Les côtes du golfe de Guinée sont devenues des lieux de transit de la drogue sud-américaine vers l’Europe, dénonce l’Organe international de contrôle des stupéfiants. L’Afrique produit, transporte et consomme des stupéfiants, mais ne se laisse pas submerger par les drogues dures.
SYFIA - "Les trafiquants de drogue se tournent de plus en plus vers les pays d’Afrique de l’Ouest situés le long du golfe de Guinée pour acheminer illicitement de la cocaïne provenant d’Amérique du Sud vers l’Europe et, dans une moindre mesure, l’Amérique du Nord." Ce constat, énoncé par l’Organe international de contrôle des stupéfiants (Oics), un organisme des Nations Unies dans son Rapport 2005, confirme des informations parcellaires qui se voient ici systématisées. L’Afrique intervient désormais dans la production, le transfert et la consommation de drogues. Sans compter la transformation, puisque, note l’Oics, d’importantes quantités de produits précurseurs (ceux qui permettent la fabrication des drogues) ont été découvertes sur le continent. En 2005, par exemple, deux importants envois de pseudo éphédrine (précurseur des amphétamines) à destination de l’Angola et de la Rd Congo ont été saisis.
"L’Afrique est le deuxième producteur mondial d’herbe de cannabis, après l’Amérique du Nord, comptant pour 28 % du total mondial avec près de 12 000 tonnes", souligne le Rapport, et toutes les sous-régions d’Afrique sont impliquées. L’Égypte, le Cameroun, le Ghana, le Nigeria, le Togo, le Sénégal… sont cités ainsi que des pays d’Afrique de l’Est et des îles comme Madagascar et les Comores. Dans plusieurs d’entre eux, des saisies ont été opérées.
Par ailleurs, "la région africaine, en particulier l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique du Nord, continue d’être utilisée pour la contrebande de cocaïne". De nombreux navires en transportant ont été arraisonnés, en provenance des côtes de la région. Ce détour croissant par l’Afrique serait dû, selon l’Oics, à l’intensification des contrôles ailleurs.
Enfin, selon l’Oics, 34 millions de personnes seraient consommatrices du seul cannabis en Afrique, essentiellement dans les villes et les centres touristiques d’Afrique australe et d’Afrique de l’Ouest. Par contre, "l’abus de [cocaïne] y est encore relativement faible", si ce n’est sous forme de crack, au Sénégal, au Nigeria et en Afrique du Sud. Il en va de même pour l’abus d’héroïne dont la consommation croît cependant dans des pays comme Maurice, le Rwanda, la Somalie ou l’Egypte…
Le combat, pourtant, n’est pas perdu. Tant l’Union africaine, via son Conseil économique, social et culturel, que des gouvernements nationaux et le secteur non gouvernemental s’en préoccupent. Ainsi, des Ong de huit pays dont Madagascar, Maurice et le Rwanda ont participé en 2005 à un premier atelier régional est-africain sur la coopération entre pays pour prévenir l’abus de drogue par les jeunes. Encore faut-il en voir les résultats sur le terrain, comme au Maroc, qui, tout en continuant à fournir 80 % de la résine de cannabis consommée en Europe, est parvenu grâce à une politique volontariste et avec l’appui financier de l’Europe, à en réduire la culture de 10 % entre 2003 et 2004. En mai 2005, une nouvelle campagne d’éradication a été lancée dans la région du Rif.
De tels résultats doivent cependant être appréciés sur le long terme. En effet, l’Oics constate que les programmes de substitution de cultures mis en œuvre en Amérique latine ont généralement échoué, faute d’alternative commercialement intéressante pour les paysans. Voilà pourquoi Hamid Ghodse, président de l’Oics, plaide pour que ces programmes envisagent pour les cultivateurs "une solution de rechange économiquement viable", qui implique aussi une action répressive contre les trafiquants pour faire baisser la demande. Le Rapport 2005 souhaite aussi que ces projets dits de "développement alternatif" soient étendus à l’Afrique, qui n’en a pas bénéficié jusqu’à présent.
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