Henryk Kasperczak après Sénégal/Tanzanie : «Diouf n’a pas les prédispositions d’un meneur de jeu»

Bien que satisfait du large succès de ses poulains face aux Taifa Stars, Kasperczak tient à garder les pieds sur terre. Le sélectionneur national, qui entend donner un style de jeu propre à l’équipe, est conscient qu’il reste un large chantier à défricher, surtout au niveau de l’animation offensive avec un meilleur équilibrage des couloirs extérieurs. Et d’ailleurs sous ce chapitre, le Franco-polonais en a profité pour mettre fin au débat entretenu par certains qui ont voulu introniser El Hadj Diouf comme futur dépositaire du jeu des Lions. «Diouf n’a pas les dispositions d’un meneur de jeu. Il pèse mieux devant», a tranché Kasperczak, qui n’a pas manqué de saluer la bonne prestation des deux invités-surprise : Bayal Sall et Pascal Mendy. Entretien.

Coach, qu’est-ce qu’on peut retenir du match de samedi que les Lions ont largement remporté devant la Tanzanie ?

Ce qu’on peut retenir, c’est qu’on a réussi à marquer après un jeu développé sur les côtés. D’un autre côté, c’est la stratégie. Depuis que je suis arrivé, je n’ai cessé d’insister sur ce point et qui touche les coups de pieds arrêtés, les corners, les coups francs. Là, également, on a eu de la réussite. On a en principe réussi tout ce qu’on a prévu dans la préparation. Ce qui est bien. En fait, je veux donner un style à cette équipe, et je sais qu’on est sur le bon chemin.

En parlant de style, pouvez-vous être plus précis ?

En parlant de style, j’insiste beaucoup sur le collectif, la maîtrise du jeu défensif et offensif. Voir également tout ce qu’on peut faire de mieux au niveau de la qualité de jeu. Maintenant, la qualité du jeu passe également par une bonne pelouse. Surtout dans la progression du ballon, la construction du jeu. On salue en passant le travail fait par les responsables du stade (Léopold Sédar Senghor). Donc, disons que pour la qualité de jeu, on verra ! De toutes les façons, chaque match aura sa particularité.

Justement avez-vous retrouvé la qualité de jeu dont vous souhaitiez donner à cette équipe ?

ça commence ! On a marqué quatre buts. On pouvait en marquer plus. C’est à peu près ce que je recherche. Dans le système qu’on est entrain de mettre en place, les joueurs auront beaucoup plus d’occasions de trouver le chemin des filets. Ce qui est bien, c’est que les joueurs ont bien respectés les consignes. L’attaque est restée dans la zone axiale et les deux flancs ont, tant bien que mal, livré les ballons assez rapidement.

Quel est le secteur qui vous a le plus séduit ?

Je crois que l’équipe s’est bien exprimée dans l’ensemble. D’abord, il y a les deux attaquants de pointes : Diouf et Niang. En général, chacun a essayé de jouer son rôle. Seulement, la maîtrise du jeu n’était pas encore au point. Mais, certains joueurs ont donné le pourcentage de leur qualité au service de l’équipe. Globalement, on était présent dans la récupération du ballon. Ce qui est intéressant, comme je l’ai dit, c’est surtout l’efficacité.

Pour parler de l’animation offensive, est-ce qu’on pourrait voir à l’avenir El Hadji Diouf dans un rôle de meneur de jeu, comme certains voudraient l’introniser ?

Diouf, il pèse mieux devant. Il n’a pas les prédispositions d’un meneur de jeu. Certes, on a besoin d’un récupérateur et d’un distributeur qui arrive à varier le jeu court et le jeu long. Mais, pour ce match, on a moins utilisé nos attaquants dans le jeu en profondeur. Dans l’axe, l’adversaire était très regroupé. Peut être à l’extérieur, on va jouer en profondeur. Par moment, Ousmane Ndoye a délivré des balles en profondeur à Frédéric Mendy. Ousmane c’est un joueur qui arrive à varier son jeu. Techniquement, il est bien. Il a surtout bien joué en deuxième mi-temps.

Oui mais l’équipe a tardé à trouver la bonne formule en première période. Qu’est-ce qui explique cette entame difficile ?

