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Mame Biram Diouf sur les échecs récurrents du Sénégal:"C’est comme si on était maudits"

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Mame Biram Diouf sur les échecs récurrents du Sénégal:"C’est comme si on était maudits"

Vous ne connaissez pas l’international sénégalais ? On parle pourtant d’un homme qui a remplacé Wayne Rooney sous le maillot de Manchester United, qui a marqué dans la foulée, et qui a tapé un salto devant Old Trafford. À quelques mois de la CAN en Égypte, voici ses confessions intimes.

Perdue dans la campagne anglaise à une heure de route de Manchester, la verdoyante banlieue de Davenport permet d’approcher une espèce rare : l’homme qui a réussi sa vie. Entre deux parties de golf, les bedonnantes classes supérieures profitent de leur pavillon individuel au gazon finement taillé, à l’entrée duquel il est de bon ton d’exposer sa Ferrari ou sa Lamborghini pour rendre jaloux ses voisins. Plus sobre que ses congénères, Mame Biram Diouf a opté pour une confortable Bentley blanche avec intérieur cuir rouge molletonné. Une petite folie qu’il s’est permise il y a deux ans, « pour se faire plaisir » , après avoir longtemps trimé pour mettre sa famille à l’abri. « Et puis il n’y a pas qu’eux. Tu as toujours quelqu’un à aider en Afrique... Quand tu rentres et que tu vois tes potes d’enfance dans le besoin, tu as envie de les soutenir. » Mame Biram Diouf est généreux. Après avoir fait croquer un petit tour du pâté de maison, l’attaquant sénégalais nous ouvre les portes de sa charmante villa, où il a son petit paradis, une petite pièce avec télé et canapé d’angle, où s’entassent les DVD et les jeux vidéo. Loin du tumulte du salon où ses deux petites filles ont construit une cabane de fortune. 

En rupture de Stoke
De ses années passées à ferrailler sur les pelouses anglaises, Mame a acquis une délicatesse toute british. « Vous voulez un peu de lait avec votre thé ? » s’enquiert-il d’emblée, avant de raconter sa frustration actuelle à Stoke City, le club dont il défend les couleurs depuis cinq ans. Tout a commencé par douze buts inscrits, dont un slalom incroyable contre Manchester City. « Ici, ils m’ont trop aimé, se remémore-t-il. C’est pourquoi je suis triste de la situation actuelle, parce que Stoke représente beaucoup pour moi. » Désormais abonné au banc des remplaçants et pris à partie par les supporters, Mame n’est plus vraiment en odeur de sainteté chez les Potters, navrants 16es de Championship. « Le public anglais est exigeant, mais franchement nos fans sont les pires » dédramatise-t-il, à la sortie d’un match mitigé contre Aston Villa, où il s’est fait bouger par les défenseurs. « Ce sont de vrais passionnés, mais ils n’encouragent pas leurs joueurs, à peine tu rates une passe ils te pourrissent, c’est vraiment dur. » 

Si le Sénégalais manque parfois d’inspiration, il faut concéder que les ballons que lui envoient ses coéquipiers ressemblent à des ogives. Fatigué de se fracasser au duel contre les défenses du Royaume, le lion songe désormais ouvertement à partir, même s’il ne « veut pas en parler » . Cet été, Fenerbahçe est venu aux nouvelles. Plus récemment, Bursaspor a fait part de son intérêt pour l’international sénégalais, auteur de 10 buts en 47 sélections. 

