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Suite - Des mouvements d’étudiants aux Amicales : L’UCAD prend le virage de la violence

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Suite - Des mouvements d’étudiants aux Amicales : L’UCAD prend le virage de la violence

Autrefois théâtre d’interminables joutes intellectuelles mettant en exergue le bel esprit des acteurs, tout autant que la noblesse de leurs combats et leur grande passion pour la transformation du monde, l’université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar a depuis cédé aux sirènes de la violence née principalement du contrôle des Amicales, passage obligé pour l’accès à des privilèges et l’assouvissement de besoins bassement matériels.
 
 
«Dans les années 1968, rappelle le journaliste Mamadou Sy Albert, la violence était plutôt politico-sociale». Elle se résumait surtout en une opposition idéologique entre étudiants favorable au pouvoir, alors incarné par  de l’Union progressiste sénégalais (UPS), devenu plus tard Parti socialiste (PS), et les étudiants liés aux partis d’obédience marxiste communiste, comme And-Jëf/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (AJ/PADS), le Parti de l’indépendance et du travail (PIT), etc.

« Aux yeux du président Senghor, les associations d’étudiants s’alignant sur les idéologies marxistes léninistes sont des mouvements de contestations», ajoute Sy, journaliste et chargé de la communication du magazine universitaire « Interface.»  Il est également l’auteur d’un livre intitulé : «Ucad 50 ans après…, les mutations profondes de la communauté universitaire.»

Selon lui, ces mouvements de «contestation» étaient soudés par l’idéologie et avaient en partage le combat pour la libération des «peuples opprimés.» C’est pour cela que «la mort de certains leaders des indépendances africaines, notamment Amilcar Cabral, Kwame Nkrumah, avait occasionné de grèves dans le mouvement estudiantin.»

L’échec des idéologies et la chute du mur de Berlin n’ont pas manqué d’impacter sur les mouvements estudiantins qui se sont à leur tour disloqués pour laisser la place aux Amicales, analyse le journaliste.

Partant, les discussions effrénées sur les points de doctrine ne sont plus de mode. Il fait plutôt «in» de faire partie d’une Amicale, de se tisser des sphères d’influence, par l’entretien de ses troupes, qui peuvent être à l’occasion troquées contre de petits privilèges comme des quotas de chambre. Sans compter la possibilité, pour les sphères dirigeantes des Amicales, de faire main basse sur les subventions.

Les privilèges de l’Amicale

La compétition a été de ce point de vue si rude qu’on en est venu à s’affronter par le biais d’armes blanches et de gourdins, comme lorsqu’il a fallu renouveler en 2008 l’Amicale de la Faculté des lettres et sciences humaines. Des blessés graves ont été alors enregistrés, qui ont conduit à la suspension de cette structure représentative de ladite Faculté au niveau des instances de décision de l’UCAD.

Une situation d’exception qui a amené certains étudiants à observer, en avril 2010, il y a quelques semaines, une grève de la faim pour réclamer en vain des autorités universitaires la levée de cette suspension.

De fait, les délégués des Amicales, en particulier les représentants des étudiants dans les commissions sociales sont très mal vus par certains étudiants. La cause : les privilèges qu’ils se tapent notamment sur les quotas de chambres qui leur reviennent.

Mandatés pour la défense des intérêts des étudiants (hébergements, dotation en bourses, problèmes d’orientation etc.), ils sont aujourd’hui de plus en plus blâmés par leurs camarades. Au lieu de prendre en charge les préoccupations de leurs électeurs et camarades, les délégués mettraient trop en avant leurs propres intérêts, selon de nombreux étudiants.

«Je suis très déçu par leur comportement. Des années durant, ils ont mis en avant leurs intérêts. Pendant la distribution des chambres communément appelée codification, ils bénéficient d’un quota spécial qui leur ait réservé, au détriment des autres bénéficiaires. Je ne sais pas au nom de quoi», se désole Siaka Mané, étudiant en maîtrise  en sociologie.

 «Pire, poursuit Mané, ils revendent souvent ces chambres à d’autres étudiants. C’est pourquoi, dans une Faculté, les gens se retrouvent facilement un avec un quota insignifiant de lits. Le partage se fait d’abord entre ces délégués, c’est la raison de toute cette violence, qui se transforme en des bagarres sans merci »

«Je les comprends personnellement. Ils sont tous les mêmes, en position de cartouche souvent. Comme à  leur l’habitude,  ils sont toujours là pour leurs propre intérêts », renchérit Alioune Mbengue, étudiant en licence au département d’Anglais.

«Je  n’ai pas confiance en eux, ce sont tous les mêmes », ajoute-t-il à l’endroit des grévistes de la faim qui, sentant l’indifférence quasi générale, ont tôt fait de crier à qui veut les entendre qu’ils se battent pour des principes et n’ont donc rien à voir avec les équipes sortantes dont les agissements ont conduit à la suspension de l’Amicale.

Au résultat, c’est qu’aucun étudiant n’a été dupe et dans l’ensemble les troupes ont été si soupçonneux, tellement indifférent qu’il ne serait pas erroné de soutenir que cela explique en partie l’échec de la grève, qui a ajouté à la détermination des enseignants qui ont refusé de céder. Ils ont juste concédé la possibilité d’examiner la question et de se déterminer le cas échéant par vote. La cause est entendue.

Alors, pourquoi accepter l’autogestion incarnée à travers ces Amicales ? A cette question, plus d’un étudiant donne sa langue au chat, bien qu’elle soit en débat.

A la longue, «cette situation ne fera que générer des conflits entre les étudiants d’abord, entre les délégués des différentes Facultés ou  ceux des différentes Ecoles et instituts, ensuite, ne serait-ce que pour la Faculté des Lettres », prévient Mamadou Sy Albert.

Selon lui, si les choses continuent comme cela, les mandataires auront du mal à accepter le moment venu, de perdre ce privilège et refuseront d’être remplacés par d’autres étudiants.

Le journaliste préconise donc que le Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud) arrête un code de bonne conduite pour accompagner les associations des Facultés dans leurs dans activités.



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