C’est dommage qu’on n’est pas marqué très tôt. Le but est arrivé vers la fin de la première mi-temps. On a eu de la chance sur le second but. C’est le troisième qui nous a donné plus de possibilités d’imprimer notre jeu à l’adversaire. Avant ce but, on a été laborieux. On savait déjà que c’était une équipe bien organisée. Il fallait plus chercher les solutions sur les côtés contre une défense regroupée. Il fallait les mettre en difficultés dans leur tâche défensive. Ce qu’on a fini par faire. A partir de là, l’équipe adverse était obligée de se découvrir. Jouer contre une telle équipe, l’idéal c’est de marquer d’entrée. C’est dommage qu’on n’ait pas réussi à le faire. L’addition aurait pu être plus salée.

Comment expliquez-vous le déséquilibre existant entre le côté gauche, où il y a plus de percussions, et celui du droit ?

En première mi-temps, Diomansy Kamara a beaucoup plus joué vers la profondeur. Oubliant par moment, le dédoublement de Pascal Mendy sur le côté droit. C’est à corriger à l’avenir. Si on pouvait faire la même chose qu’on a fait sur le côté gauche, ce serait une bonne chose pour l’équipe.

En clair, l’individualisme de Diomansy Kamara pèse-t-il sur le flanc droit ?

On ne peut pas dire que c’est un défaut. C’est juste une erreur de sa part. Il peut jouer sous ce registre. C’est surtout un problème d’automatisme. Il est entré dans l’axe et souvent, il a perdu le ballon. S’il avait mieux collaboré avec son partenaire de couloir, Pascal Mendy, on pouvait avoir plus d’occasions sur le côté droit. Mais, ce sont des choses qu’on va continuer à travailler à l’avenir. Dans l’ensemble, je suis satisfait du comportement des joueurs. Ils parviennent à comprendre ce qu’on veut faire. Les joueurs travaillent bien les systèmes.

Qu’est-ce que vous répondez à ceux qui disent que la Tanzanie était trop faible ?

Au bout de deux journées de championnat, la Tanzanie était leader du Groupe. Surprenant certes, mais elle était quand même leader. L’entraîneur (Maximo Marcio) a même dit qu’il allait créer la surprise. Ce qui est normal. Certains journalistes avaient écrit que c’est une équipe très forte et qui était capable de surprendre le Sénégal à domicile. Quand on analyse théoriquement, on se devait d’avoir des réserves par rapport à cette équipe qui a fait une bonne préparation au Brésil. Elle a battu le Burkina Faso devant qui on a perdu. Elle a obtenu le nul au Mozambique. Il faut éviter de baigner dans l’euphorie. La Tanzanie n’est pas une grande équipe africaine. Elle est sur la bonne voie. Gardons les pieds sur terre et continuons à améliorer le jeu de notre équipe.

Revenons sur l’avant-match. Vous avez dû avoir des inquiétudes au vu des nombreux forfaits ?

C’est vrai que j’étais inquiet avant le match avec ces forfaits. D’ailleurs, c’est pourquoi on allonge toujours la liste des joueurs convoqués pour chaque match. Au départ, on avait envoyé une convocation pour une trentaine de joueurs. Il y avait Pape Malick Diop qui était le quatrième défenseur axial sur la liste. Devant, il y avait Babacar Guèye comme cinquième attaquant. On était bien armé au milieu avec Bouba Diop, Waigo Ndiaye et Malick Bâ. Malheureusement, il y a eu des joueurs qui sont arrivés blessés. Au cours de la préparation, il y a Bouba Diop qui n’est pas venu parce qu’il était blessé aussi. Après c’est les blessures de Habib Bèye et Khadim Faye. C’est clair, on était inquiet. Il fallait faire avec ceux qui étaient là. Et je pense que la surprise, c’était le comportement de Bayal (Sall) et Ousmane (Ndoye) et Pascal Mendy, qui ne sont pas toujours titulaires, et qui ont bien rempli leur contrat.

Avez-vous eu un tête-à-tête avec ces trois joueurs avant le début du match ?

Déjà au départ, on a travaillé avec eux parce que les autres étaient absents, à l’exception de Habib Bèye et Khadim Faye qui étaient présents. Ils ont travaillé normalement pour être prêts pour le match. On a ressenti qu’ils étaient capables d’occuper les places disponibles. La confiance était là. Mais, il faut reconnaître qu’on était inquiet, comme lors du match contre le Bénin, où il n’y avait que neuf joueurs, le premier jour du regroupement. C’est une situation qui a permis à des joueurs de s’exprimer. On a élargi l’effectif. Cela nous donne des moyens d’assurer la suite. Il y a un bon potentiel.

