C’est à peine si Me Sarr, chargé de la défense de Abba Diédhiou, n’a pas rejeté la thèse du suicide brandie par la gendarmerie à propos de la mort de son client. Il reste d’autant plus dubitatif que le juge en charge de l’enquête avait refusé son extraction de la prison.
Me Ibrahima Sarr, l’avocat de Abba Diédhiou, le principal suspect dans l’enquête sur l’assassinat de Oumar Lamine Badji, le président du conseil régional de Ziguinchor, suspect mort mystérieusement le mercredi dernier, à Ziguinchor, entre les mains des gendarmes enquêteurs, dit qu'il n’est pas convaincu par la thèse du suicide. Selon lui, il y a beaucoup de choses à suspecter dans cette mort, dans la mesure où les gendarmes n’avaient même pas pris le soin d’informer ni le juge d’instruction ni son avocat de son extraction. « J’ai appris hier (ndlr : mercredi) le décès de Abba Diédhiou et j’étais surpris et également un peu choqué de la manière dont les choses se sont déroulées.
Parce qu’il semble qu’on l’a fait sortir de la maison d’arrêt pour l’interroger. Je me suis demandé à quel titre ils peuvent le sortir pour l’interroger sur un dossier qui est déjà entre les mains des juges. Et le juge n’a jamais donné l’autorisation de le faire sortir pour le faire entendre. D’abord, même s’il s’agit de la délégation judiciaire, il y a des conditions, et les gendarmes ne peuvent pas, une fois que le dossier est entre les mains du juge, se ressaisir de ce dossier pour l’interroger », a-t-il déclaré, indiquant que le prétexte avancé ne tient pas la route. « Par la suite, on m’a appris qu’on s’est servi d’une sorte de prétexte de l’existence d’une autre infraction s’agissant de trafic d’armes pour que les gendarmes aillent l’extraire.
Qui a donné l’autorisation ? Je sais que c’est pas le juge, parce que j’étais dans son bureau quand on lui téléphonait pour demander de l’extraire et il a refusé. On lui a dit : Non, on veut l’extraire non pas pour le dossier que vous avez en main, mais pour l’interroger sur une autre infraction liée à un trafic d’armes », a-t-il souligné. Me Sarr se dit convaincu qu’il y a de sérieux doutes à émettre sur la thèse avancée par les gendarmes. « Quand j’ai appris sa mort, je me suis renseigné, on m’a dit qu’il s’est suicidé. Il s’est suicidé, ils l’ont fait enterrer à la va-vite ; tout cela me donne des raisons de douter de ce suicide ». Et Me Sarr n’écarte aucune hypothèse pour que la lumière soit faite sur la mort de son client. « Pour le moment, je n’ai encore rien vu, j’attends le retour du juge pour poser mes questions.
Et s’il le faut, nous prendrons des mesures idoines pour que toute la lumière soit faite sur la mort de mon client. Quoiqu’on puisse lui reprocher, je pense que nous sommes dans un État de droit et il faut laisser la justice faire son travail. J’insiste beaucoup que, pour le moment, je doute beaucoup de ce suicide jusqu’à ce qu’on me rapporte les preuves qu’il s’est réellement suicidé. Je ferai ma demande au juge d’instruction, au besoin, je déposerai une plainte contre X et, en ce moment, le juge se verra dans l’obligation de poursuivre pour voir exactement ce qui s’est passé », avance-t-il, notant qu’il est aussi du devoir des autorités judiciaires de chercher à savoir dans quelles conditions Abba Diédhiou est mort.
« Je crois que, même si je ne le fais pas, il appartient aux autorités judiciaires de voir dans quelles conditions Abba Diédhiou a été extrait de la prison sans l’autorisation du juge et comment il est mort. J’ai fait la remarque que le juge qui a le dossier en main n’a pas donné l’autorisation, on m’a rétorqué que ce n’était pas en rapport avec le dossier qui est pendant chez le juge d’instruction à savoir, la mort de Omar Lamine Badji, mais c’était pour une autre infraction liée à un trafic d’armes que mènerait feu Abba Diédhiou », a-t-il révélé.
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