Les lendemains de la Can 2006 se traduisent aujourd’hui en une véritable désillusion pour certains Lions après leur retour dans leurs clubs respectifs en Europe. Pour une partie de la «tanière», la parenthèse égyptienne a eu une douloureuse influence sur le cours de leur saison.
Amara Traoré avait raison : «Les joueurs professionnels se sentent menacés en allant jouer la Can.» Comme les lendemains de «fête», le retour en club d’une partie de la «tanière», au baisser de rideau de la Can 2006, a viré en une sorte de «gueule de bois» pour quelques Lions, ramenés à leurs pires incertitudes de compétiteurs. Celles de devoir aujourd’hui se coltiner des week-ends de championnat en simples spectateurs, ou, au mieux, dans l’obscur des matches des équipes réserves.
Les «cas» de Frédéric Mendy (Saint-Etienne), Rahmane Barry (Lorient), Mamadou Niang (Marseille), Souleymane Camara (Nice), Amdy Faye (Newcastle) voire Abdoulaye Diagne-Faye (Bolton) sont illustrateurs du malaise et du «mal de vivre» d’après-Egypte de ces Lions, réduits aujourd’hui à rattraper un quotidien professionnel improbable.
La faute à quoi ? Amara Traoré, ex-entraîneur adjoint de la «tanière», remet un pied devant : «Leur situation est extrêmement difficile aujourd’hui. Mais je pense qu’ils sont en train de payer leur participation à la dernière Can. Cela ne me surprend pas de toute façon. Il faut prendre en considération le départ et le retour de la Can. Eux tous vont le payer.»
Un séjour d’un mois sur les bords du Nil qui coûte cher aujourd’hui à ces internationaux sénégalais qui, de retour de la messe biennale du foot africain, ont littéralement «payé» leur absence prolongée. Certains clubs ont su vivre sans eux, d’autres ont eu à procéder à une redistribution des cartes au sein de leur effectif, quelques-uns ont imposé un «regard neuf» par un changement d’entraîneur. Obligeant quelques membres de la «tanière» à refaire leurs gammes pour espérer retrouver une place au soleil. Revue d’effectif de ces Lions qui subissent de plein fouet les contrecoups de la Can.
Frédéric Mendy (Saint-Etienne). Comme une vieille copie, le temps de jeu de l’ailier Sénégalais à Saint-Etienne, est resté suspendu à 12 matches et 1 seul maigre but. Autant dire que depuis son départ à la dernière Can 2006, le gamin de Khar Yalla n’a plus refoulé les pelouses de la L1 française. La faute à une greffe réussie de Helder Postiga, recrue portugaise du mercato, qui a chamboulé les cartes offensives des «Verts» durant le séjour du petit Sénégalais en Egypte. De l’association Mendy-Piquionne-Feindouno, Baup est aujourd’hui passé au trident Feindouno-Postiga-Piquionne.
Une situation et une «privation» en matches de haut niveau mettent en rogne aujourd’hui un Mendy plus que courroucé et réduit à jouer avec la réserve du club : «Pffft…Je ne sais même pas pourquoi je ne joue pas, souffle-t-il au téléphone. Je sais juste que c’est le choix de l’entraîneur (Elie Baup) et je constate la situation. Je n’ai pas encore discuté avec lui de mon cas, mais je m’entraîne toujours avec les pros mais il ne me fait pas jouer. Parfois je suis le 17e homme, parfois il m’envoie jouer en Cfa.»
Mais pour un pro, il n’y a pire situation que de ne pas jouer. Et dans le cas de Fred Mendy, c’est le moral qui s’en trouve touché : «Mentalement, je ne suis pas bien et je ne peux pas être content de ma situation. Je n’ai pas trop le moral et, actuellement, je me rends compte aussi que le club ne tourne pas bien. Je n’y comprends plus rien, surtout que je ne suis pas sûr que ça soit en relation avec mon départ à la Can», avoue le joueur.
Amara Traoré apporte sa part de lumière sur la nébuleuse : «Je pense que Frederic est victime d’une certaine concurrence à St Etienne. A son retour de la Can on lui a fait comprendre que d’autres ont assuré pendant son absence, mais c’est à lui de regagner sa place par le travail.» Sage conseil.
Souleymane Camara (Nice) : Victime d’une élongation au retour de la Can 2006, Souleymane Camara a vu ses minces chances de rejouer avec l’Ogc Nice se réduire considérablement. Surtout que l’attaquant sénégalais ne s’était jamais vraiment imposé sur la Côte d’Azur avant son départ pour l’Egypte. En attestent ses deux seules titularisations sur le front de l’attaque azuréenne et sa dernière rentrée en jeu lors du Bordeaux-Nice (1-0) de dimanche dernier.
