Sept millions de dollars, soit plus de trois milliards de nos francs ont été détournés lors du sommet des intellectuels de la Diaspora tenu à Dakar en octobre 2004. Un problème dont les chefs d'Etat de l'Ua réunis, le week-end dernier, à Banjul ont soigneusement évité de débattre. Du moins en public. Ayant abrité ce sommet de la controverse, le Sénégal va-t-il lancer des signaux ?
L'affaire Habré et la prestation de serment des juges devant sièger à la Cour africaine ont occulté bien des sujets dont le plus important et, sans doute, le plus gênant demeure cette affaire de détournement dont notre pays a servi de cadre. En effet, après le sommet des intellectuels de la Diaspora tenu à Dakar du 7 au 9 octobre 2004, il a été révélé des actes de prévarication dont l'énonciation du montant donne froid au dos. Parce que, pour un sommet devant durer deux jours, les organisateurs n'ont pas lésiné sur les moyens pour se garnir la table. Et ce sont, tenez-vous bien, 7 millions de dollars qui se sont volatilisés dans la nature. Cet argent, prélevé sur les ressources déjà maigres de l’Union africaine, s'est évaporé sous forme de surfacturations de la part des organisateurs de cette rencontre.
Dans cette affaire, une petite agence de voyages sud-africaine a servi de société écran pour des détournements colossaux. La salle de conférences du Méridien Président où se tenait la réunion aurait été louée à 250 millions de francs Cfa alors que le coût réel est de... 1 million de francs Cfa. Des avions ont été spécialement affrétés pour faire des aller-retour entre le Sénégal et le Maroc, y prendre les mets destinés à rassasier les appétits princiers de nos hôtes. Il se raconte même qu'un avion a dû changer ses plans de vol et rebrousser chemin pour... prendre de la sauce oubliée quelque part au Maroc. Le sommet du G 8 qui regroupe les huit nations les plus économiquement et militairement viables n'aurait pas fait mieux dans la folie dépensière. Et dire que ce ne sont pas des ressources humaines hautement qualifiées en matière de gastronomie qui manquent au Sénégal.
Bien que des têtes soient, semble-t-il, déjà tombées au siège de l’institution à Addis Abeba, la gravité de cette indélicatesse reste entière. C’est d’autant plus grave que cela arrive à un moment où l’Union africaine, à l’instar de ses pays membres, est toujours à la recherche de fonds pour vivre. Disons, pour survivre. Et, comble de paradoxe ou d'ironie, incapables d’honorer leurs cotisations statutaires, les pays membres se permettent le vilain luxe de détourner l’argent de bailleurs étrangers. C’est encore l’Afrique, peut-on dire, non sans un brin de fatalisme. Fait hautement plus déplorable, des chefs d’Etat africains semblent œuvrer à étouffer l’affaire dans l’œuf. Une fois de plus, n’eût été la ténacité d’un Alpha Omar Konaré, ce détournement de plus de trois milliards de nos francs, serait passé sous silence comme d’autres sombres ponctions opérées à vue dans les caisses peu garnies de l’Union. Le Sénégal qui a servi de cadre à ce détournement des plus scandaleux s'engagera-t-il dans la voie de l'identification et, le cas échéant, de la sanction de ses fonctionnaires, agents ou simples prestataires de service qui auraient trempé dans cette mélasse ? En tout cas, c'est un défi pour la bonne gouvernance !
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:36 PM)Participer à la Discussion