Pour expliquer sa mauvaise passe, Mame pourrait se réfugier derrière le décès de son père en janvier dernier, qui l’a profondément affecté. Mais il plaide seulement le fait de jouer excentré. Depuis quelques saisons, ses coachs s’obstinent en effet à le placer sur un côté. Il peste : « J’ai vraiment essayé, mais je n’y arrive pas. Tu me prends pour jouer buteur, et derrière tu me fous sur l’aile, ça veut dire quoi ? » Contrarié, il assure comprendre Adrien Rabiot, qui refuse d’évoluer à un poste qui n’est pas le sien. Mame aimerait avoir la même capacité de dire non. Car c’est un attaquant, un vrai. Opportuniste, bon de la tête, et efficace face au gardien. À Hanovre, où Stoke l’a recruté, il a compilé 35 buts en 71 apparitions. Une période faste où il faisait la paire avec le délicieux Lars Stindl, qui enchaînait les offrandes. « Avec lui, je me suis régalé, dit-il en souriant. Il savait exactement où j’allais faire l’appel, il n’y avait plus qu’à marquer » . Désormais, la Bundesliga semble loin, tout comme la perspective de disputer la prochaine Coupe d'Afrique des nations en Égypte, à moins que son rôle de grand frère auprès des jeunes talents sénégalais ne vienne compenser son temps de jeu famélique dans la tête d’Aliou Cissé. 

Quart d’heure de gloire
Mame ne désespère pour autant. Il le sait, dans le football, tout peut arriver. Lui, le gamin turbulent des faubourgs de Dakar, qui a troqué le sable des Parcelles assainies pour la neige de Scandinavie à l’âge de 20 ans. « La Norvège a été pour moi le meilleur des tremplins » , raconte celui qui est rapidement devenu une star dans la petite ville côtière de Molde. « En arrivant, je pensais que tout le monde allait me regarder dans la rue en mode : "c’est qui ce noir ?" mais pas du tout. Pour eux, que tu sois petit ou gros, noir ou blanc, riche ou pauvre, ça n’a pas d’importance, ils traitent tout le monde de la même façon. » De cette escapade nordique, l’attaquant sénégalais ne garde que des bons souvenirs. « Ils m’ont formé en tant qu’homme et j’y ai rencontré ma femme » , salue-t-il avec nostalgie, même si très vite, l’Eliteserien s’est avérée trop petite pour lui. Un jour, tandis qu’il est en vacances, son agent lui téléphone. « Faut qu’on parle » – « Bah dis-moi » – « Non, faut qu’on se voie. Tu es où là ? » – « Nice. » – « Ne bouge pas, j’arrive. » Interloqué, Diouf cogite pendant 24 heures, avant d’apprendre la nouvelle qui va changer sa vie à jamais: « Manchester United insiste pour te recruter. Apparemment, Ferguson te suit depuis deux ans. » 

Nous sommes en janvier 2010, et voici donc Mame dans l’avion, direction l’Angleterre. « Tu es déjà allé à Old Trafford ? C’est vraiment le théâtre des rêves. Du jour au lendemain, alors que je jouais dans des enceintes quasiment vides, je me retrouve devant 75 000 personnes. J’ai pris le temps de regarder le stade, les gens... Je n’y croyais pas. » La suite figure dans les annales. On joue la 73e minute de la 21e journée, et Manchester mène 2-0 contre Burnley. « Je suis sur le banc, coincé entre Michael Owen et Park Ji-Sung, quand Ferguson me dit d’aller m’échauffer. À ce moment, je te jure, je me dis : "C’est chaud !" Cinq minutes après, le coach vient me voir : "Tu entres." Et là, je remplace Wayne Rooney. » Premier Sénégalais de l’histoire du jeu à enfiler la tunique des Red Devils, Mame ne va pas rater la chance de sa vie. Dans le temps additionnel, il profite d’une longue ouverture d’Antonio Valencia pour devancer le gardien Brian Jensen d’une tête lobée. « Quand j’ai vu la balle franchir la ligne, ça ne m’a pas semblé réel. C’était si intense comme sentiment. J’ai vécu une sensation que je ne pourrai jamais oublier. » Un exploit aussitôt célébré par un double salto, en hommage à ses jeunes années dakaroises, puis une parade devant la tribune, en mode « remember my name » . De quoi ringardiser le cœur avec les doigts. 

