VATICAN - Près d'un an après son élection : Benoît XVI surprend

Après le décès de Jean Paul II, le 2 avril 2005, de nombreux catholiques s'attendaient à ce que l'Eglise adopte une position plus conservatrice encore si les cardinaux désignaient le favori Joseph Ratzinger pour lui succéder. Or, depuis son élection il y a moins d'un an, Benoît XVI ne cesse de surprendre.

Quelques jours avant le 25 décembre, le souverain pontife Benoît XVI traversait la place Saint-Pierre de Rome coiffé d'un bonnet traditionnel rouge bordé de fourrure blanche, qui n'était pas sans évoquer celui du père Noël. Celui qu'on surnommait le «Panzerkardinal» a par ailleurs consacré sa première encyclique au thème de l'amour.

Cela ne veut pas forcément dire que le pape a modifié sa doctrine. Bien au contraire. Il a réaffirmé l'enseignement de l'Eglise sur toute chose, de la sexualité au caractère sacré de la vie. Mais depuis son élection, le 19 avril, il n'a cessé de déconcerter gauche et droite, montrant de multiples facettes, prenant des positions populaires comme la décision d'accélérer le processus de canonisation de Jean Paul II.

L'exemple, sa première encyclique, «Dieu est amour», est édifiant. Cette réflexion philosophique explique notamment la différence entre l'eros - l'amour entre un homme et une femme - et l'amour inconditionnel.

«Quel autre pape dans l'histoire a consacré sa principale encyclique à l'amour érotique?», lance le père Joseph Fessio, un jésuite conservateur qui connaît le souverain pontife depuis les années 1970, lorsqu'il était un de ses élèves. «Et voici lepanzer cardinal, l'austère bavarois, le rottweiler de Dieu défendant l'amour», ajoute-t-il. «Quel paradoxe!»

Benoît XVI a par ailleurs fait des choix surprenants dans le choix de nouveaux cardinaux, désignant notamment l'évêque de Hong Kong Joseph Zen, un prélat ouvertement critique à l'égard de la Chine. Le nouveau pape a aussi fait des gestes d'ouverture en direction de catholiques tombés en disgrâce sous le précédent pontificat. Il a ainsi rencontré le libéral Hans Küng, auquel le Vatican avait retiré en 1979 son autorisation d'enseigner la théologie, et Mgr Bernard Fellay, chef des catholiques intégristes de la Société de Saint-Pie X en Suisse.

Ses quelques décisions ont également surpris. Benoît XVI a démis l'archevêque Michael Fitzgerald de ses fonctions comme chef du bureau des relations avec l'Islam pour le dépêcher en Egypte. Certaines voix se sont alors élevées pour regretter cet «exil» dans une période jugée cruciale pour les relations entre le monde musulman et l'Eglise catholique.

Benoît XVI a tendu la main en direction des musulmans, expliquant qu'il souhaitait construire les «ponts de l'amitié». Mais il a également fermement condamné le terrorisme lors d'un déplacement à Cologne. Et il s'est interrogé sur une adhésion de la Turquie musulmane à l'Union européenne.

La nomination du cardinal William Levada pour lui succéder à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi a soulevé des interrogations sur l'homosexualité. Mgr Levada n'avait pas véritablement prêché les enseignements de l'Eglise sur cette question lorsqu'il officiait à l'archevêché de San Francisco. Le souverain pontife doit aussi contenir la colère de certains progressistes qui dénoncent le premier document interdisant l'ordination de prêtres homosexuels.

Mais Benoît XVI a été salué pour d'autres initiatives. Les organisations juives ont félicité sa visite dans une synagogue de Cologne en août dernier. Ils se réjouissent également de son déplacement prévu dans le camp de concentration d'Auschwitz lors d'un voyage en Pologne en mai prochain.