Pourquoi n’aviez-vous pas puisé chez les Olympiques pour compléter votre banc ?

Certains joueurs ont travaillé avec nous dans la semaine. On aurait pu en prendre pour compléter le groupe, mais je me suis dit qu’avec les seize joueurs en place et surtout avec l’espoir de récupérer certains blessés, ce n’était pas la peine. On avait plusieurs possibilités de rechanges dans les postes. Vous avez vu dans le match, Nguirane Ndaw s’est retrouvé au milieu lorsque Ibou Faye est rentré. Il y avait plusieurs possibilités avec les joueurs dont on disposait.

On vous a reproché d’avoir sélection Henri Camara qui était blessé. Qu’est-ce qui explique ce choix ?

C’est un joueur important. Il fait partie de l’ossature de cette équipe. J’étais en contact avec lui. On avait convenu qu’il serait convoqué une fois qu’il joue avec son club. Il a joué une heure. A partir de là, il était possible de le convoquer. En arrivant, il a ressenti une douleur. Ce qui l’a empêché d’être à 100% de ses moyens. Le jour du match quand même, il était en bonne santé. Ce qui lui manque, c’est la compétition. Moralement, cela lui a fait du bien de jouer quelques minutes.

Qu’est-ce qui s’est passé avec les sélections de Babacar Guèye et de Pape Malick Diop, finalement restés à Metz ?

Ils n’étaient pas les seuls sélectionnés puisqu’il n’y a pas de pré-convocations. J’ai dit et je le répète : j’avais assez de joueurs aux différents postes. Si c’était au milieu de terrain, peut-être ils seraient avec le groupe. Chez les attaquants, il y en avait quatre et en défense axiale, Pape Malick Diop était en quatrième position, dans ma tête.

Oui mais Babacar Guèye a déclaré dans la presse que vous ne lui avait pas averti de sa non-sélection…

(Il coupe) Ne rentrons pas de ce genre de commentaire. J’ai fais une conférence de presse, le vendredi, deux jours avant le regroupement des joueurs. Ils étaient au courant. Ils étaient avisés… (Il ne termine pas sa phrase). Il ne faut pas s’attarder sur cela.

Avez-vous eu des nouvelles de Pape Bouba Diop ?

Pas encore ! On a avisé la Fifa. Avec lui, il n’y a aucun problème. C’est son club qui l’a interdit de venir à Dakar. On lui a demandé de venir. Il n’est pas venu. Maintenant, c’est la Fifa qui va donner une suite à l’affaire.

Le groupe s’élargit avec des jeunes qui pointent le bout du nez. Quels seront les critères de sélections par rapport à la forte concurrence attendue ?

La concurrence existe toujours. Si elle est saine, chacun devra se battre pour mériter sa place. C’est vrai qu’il y a le cas de certains joueurs comme Ibrahima Faye qui est titulaire dans son club et qui est souvent sur le banc. Il y a des joueurs qui viennent parce qu’ils sont titulaires dans leurs clubs. Ibou Faye a accepte d’être sur le banc parce qu’on forme un groupe. Ce n’est pas tout le monde qui peut jouer. Il faut que les joueurs l’acceptent et le comprennent. L’Equipe nationale, c’est quelque chose d’exceptionnelle.

La prochaine sortie des Lions aura lieu en juin avec deux matches à l’extérieur. Avez-vous déjà commencé à préparer ces sorties ?

On va faire les stages comme toujours. Ce ne sera pas à Dakar de toutes les façons. Je ne peux pas vous dire où on les fera. Ce qui est sûr, c’est qu’on aura un camp d’entraînement à l’extérieur. Entre les deux matches, on restera là-bas. En Angola, en Afrique du Sud ou dans les environs. Mais, pour l’instant, on ne sait pas encore. On espère jouer un match amical entre les deux matches. On ne sait pas encore contre qui. On a prévu de jouer le 9 juin. Ce sera la fin des championnats en Europe. On aura tous les joueurs à notre disposition. En attendant, je vais repartir très bientôt en Europe pour suivre la fin des championnats. Pour l’instant, je reste pour regarder le championnat local.