Samedi 10 mai, il est dix heures à la Patte d'Oie et environs. La fraîcheur matinale matérialisée par un léger vent frais qui souffle, direction Nord-Ouest ; sud-est, apaise les ardeurs des rayons solaires qui peinent à imposer leur chaleur. En ce début de week-end, les gens semblent préoccupés par des courses sans moindre importance.
Une telle affluence sur les rues d'un quartier périphérique comme Grand Yoff nécessite un confort singulier pour une meilleure circulation des personnes et des automobiles. Ainsi, pour se mouvoir entre le marché et le côté nord de la ville, il est édifié une passerelle qui surplombe l'autoroute séparant les deux lieux.
Seulement, rares sont ceux qui empruntent ces passerelles. Résultats, beaucoup d'accidents. Cette dame ne fait pas partie de ce lot. Essoufflée, courbée à moitié, elle se prend les deux genoux, se relève, pousse un ouf et continue sa marche, elle vient de franchir les marches de la passerelle. "Maman, c'est dur hein ! lançons-nous à son endroit.
"Ah oui, c'est très dur mon enfant. Mais il le faut. Je n'ose pas traverser la chaussée car je ne peux pas courir", réplique t-elle en souriant. Comme si, à ceux qui savent courir, il n'est pas interdit de rivaliser avec les véhicules. Loin de là. "La chaussée est strictement réservée aux véhicules et c'est pourquoi on a construit les passerelles. Si tu te fais faucher sur la voie, c'est toi qui perds.
Moi, même si je suis pressé, je ne traverse jamais les barrières comme ça", nous dit un jeune homme à la carrure d'un sportif. Celui-là offre une vue panoramique des quartiers de Grand-Yoff, de la Patte d'Oie et surtout de l'autoroute, à partir de l'échangeur jusqu'à la hauteur du stade Léopold Sédar Senghor. Une position qui permet de voir avec exactitude tous les mouvements entrepris dans le secteur.
Piétons et véhicules se disputent la chaussée
"Regarde..., regarde..., c'est insensé et très dangereux ce qu'ils font. Dagnouye kharou (ils se suicident)", s'alarme-t-il. Une image insolite. Un groupe de passants vient de se former de manière progressive au bord de l'autoroute, sous la passerelle même. Ces individus attendent que la file de véhicules se resserre et de surcroît, ralentisse, pour qu'ils puissent en profiter et forcer le passage.
Quelques secondes après, trois d'entre eux se détachent du groupe pour obliger une voiture 4/4 à ralentir. Gain de cause. Le reste des piétons le suit en courant. Des hommes, des femmes et même des enfants tenus par la main par des accompagnants, se disputent la chaussée avec les automobiles et ce, en se croisant sur les voies.
Une expérience, non seulement dangereuse mais pas toujours facile pour tout le monde. Une dame de taille moyenne, au teint clair, avec une masse musculaire importante, parvient à traverser la chaussée sans grande difficulté. La deuxième étape semble plus ardue.
Arrivée devant les barrières en ciment qui séparent les deux voies, elle tente de passer. Un problème, il faut s'asseoir sur le petit mur, lever un pied, le poser sur la barrière, puis faire de même avec l'autre.
Les deux pieds doivent être joints sur le mur avant d'être rabattus et ce, deux fois par traversée. Elle a tout le mal pour passer ces deux étapes. Alors, pourquoi ne pas utiliser ces passerelles édifiées pour faciliter le déplacement aux piétons? La réponse est généralement "traverser la route est plus rapide et plus aisée même si cela reste une expérience dangereuse ».
Certaines passerelles jugées mal placées
Mise à part la passerelle de la Patte d'Oie, toutes les autres se trouvant sur cet axe routier sont jugées mal placées. Les gens continuent à traverser la chaussée à leurs risques et périls. L'entrepreneur des travaux est le principal indexé. Lui qui, selon ce mécanicien interrogé et qui vient de franchir la chaussée en courant, pour échapper à un clando lance : "devrais-je aller jusqu'à la Foire pour traverser.
J'n'ai pas ce temps-là. S'ils voulaient que les gens prennent leurs passerelles, ils devaient les implanter là où les gens passent. Sinon, ça pas de sens". À son avis, les gens accusent toujours le pouvoir, mais cette fois-ci, "ce n'est pas la faute à Abdoulaye Wade parce qu'il ne s'y connaît pas en travaux publics.
C'est plutôt l'entrepreneur qui a péché dans sa stratégie. De cette façon, on ne pourra jamais obliger quelqu'un à faire 500 mètres pour traverser et aller, par exemple, dans son atelier juste en face, à 10 mètres", ajoute-t-il. Cette scène s'est produite en face de la station d'essence à quelques mètres de l'agence de la Sénégalaise des eaux de Yoff.
À 500 mètres de nous, vers l'échangeur de la foire, une passerelle presque déserte. Au milieu, des groupes de personnes passent, par endroits, à travers les barrières. À peu près la même distance nous sépare de l'autre pont situé à une bonne vingtaine de mètres de l'intersection avec la route des cimetières de Yoff.
Celui-ci n'est pas non plus bien utilisé même s'il y a encore des piétons qui l'empruntent. Un pire scénario est réservé au pont, situé juste à côté du stade Léopold Sédar Senghor. Presque personne ne prend cette passerelle qui est à plus de 200 mètres de la gare des clandos en partance pour les villages de Yoff et Ngor.
Ici, des centaines de personnes s'adonnent à cette pratique dangereuse.Une traversée perpétuelle qui a fini par donner une autre image aux garde-fous. Entre les deux, des déchets de tous ordres, du sable, des carcasses d'animaux, certainement fauchés sur place, des excréments humains, que les gens continuent à piétiner pour rejoindre l'autre "rive", des traces d'urines et bien sûr, une odeur nauséabonde.
La passerelle située en face du Lycée Moderne de Dakar (Lymodak), semble être mieux placée même si certains pensent qu'elle ne l'est que pour les élèves. À quelques mètres de l'Aéroport Lss, encore un pont visiblement moins utilisé. Les travaux entrepris sur cet axe, ont certes permis la fluidité du transport. Néanmoins, les piétons continuent à s'exposer aux risques en traversant la chaussée, devant des véhicules qui roulent à vive allure. N'empêche, on traverse.
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