Construit pour récupérer les jeunes en rupture de ban, le centre polyvalent de Liberté 6, ex-Caomi, aiguiserait bien des appétits. La raison est d’une simplicité indiscutable : le terrain sur lequel il est construit vaut aujourd’hui de l’or. Suffisant pour que les pouvoirs publics jettent leur dévolu sur ce lopin de terre. Et, depuis lors, «bonjour les sommations et les menaces à peine voilées aux pauvres pères de famille qui y travaillent, pour certains depuis plus de vingt (20) ans, en apprenant à de jeunes délinquants un métier, histoire de les éloigner du mauvais chemin qu’ils avaient pris». C’est ainsi qu’une lettre en date du 15 mai 2007, signée par la directrice de l’Education surveillée et de la Protection sociale, Mme Bousso Diaw Fall, leur est adressée. Le motif évoqué est que «l’État envisage, dans le cadre du Bci (budget consolidé d’investissement) de 2007, de reconstruire totalement le centre». Ce qui nécessite, lit-on dans cette correspondance dont a obtenu copie, «une démolition complète de la structure».
Parcelle vendue entre 14 et 26 millions de Fcfa
S’agissant des travaux, «leur démarrage est prévu au mois de juillet 2007». C’est ainsi qu’il leur a été donné un délai qui expirait le 1er juillet 2007. En tout cas, nos sources se plaisent à signaler «un détail qui les intrigue» : le fait de n’avoir jamais vu la maquette du futur centre. «Dès lors, nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il y a anguille sous roche et qu’il fallait engager le combat», persistent nos interlocuteurs. Et nos sources de marteler : «On ne se laissera pas conduire aussi facilement à l’abattoir par des gens qui, en réalité, ne veulent rien d’autre que nous chasser pour morceler le terrain en parcelles». Un précédent, «le terrain de football du centre et le jardin sont devenus des résidences dont les propriétaires sont très puissants», conforte leur suspicion. Mieux, les parcelles s’y échangeraient entre quatorze (14) et vingt-six (26) millions de Fcfa. Après un moment de répit, c’est le ministère de la Justice qui leur envoie, le 28 janvier 2008, une correspondance - signée par le directeur de cabinet Birane Niang et dont nous avons aussi pu avoir copie - pour leur dire de quitter les lieux.
Au départ était un rapport de la Cour des Comptes
Du responsable du centre, M. Malé Djité, aux services de la Directrice de l’éducation surveillée et de la protection sociale, Mme Bousso Diaw Fall, en passant par le conseiller en communication du Garde des Sceaux, notre confrère Marcel Mendy, il nous a été impossible de trouver un interlocuteur à même de nous donner «la bonne information» dans cette affaire. Pourtant, certains recoupements nous ont permis de savoir que «c’est un rapport de la Cour des Comptes qui a attiré l’attention de l’État quant à la manière dont les prestataires, soupçonnés d’être derrière cette entreprise de délation, se sucraient sur le dos des pouvoirs publics». Mieux, ledit rapport soulignait que «les prestataires gagnaient des millions de francs Cfa sans en verser un franc dans les caisses du centre qui leur fournit gratuitement l’eau, l’électricité et le local». Alors que, toujours selon le rapport, «c’est à peine s’ils s’occupaient de la formation des jeunes qui devait être leur principale mission». Sur les «rumeurs de déguerpissement» aussi, nous avons appris qu’il n’en serait rien. Tout au plus, «il s’agit de raser tout et de reconstruire le centre, car un montant de 250 millions de Fcfa est dégagé à cet effet depuis 2007». Si retard il y a, c’est à cause de «cette résistance qui ne repose sur rien car les prestataires savent que le moment est venu de renégocier les termes du contrat qui les liait au centre». Une éventualité «qu’ils craignent et dont ils ne veulent surtout pas». S’agissant des parcelles «déjà vendues», il nous est revenu qu’elles font «partie intégrante d’un terrain appartenant à la coopérative des éducateurs spécialisés et n’a rien à avoir avec le centre». Surtout que, en résumé, «les terres appartiennent à l’État, qui peut en faire ce qu’il veut». Toutefois, une réunion a été convoquée, lundi matin, au ministère de la Justice pour «accélérer la procédure de déguerpissement» des prestataires. C’est ainsi que des sommations individuelles ont été remises, avant-hier, «à la requête de l’État du Sénégal, représenté par l’Agent Judiciaire de l’État», par le canal de l’Huissier de Justice Malick Seye Fall, à l’ensemble des chefs de sections se trouvant à l’ex-Caomi. Il leur est enjoint «de libérer les lieux dans un délai n’excédant pas 24 heures». Faute de quoi, «il (l’État) entend procéder à leur expulsion manu militari». C’est donc dire à quel point le feu couve du côté de Liberté 6.
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