De l’existence de Dieu
Pour le Sénégalais, tout est sans doute allé trop haut, trop vite, trop fort. Une fois redescendu, les difficultés se sont accumulées. « Après le match, Ferguson m’a dit : "Pour toi, c’est maintenant que le plus dur commence." » C’est un fait, le manager écossais se trompe rarement. À l’époque, Manchester United est une machine de guerre, où règne une concurrence féroce. « Si tu regardes l’effectif, il n’y avait que des tueurs » , assure Mame, qui se souvient de trois joueurs en particulier : « D’abord, Wayne Rooney, parce qu’il pouvait marquer de partout, de n’importe quel angle. Ensuite, Paul Scholes. Avec lui, tu n’avais même pas le temps de monter au pressing qu’il avait déjà passé le ballon. Et enfin Ryan Giggs. Il avait déjà la trentaine bien entamée et pourtant, qu’est-ce qu’il m’a fait me sentir vieux à l’entraînement ! » Face à cette armada de stars, le jeune Sénégalais doit se contenter de bouts de match. En quête de temps de jeu, il est d’abord prêté à Blackburn, où il forme un duo de Diouf avec El-Hadji, avant de tenter sa chance en Allemagne, avec le succès qu’on lui connaît. Il s’impose dans le même temps en sélection, dispute deux CAN, puis participe à la Coupe du monde 2018, où le Sénégal est éliminé au nombre de cartons jaunes.

Un nouveau coup du sort qui pourrait faire croire à une malédiction. Encore aujourd’hui, Mame ne s’explique pas la malchance récurrente des Lions en compétition. « C’est comme si on était maudits » , ose cet homme profondément croyant, qui pense comme beaucoup d’Africains que sa carrière a été rendue possible par la « grâce de Dieu » . Sa foi, pourtant, a été durement ébranlée par un drame personnel. En septembre 2015, un mouvement de foule provoque une terrible bousculade à La Mecque. Plus de 2000 personnes périssent piétinées. Sa mère fait partie des victimes. « C’est moi qui lui ai offert le voyage, c’était son rêve de faire le pèlerinage » , murmure-t-il. « Tu as beau retourner le problème dans tous les sens, dans ta tête tu te dis : "C’est à cause de moi." » 

À la question délicate de savoir pourquoi Dieu, s’il existe, rappellerait ses fidèles de manière aussi injuste, Mame n’a pas la réponse. Seulement d’autres questions. « Je ne vais pas mentir, j’ai beaucoup douté. C’est normal quand c’est un être cher qui part, on est tous humains. Cela me semblait si injuste, parce que ma mère avait toujours été à mes côtés. » Il marque une pause. « Elle me répétait toujours que rien n’arrive sans raison dans la vie, et que quoi qu’il arrive, il fallait embrasser son destin. » Alors Mame a continué à avancer, sous la pluie anglaise. « Et j’espère que Dieu va me donner la force de continuer encore. » 



9 Commentaires

  1. Auteur

    En Avril, 2019 (13:47 PM)
    Tu ne crois pas si bien dire Mame, on est maudit en football depuis que les El Hadj Diouf, Bethio Thioune Kara Mbodj on décidé de nous imposer les noms de leurs marabouts qui seraient responsables de tous les succès de l'équipe nationale et Dieu responsable des échecs. Chers compatriotes revenons tous à Dieu pour n’importe quel succès que nous aurons et remercions le et vous verrez que l'on va gagner des titres. Wasalam
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  2. Auteur

    Paco

    En Avril, 2019 (14:10 PM)
    Je n'osais pas le dirre mais soit on est maudits , soit on est Oumou, soit on nous a jete in tres mauvais sort.

    ceux qui ne croient pas au mystique n'ont jamais ete atteints mystiquement et je suis passe par la parceque je n'y avais jamais cru de ma vie.

    J'ai la forte conviction que cette equipe a ete maraboutee depuis 2002.

    A chaque Can nous sommes parmi les 3 favoris et on nous sort betement.

