EN DECLARANT SA CANDIDATURE : LANDING VEUT-IL FAIRE CHANTER WADE ?

La posture actuelle de Landing Savané au sein de l'attelage présidentiel est pour le moins dichotomique. Il se comporte en véritable ‘allié-adversaire’ du président Wade. Si certains analysent l'attitude du leader des ‘Follistes’ comme une manière de faire monter les enchères, d'autres trouvent qu'il est animé du sombre dessein de faire couler, de l'intérieur, la barque libérale très agitée du fait des nombreuses crises qui secouent le Sénégal.

A quoi joue Landing Savané ? La question n'est pas saugrenue. Loin s'en faut. Tant le secrétaire général d'Aj/Pads ne cesse de tailler des croupières à son allié libéral sans vouloir quitter l'esquif présidentiel. Le ton de plus en plus virulent, les ‘Follistes’ critiquent avec véhémence la gestion du régime issu de l'alternance du 19 mars 2000 dont ils sont, pourtant, largement comptables. ‘On va vers des difficultés’, a professé Landing Savané à Saint-Louis eu égard à toutes ces crises qui assaillent le Sénégal.

Mais, Landing Savané n'est-il pas simplement en train de faire monter les enchères afin de pousser le président Wade à lui offrir un strapontin plus conforme à son statut, ainsi que le soupçonnent ses alliés libéraux ? ‘La politique, disait Jérôme Menod, est ce monde de mots, d'annonces et d'effets d'annonces. Sachant que les places seront très disputées sur une liste commune dirigée par le Pds du fait des nombreux conflits de préséance qui déchirent le parti libéral, le leader d'Aj/Pads cherche à prendre les devants en multipilant les effets de manche. C'est parce que, explique une source proche d'Aj/Pads, Landing Savané ne voudrait plus d'un poste de ministre, fusse-t-il affublé du titre ronfleur ‘d'Etat’. Il viserait la primature et même le poste de vice-président si celui-ci venait à être institué, ou à tout le moins le perchoir. Et pour arriver à ses fins, Landing Savané joue sur les nerfs de son allié libéral. ‘Retenez-moi ou je pars’, semble-t-il dire au président Wade. Sa disposition déclarée à tailler bavette avec Idrissa Seck, si éventuellement ce dernier en manifestait le désir, hérisse les poils des libéraux. C'est, en fait, comme si le leader des ‘Follistes’ voulait faire croire à Me Wade qu'il vend à l'encan son soutien. L'effet escompté : faire peur à l'allié libéral en menaçant de s'allier avec son adversaire pour le contraindre à s'asseoir à la table des négociations. Les confidences d'une source proche d'Aj/Pads ne déparent pas ce tableau. En effet, de l'avis de notre interlocuteur, une alliance avec Idrissa Seck n'est pas envisageable. ‘Nous n'allons pas quitter un libéral pour en rejoindre un autre. Nous avons déjà expérimenté la politique libérale avec Wade’, a confessé notre source. Idrissa Seck servirait alors d'épée de Damoclès.

L'autre hypothèse qui semble débusquer le sens des propos de notre source, c'est que Landing et les siens ne veulent plus des libéraux. C'est pourquoi, il cherche à couler de l'intérieur la barque libérale. Les ‘Follistes’ multiplient les déclarations incendiaires contre le régime de Me Wade. En somme, ils sont dans la peau d'un ‘allié-adversaire’. Allié, parce qu'ils se réclament toujours de la mouvance présidentielle, adversaire parce qu'ils ne cautionnent plus les orientations du pouvoir libéral. Comble de paradoxe : Landing Savané est candidat contre Me Wade tout en restant son allié.

Mais, il se pose une question qu'il faudrait trancher inéluctablement un jour ou l'autre si Landing Savané maintenait sa candidature et si, par la magie des urnes, un second tour s'imposait : à qui Aj/Pads et son candidat reverseraient-ils leurs voix ? ‘Certainement pas à Wade’, dira notre source. A qui alors, dès lors qu'Idrissa Seck est exclu du schéma d'alliance des ‘Follistes’ ? Ousmane Tanor Dieng et le Ps ? ‘Que nenni’, rétorque notre interlocuteur qui martèle : ‘Nous ne serons pas acteurs, encore moins partisans d'une restauration du régime socialiste’. Sur ce point, au moins les ‘Follistes’ sont conséquents avec eux-mêmes. Aj/Pads n'a jamais voulu s'allier aux socialistes même du temps où ces derniers étaient au pouvoir.

Il ne reste plus alors sur les tablettes de Landing Savané et de son parti que Moustapha Niasse, Abdoulaye Bathily et Amath Dansokho pour ne citer que les opposants les plus dangereux pour le régime du président Wade et qui ont plus d'atomes crochus avec les ‘Follistes’. Une alliance entre Landing Savané et le secrétaire général de l'Afp ne serait pas inédite. Ils se sont retrouvés déjà dans le cadre du Front pour l'alternance (Fal) qui a porté Me Wade au pouvoir. Bien qu'étant un pur produit du Ps, Moustapha Niasse est apprécié des ‘Follistes’. Abdoulaye Bathily et Amath Dansokho sont, pour leur part, des alliés naturels de Landing Savané et de son parti. C'est parce qu'ils ont in divis la gauche dite traditionnelle. D'ailleurs, ils sont unis dans le cadre du Mouvement pour les assises de la gauche (Mag), dont le but est de rassembler tous les partis de gauche. Ce cadre que l'on n'entend presque plus, n'en est pas moins actif. La Ld/Mpt, le Pit et Aj/Pads, qui en constituent le noyau y travaillent, subrepticement, en parfaite intelligence. ‘Des retrouvailles avant les prochaines élections ne sont pas à écarter’, indique notre source.

En attendant, Landing Savané se complaît dans cette position d'allié-adversaire. Parce que le leader d'Aj/Pads est conscient que Me Wade ne peut plus se permettre de perdre un allié à six mois des élections. La peur qui a noué le ventre des libéraux lorsqu'ils ont appris qu'Idrissa Seck démarchait les partis de la Cap 21 est éloquente. Mais Landing est-il un allié sûr ?