sujet. En tout cas, dans la grande salle de conférence du Centre conseil pour adolescent et jeunes (Cca) logé au Centre départemental d’éducation populaire et sportive (Cdeps) de Guédiawaye, ces questions tabou à la maison ont fait, samedi dernier, l’objet de discussions ouvertes entre eux et des parlementaires allemands venus découvrir l’expérience sénégalaise en matière de lutte contre ces maladies dont le sida en particulier.

Pendant une cinquantaine de minutes, chacun d’eux a pris la parole pour dire à leurs hôtes qu’ils sont même parvenus à modifier leurs attitudes et comportements et à adopter une vie adulte responsable. Et le son de cloche est le même partout. ‘Je suis bénéficiaire des offres du Cca depuis quelque temps. Le problème de sexualité est un sujet tabou à la maison. Mes parents le trouvent exagéré. Je me sens plus ouvert pour en parler au centre. Ici, je reçois des conseils sur les maladies sexuellement transmissibles. Si je suis en conflit avec mes parents, je viens au centre pour demander des conseils et des orientations. En tout cas, il y a l’accueil, l’écoute, la confidentialité, l’information et le conseil dans ce centre. Je prie pour que ce centre demeure dans ce quartier parce qu’il y a la promiscuité, la drogue et la grossesse. Avec ce centre, je suis devenu conscient de toutes ces gravités. Les conseils que j’y reçois, je les partage avec mes camarades et avec tous mes proches’, témoignent-ils devant les parlementaires allemands.

Interpellés par ces derniers sur la virginité, certains bénéficiaires du Cca ont apporté des réponses. ‘La virginité est importante. C’est le meilleur cadeau qu’une fille peut offrir à son mari. C’est aussi la meilleure façon de faire plaisir à ses parents. Je crois que l’abstinence est la meilleure façon de prévenir les maladies liées au sexe’, soutiennent-ils. Les jeunes adolescents se disent aussi conscients des effets néfastes que produisent les téléfilms diffusés sur les petits écrans. ‘Nous regardons les téléfilms, mais cela ne nous influence pas. Nous sommes matures. Nous savons ce que nous voulons. Par contre, il y a d’autres qui ne sont pas sensibilisés sur ces questions-là’, soulignent bon nombre d'intervenants.

Parlant de l’âge du mariage et du nombre d’enfants qu’ils souhaitent avoir, les jeunes et les adolescents ont pratiquement la même vision sur ce sujet. ‘Je rêve d’avoir un bon mari et trois à quatre enfants. Mais je veux avoir d’abord une assise financière pour pouvoir prendre en charge mes besoins. La vie devient de plus en plus cher. Si vous avez beaucoup d’enfants, vous risquez d’être confronté à des problèmes de nourriture, de logement et d’habillement. Votre mari seul ne pourra pas tout prendre charge. Ça sera difficile pour lui’, soulignent les jeunes filles.

Auparavant, les parlementaires allemands avaient rencontré dans la même salle un groupe de femmes représentant la Swaa et Aboya, respectivement association de lutte contre le sida et association des femmes vivant avec le Vih/Sida. Une rencontre au cours de laquelle l’accent a été mis sur la sensibilisation. A ce propos, le coordonnateur du Cca a fait parler les chiffres. ‘En 2007, nous avons sensibilisé 20 168 personnes et en avons dépisté 2 180. C’est dire que la population juvénile est largement sensibilisée. Les jeunes viennent en masse nous demander des offres sur toutes les questions relatives à la sexualité’, affirme Dijbril Sadio. En compagnie de la directrice du Cdeps, Mme Coura Dièye et l’équipe opérationnelle du centre, ce dernier présentait, sur un tableau, les activités résumées du centre à ses hôtes.

De quoi séduire les quatre membres de la commission budget du Parlement allemand qui ont eu aussi droit à un sketch sur la sensibilisation au Vih/Sida interprété par la troupe ‘Kakatar’. ‘Le travail du centre est efficace. Nous avons vu des jeunes motivés et très engagés dans la lutte contre le sida. Nous espérons que cela aura un effet multiplicateur. Nous allons rédiger un rapport dans lequel nous mettrons tous les détails de ce que nous avons appris de cette visite. Le rapport sera une base de discussion avec le ministère fédéral de la Coopération économique pour voir comment accroître l’aide au Sénégal’, déclare le chef de la délégation, Schurer Ewald.

Cette visite de parlementaires allemands au Sénégal a pour but de découvrir l’expérience sénégalaise en matière de lutte contre le sida et d’effectuer le suivi de l’exécution de projets de la coopération sénégalo-allemande. En effet, l’Allemagne, à travers la Kfw, finance actuellement un important projet de marketing social pour la réduction des comportements à risque de transmission d’Ist-Vih/Sida auprès des jeunes, dont le principal partenaire est le Comité national de lutte contre le sida (Cnls) qui apporte également un appui au Cca.