    A la derniere coupe du monde on bat la Pologne facilement, on doit battre les japonnais des la 1er mi-temps mais on se fait rattraper et dominer ensuite on perd betement face a la Colombie.

    Cette equipe est MAUDITE, esperons que cette fois sera la bonne sinon on disssout toute l'equipe, la federation , on ferme tous les stades du Senegal et on interdit le football dans tout le pays sinon en prison, voila
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    Auteur

    En Avril, 2019 (14:13 PM)
    Mame biram,notre vie est entre les mains de dieu,la mort doit meme renforcer notre foi.on a des limites,on ne peut jamais savoir ou et quand on va mourir,ce qui demontre que la vie ne nous appartient pas.ta mere est allee mourir dans les lieux saints de l'islam,pour les musulman,elle a fait une belle mort en accomplissant l'un des piliers de l'islam,je crois que tu dois remercier dieu tous les jours.en ce qui concerne l'equipe du senegal,ils faut beaucoup de chance et un arbitrage juste pour gagner une can.je suis persuade que si les arbitres etaient justes avec senegal,on aurait deja gagne cette coupe.que ces autos,ces villes,ces jardins ne t'eloignent pas de dieu
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    Auteur

    Defenseur

    En Avril, 2019 (15:27 PM)
    Lui après le décès de sa Maman ..... car les soeurs avec l'argent(chez certains) se sont des pépins mais bon est-ce le cas... .....
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    Auteur

    On Est Pas Maudit C Dans La Tê

    En Avril, 2019 (16:39 PM)
    Fi ay maudit amoufi c'est juste dans la tête comporter vous comme de vrai hommes et vous gagnerez la can Inchala . c'est juste dans la tête sortez ça ay maudit geumoumako
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    Auteur

    En Avril, 2019 (16:51 PM)
    Pour une fois, j'ai adoré la plume de ce reporter. Les métaphores sont tout simplement exquises.
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    Auteur

    Question

    En Avril, 2019 (18:14 PM)
    Le journaliste est un senegalais ?

    Bravo à lui si cst le cas
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    Auteur

    Jjjjjjjjjjjjjjjjoooooooooooooo

    En Avril, 2019 (18:31 PM)
    Un vrais gaindé qui a tout donné sur le terrain lorsqu'on fait appel à lui, un patriote, que Dieu continue à te guider Bon courage gaindé
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    Auteur

    En Avril, 2019 (18:32 PM)
    "J'ai la forte conviction que cette equipe a ete maraboutee depuis 2002."

    Entre 1963 et 2001 ils faisaient du skate ?



    20 avril 1963: le Sénégal s'était imposé en finale de football des 2e Jeux de l'Amitié.



    La défense avec l'omniprésent et inamovible capitaine de la sélection du Sénégal et de la Jeanne de Dakar, Domingo Mendy, l'homme du penalty historique contre la Tunisie le Maréchal Cheikh Thioune, le prince de Thialy Bouba Diakhao, comme le surnommait feu Alassane Ndiaye Allou, l'indéracinable Souleymane Diop, le baroudeur Mamadou Samassa, le technicien à l'état pur Yatma Diouck au front de l'attaque, le virevoltant Youssou Ndiaye, meilleur buteur des Jeux de l'amitié, El Hadji Malick Sy Souris le Garrincha de l'équipe, le feu follet et héros de la finale contre la Tunisie Demba Thioye, le clairvoyant Abdoulaye Diop Pelé.



    emifinals

    18- 4 Tunisia 2-1 Madagascar [aet, FT 1-1]

    [Merrichko, Sassi; Ramavivo]

    18- 4 Senegal 2-0 France





    Third Place Match

    20- 4 France 4-1 Madagascar





    Final

    20- 4 Senegal 1-1 Tunisia [aet (2 periods of 15 mins, then 2 periods of 10 mins]

    [Senegal won 9-4 on corners]

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