Parmi les modifications de taille apportées à la loi de 1984, portant sur l’organisation de l’exercice du métier des avocats au Sénégal, il y a surtout les restrictions apportées à l’accès à cette profession libérale. Ces restrictions frappent en premier lieu les magistrats à la retraite qui s’inscrivaient d’office au Barreau.
Le Barreau du Sénégal compte en son sein des magistrats qui, après leur retraite, ont décidé d’embrasser une autre profession juridique, celle d’avocat. Certaines robes noires, tout au moins la majorité, ne voyaient guère d’un bon œil cette ‘intrusion’ que la loi de 1984 permettait aux magistrats qui avaient totalisé un minimum de dix ans d’expérience. Désormais, il n’est plus permis aux magistrats à la retraite ainsi qu’à ceux qui sont âgés de plus de 55 ans et totalisant plus de dix ans d’expérience dans la magistrature, d’être admis directement au Barreau. Ceci à la lumière de la nouvelle loi qui est entrée en vigueur en octobre 2009.
Cette réforme est l’aboutissement d’un long combat que le Barreau du Sénégal a mené. Secrétaire général de l’Ordre des avocats, Me Mbaye Guèye, que nous avons interrogé sur le sujet explique les raisons de cette restriction à l’entrée dans la profession d’avocat. ‘Il y a deux bornes. Pour l’une des bornes, on a fixé l’accès à la profession à 55 ans. Parce que nous avons estimé que le métier d’avocat est tellement éprouvant qu’au-delà de 55 ans, on ne peut l’exercer comme il faut.
Deuxièmement, nous ne pouvons pas accepter que la profession soit fermée à des jeunes âgés de moins de 24 ans et ouverte à des gens qui ont atteint l’âge de la retraite dans leur profession. Nous estimons que quand on aime une profession, on y vient alors qu’on est en activité’, souligne-t-il. Ajoutant ‘qu’il ne faudrait pas attendre la fin de votre carrière’. Selon lui, les gens refusent de venir dans la profession parce qu’il y a des aléas. ‘Par exemple, le fait d’avoir un dossier à plaider n’est pas évident. Alors que de l’autre côté, on est fonctionnaire. C’est l’Etat qui paie, il y a la sécurité du salaire, la sécurité sociale et médicale.
Ils ne veulent pas prendre de risque. Mais une fois à la retraite, ils sont forcés de sortir de cette profession et ils veulent venir dans notre profession. Nous ne pouvons pas l’accepter. Notre profession, son dynamisme c’est la jeunesse’, poursuit notre interlocuteur. Toutefois, précise Me Mbaye Guèye, ‘tout magistrat en activité, qui a fait dix ans, peut devenir avocat ; comme tout avocat, qui a fait dix ans, peut devenir magistrat. C’est cela que le texte dit. Il n’y a aucun problème.
Ce qui est difficile à accepter et qui a motivé cette loi, c’est qu’on a vu cette pratique se développer’. ‘C’est d’autant plus dangereux qu’un magistrat, avant d’être retraité, peut commencer à constituer sa clientèle en rendant des décisions favorables pour qu’ils viennent à son cabinet quand il sera à la retraite. Je peux vous garantir que c’est une infime minorité de magistrats qui a soutenu cette pratique, mais la grande majorité des magistrats que je connais très bien est contre ce principe-là’, explique l’avocat. Outre les magistrats à la retraite, les maîtrisards en droit, âgé de moins de 24 ans, ne sont non plus admis au concours du Barreau. En plus, d’après la nouvelle loi, le concours d’entrée au Barreau est organisé tous les trois ans. ‘Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a une disposition qui dit deux choses : l’examen est organisé tous les trois ans.
Plus loin, le même article dit que, mais à la demande du bâtonnier, l’examen peut être organisé tous les ans’, note le secrétaire général de l’Ordre des avocats. Néanmoins, Me Mbaye Guèye promet que ‘même si la loi est entrée en vigueur, je peux vous informer que nous avons demandé par lettre au ministre de la Justice, Garde des Sceaux (parce que l’examen est organisé par l’Etat), pour que l’examen soit organisé cette année. Donc, nous n’avons pas encore appliqué l’organisation de l’examen tous les trois ans’.
Selon Me Guèye, les maîtrisards en droit peuvent bientôt déposer leurs dossiers au niveau de l’Ordre des avocats parce que l’examen sera organisé cette année. ‘Nous attendons simplement l’arrêté du ministre de la Justice qui fixe la date de l’examen pour ouvrir les dossiers de candidature’, précise le secrétaire général de l’Ordre des avocats.
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