Au Sénégal, le respect des dispositions du Code des marchés publics n'est pas l'apanage de tout le monde. L'Assemblée nationale continue de passer des marchés en dehors des dispositions du Code des marchés publics. Dans ce sens, les auditeurs de l'Autorité de régulation des marchés publics (Armp) se sont vu refuser l'accès aux archives de l'Hémicycle.
L’ Autorité de régulation des marchés publics (Armp) a présenté hier les conclusions de la mission de revue indépendante de la conformité de la commande passée par des autorités contractantes au titre de la gestion 2011. Au regard des résultats de ces audits, il ressort que les autorités contractantes se sont une nouvelle fois illustrées par des abus. C'est le cas de l'Assemblée nationale qui a opposé une fin de non recevoir aux auditeurs mandatés par l'Armp. Pour qualifier cet état de fait, Abdel Kader Ndiaye de l'Armp n'a pas pris de gants pour dénoncer ''la mauvaise volonté de l'Assemblée nationalité, malgré tous les efforts de sensibilisation''.
Face à cette ''persistance à refuser'' que les marchés de l'Assemblée qui légifère soient soumis au Code des marchés, M. Ndiaye a dit la volonté de l'Armp de ''porter la question sur la place publique'' et de ''tout faire pour inverser la tendance'', jusqu'à ce que les parlementaires ''reviennent à la raison''. Pour l'autorité de régulation, il est clair que ''l'Assemblée ne saurait continuer à faire exception'' dans ce pays et au sein de l'Uemoa. Idem pour le Conseil économique et social devenu Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Dans la même veine, le directeur général de l'Armp, Saër Niang, a annoncé avoir pris langue avec le président de l'Assemblée nationale par le truchement de deux correspondances. Les deux parties ont convenu de se rencontrer prochainement pour discuter de la question. Actuellement, c'est l'article 48 du règlement intérieur de l’Hémicycle qui soustrait les marchés de l'institution aux rigueurs du Code des marchés. Les parlementaires ont jusqu'ici rétorqué devoir voter une loi pour changer la donne.
Ce qui n'a pas été fait, depuis 2008.
REFORME
''Ne pas diaboliser le Code des Marchés''
En outre, la volonté du chef de l'État de réformer ce Code des marchés a suscité les réactions des membres de l'Armp. Cette volonté du Président Macky Sall ''d'aller plus vite'' est prise en compte, selon Abdel Kader Ndiaye, qui avance que les modifications du Code ont été entamées depuis 2011.
Ainsi, dit-il : ''le projet de modification est sur la table du Premier ministre''. ''Il y a effectivement nécessité d'accélérer les procédures de passation, mais, on ne peut pas diaboliser le Code. Tout n'est pas du ressort du Code''. Le représentant du secteur privé est d'avis que les différents acteurs doivent maîtriser les rudiments des passations de marchés.
MONUMENT DE LA RENAISSANCE
Le grand débat
La question du Monument de la Renaissance est revenue. Puisqu'une fois de plus, l'ouvrage n'a pas fait l'objet d'audit. Le Dg de l'Armp est largement revenu sur ce qu'il considère comme ''un débat technique intéressant'', pour dire que les procédures de passation de marchés n'ont pas été utilisées pour les marchés de l'érection de ce monument.
''Même si on l'audite, c'est pour arriver à dire que le marché a été déroulé sans les procédures de passation de marchés. À l'époque, nous avions saisi l'État sur la question, il nous avait dit que ce n'est pas un marché public. C'est le ministère de l'Économie et des Finances qui a fait un montage et qui a vendu les terrains'', selon Saër Niang. Il a ajouté qu'''il y a eu un paiement dans lequel une dation en paiement a été utilisée''. Il a précisé qu'il a pris sur lui de ne pas faire un audit. Il est clair donc qu'actuellement, seul l'Exécutif peut permettre de faire la lumière sur ce montage.
GRÉ À GRÉ
La sempiternelle question
Avec le régime actuel issu de la présidentielle du 25 mars 2012, il est reproché à plusieurs ministères d'avoir contracté plusieurs marchés par entente directe. La question est revenue plusieurs fois hier et a suscité diverses réactions. Les membres de l'Armp, notamment le DG Saër Niang, ont souligné que le gré à gré est un dispositif prévu par le Code des marchés et soumis à l'autorisation préalable de la Direction centrale des marchés publics (Dcmp). Naturellement, ''quand le gré à gré est lancé dans ces conditions, il n'y a pas de problème'', a fait savoir M. Niang. Mais, il se trouve que pour l'exercice de 2011, des gré à gré ont été lancés hors d'une autorisation préalable de la Dcmp (voir par ailleurs).
FERMETURE D'ENTREPRISES
Une mauvaise habitude
Si beaucoup d'entreprises sénégalaises sont en cessation ou en suspension d'activités, c'est dû à la ''morosité économique générale''. Mais pas seulement. Si on en croit Abdel Kader Ndiaye, des Pme pâtissent ''des ambiguïtés du Code des marchés''. Elles n'arrivent pas à capter les marchés publics du fait que ''certaines autorités contractantes mettent des critères de sélection très sélectifs'' qui de fait les excluent de la commande publique.
AGENCES FICTIVES
Les dérives de Wade
Par ailleurs, des révélations renversantes ont été faites sur les errements du régime d'Abdoulaye Wade. Au moment d'auditer certaines agences, les auditeurs n'ont trouvé aucune adresse. Finalement, ils se sont rendus compte que ce sont des structures qui ont été créées, ''parfois même, un directeur général a été nommé. Mais il a été seul et la structure ne fonctionnait pas'', a souligné le Dg de l'Armp.
Les bons élèves
À côté de ces impairs, l'Armp a révélé que parmi les autorités contractantes, la ville de Dakar a fait d'énormes progrès dans le respect des procédures de passation de marchés publics. ''Chaque fois qu'elle a été auditée et des recommandations faites, elle s'est appliquée à les considérer et à les mettre en oeuvre''. La ville de Dakar se présente donc comme l'une des structures les plus performantes en terme de passation des marchés publics. À côté de la Mairie de Dakar, l'Armp a relevé les efforts de l'ONAS, du ministère de l'Économie et des Finances, de l'ANSD et de la Poste dans leur gestion 2011.
1 Commentaires
Bobodiouf
En Septembre, 2013 (18:39 PM)Les nouvelles autorités n'ont qu'à se rapprocher des institutions sociales (IPRES, Caisse de Sécurité Sociale) et en une journée, ils auront à leur disposition la liste desdites sociétés.
C'est une honte !!!
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