Un temps de jeu faible dû à la nouvelle concurrence apportée par le Franco-Sénégalais, David Bellion, prêté par Manchester United durant le mercato et performant d’entrée. La complémentarité Baky Koné-Bellion et le retour de blessure du Malien Mamadou Bakayoko ont repoussé le Sénégalais jusqu’en équipe réserve. D’où il ne vient de sortir que lors de la dernière journée de L1. Mais comme pour Mendy à Saint-Etienne, Amara Traoré, personne morale pour évoquer la situation, énumère les ingrédients de l’indigeste salade niçoise : «Je crois que Souleymane a toujours eu des problèmes d’adaptation à Nice. Avant même ses blessures, il ne jouait pas beaucoup et là malheureusement, il est encore victime de la forte concurrence. Mais son départ à la Can y est aussi pour quelque chose, ça a facilité le choix des dirigeants niçois», assure-t-il. Avant d’asséner, tout sec : «Il n’a pas le choix, il faut qu’il s’accroche et se battre davantage !»
Mamadou Niang (Marseille). Pour un joueur qui tournait relativement bien, trouvant peu à peu ses marques au Vélodrome, et auteur 5 buts en 22 matches, la situation doit encore être plus difficile à vivre. Aujourd’hui, Mamadou Niang subit la concurrence de plein fouet de Michael Pagis et Toifilou Maoulida, deux recrues du mercato d’hiver, qui ont eu le temps de travailler leur complémentarité durant le séjour du Sénégalais en Egypte pendant la Can 2006. Au point de pousser aujourd’hui sur le banc un Mamadou Niang, un temps raillé par le versatile public marseillais, qui paie aussi son frustrant manque de réalisme devant le but.
De quoi désoler encore plus un Amara Traoré, qui avait pourtant prédit cette mauvaise passe des Lions : «Avant la Can, j’avais dis que les Lions s’exposaient à des risques pour leur retour en clubs. C’est ce qui arrive certainement à Niang qui manque de réussite et de temps de jeu. Mais avec le recrutement des Pagis et Maoulida, on lui fait payer aussi ses absences.» Encore que le cas de Mamadou Niang est moins grave que celui de ses autres compatriotes, car le club olympien guette juste son retour en forme.
Amdy Faye (Newcastle). Au sujet de Amdy Faye, Amara Traoré apporte tout de suite des éclaircissements qui en disent long sur les malheurs actuels du milieu de terrain sénégalais : «Je sais que juste avant de venir en regroupement pour la Can 2006, Newcastle avait demandé à Amdy de jouer un dernier match et il avait refusé. Ils l’ont mal pris et aujourd’hui je pense qu’ils le lui font payer.» A tel point que le compteur de l’ancien joueur d’Auxerre est scotché à seulement 15 matches en Premier League anglaise, fruit de ses apparitions avant son départ pour le regroupement d’avant-Can.
Mais Amara, qui s’est entretenu dernièrement avec le gamin de Yarakh, pose une touche d’espérance devant ce tableau un peu noir : «Amdy garde quand même confiance et il m’a dit qu’il revenait peu à peu dans l’équipe même s’il reste encore sur le banc de touche.»
Mais Amdy paierait-il aussi pour le changement d’entraîneur, et le limogeage de son ancien mentor Graeme Souness au profit de Glenn Roeder ? «Amdy m’a assuré que ce n’était pas la raison. Ses problèmes sont antérieurs à cela», rembobine Amara.
Abdoulaye Diagne-Faye (Bolton). Le «roc» Diagne-Faye semble être dans le même cas que son copain Amdy Faye. De retour de la Can 2006, le milieu de terrain sénégalais est subitement devenu moins régulier en équipe première de Bolton (Premiership anglaise).
Et c’est dommage pour un joueur qui restait sur 18 matches (1 but) et qui constituait une bonne recrue pour coach Sam Allardyce. Le retour en forme d’Ivan Campo voire d’Okocha, le recadrement payant de Nolan dans l’axe du milieu et la belle santé de l’inoxydable Gary Speed (36 ans) ont influé sur l’après-Can délicat du puissant récupérateur rufisquois. De titulaire quasi-indiscutable, il est devenu un intermittent sur les pelouses anglaises. Depuis son retour d’Egypte, Allardyce, qui a trouvé de nouveaux repères au milieu de terrain, ne lui fait plus systématiquement confiance et sa deuxième partie de saison s’en ressent sensiblement. Lui a aussi aura besoin de «confiance et de travail» pour regagner l’estime de son entraîneur.
Coly, Diouf et Barry. Ils sont trois dans ce cas et leur situation agite déjà les supputations et autres réflexions sur leur présence en club. Mais contrairement à certains de leurs équipiers de sélection en galère depuis le retour de Can, Ferdinand Coly (Parme), El Hadji Diouf (Bolton) et Rahmane Barry (Lorient) sont juste victimes de blessures. Encore que Coly, presque guéri, revient peu à peu dans le coup et se refait dans la Calcio : «Je l’ai eu dernièrement et il m’a dit qu’il rejouait peu à peu», renseigne Amara Traoré. Tandis que pour Diouf (18 matches et 2 buts), remis de son opération pour une pubalgie contractée en Egypte, trépigne à l’idée de revenir dans la compétition, ce ne serait plus qu’une question de jours : «Il a voulu revenir trop vite dans le coup. Je lui ai dit de prendre son temps et de revenir encore plus fort», assure encore «Mamar».
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